Boucher, François
Rue de la Verrerie
Rue Saint-Thomas-du-Louvre
Rue disparue
Rue Jean-Jacques Rousseau
Ancienne rue Grenelle-Saint-Honoré.
Rue de Richelieu
Palais du Louvre, rue de Rivoli
Membre de l'Académie royale de peinture et sculpture (1734)
Premier peintre du Roi (1765)
Formation
Né le 29 septembre 1703 à Paris, François Boucher fait probablement son apprentissage chez son père, Maître-Peintre à l’Académie de Saint-Luc. Après être passé brièvement dans l’atelier de François Lemoyne (1688-1737) et très certainement chez Jean-François de Troy (1679-1752), il met ses talents de graveur au service de Jean-François Cars (1661-1738) pour la création de frontispices et de thèses. En 1722, il débute une collaboration avec Jean de Jullienne (1686-1766) qui se prolonge plusieurs années et réalise plus d’une centaine d’eaux-fortes d’après les dessins de Watteau pour la publication du recueil des Figures de Differents Caracteres publié en 1726. À l’âge de vingt ans, il obtient le Premier Prix de l’Académie royale de Peinture et de Sculpture mais ne reçoit pas de bourse pour son séjour à Rome. Cinq ans plus tard, il prend finalement la décision de rejoindre la Ville éternelle à ses propres frais aux côtés de Carle, Louis-Michel et François Vanloo (1708-1732). Lors de son séjour – qui dure trois ans –, il suit les cours dispensés à l’Académie et produit de petits tableaux à la manière des Flamands. Alors qu’il s’était initié à la peinture nordique en fréquentant les collections parisiennes avant son départ, il enrichit sa culture visuelle pendant son séjour à Rome en se familiarisant avec les artistes italiens.
Retour sur la scène parisienne
Dès son retour à Paris en 1731, il prend part à la publication du second livre des Diverses Figures Chinoises peintes par Watteau…au Château de la Muette pour lequel il grave douze eaux-fortes. Cette collaboration est une première incursion du peintre dans la chinoiserie et marque certainement une étape décisive dans son attrait pour l’Orient. Conscient de la réalité du marché, François Boucher développe dans les années 1730 une stratégie commerciale pour s’imposer comme peintre incontournable dans la capitale. Pour ce faire, il expose chez l’avocat François Derbais une série de peintures de grand format qui feront sa réputation (notamment Aurore et Céphale (Nancy, MBA) ; Vénus demande à Vulcain les armes pour Énée (Musée du Louvre). La même année, il est agréé comme peintre d’histoire à l’Académie de Peinture et de Sculpture et reçu grâce à la présentation de Renaud et Armide (Musée du Louvre), le 30 janvier 1734. La première commande officielle arrive en 1735 (quatre Vertus en grisaille pour le plafond de la chambre de la Reine à Versailles) et de nombreuses autres suivront : la Chasse au léopard en 1736 puis, la Chasse au crocodile en 1738-39, toutes deux pour la galerie des petits appartements du roi à Versailles, quatre pastorales pour les petits appartements du roi à Fontainebleau, quinze peintures pour le château de Choisy à partir de 1741, des travaux pour Marly... Les années 1740 sont synonymes de succès pour François Boucher qui devient l’un des peintres les plus admirés de sa génération et reçoit désormais la protection de madame de Pompadour (1721-1764). Ses travaux touchent tous les domaines des arts, il fournit dessins et costumes pour l’Académie de musique, donne des modèles pour les arts décoratifs en collaborant avec les manufactures de Vincennes, de Beauvais puis celle des Gobelins dont il devient l’inspecteur en 1755. Sa carrière académique, elle aussi brillante, l’amène à devenir professeur à l’Académie en 1737, puis directeur en 1765 et, la même année, premier peintre du roi en remplacement de Carle Vanloo. Il meurt le 30 mai 1770 dans son appartement du palais du Louvre.
La Chine, « une des provinces du rococo »
C’est à partir des années 1740 que François Boucher prend une part plus active dans le circuit de l’asiatica par ses liens étroits avec le marchand-mercier Edme-François Gersaint (1694-1750) notamment, mais aussi en débutant, très certainement au même moment, une importante collection. Bien qu’il n’ait jamais brossé de peinture de chevalet à la chinoise, l’intérêt dont Boucher fait preuve pour les objets orientaux se manifeste dans les séries de dessins destinés à la gravure et même d’estampes - qu’il grave lui-même – dans lesquels il donne vie aux statuettes et aux figures humaines peintes sur les porcelaines ou les estampes chinoises de son cabinet. Les objets chinois apparaissent ainsi par petites touches dans quelques-unes de ses peintures à sujets intimes, dans nombre de ses gravures et avec éclat dans les esquisses pour la Seconde tenture chinoise. Dans un rapport presque sensuel à l’objet, Boucher se plaît à rendre les matières, le velouté de la porcelaine, la brillance des montures en bronze, anime ses statuettes en terre crue et démontre son excellente connaissance des objets extrême-orientaux. Ses « tableaux de mode », mettant en scène des personnages féminins ou des familles dans de riches intérieurs contemporains, décorés de pagodes, pots-pourris richement montés et autres paravents, participent à la promotion des objets que l’on trouve chez les merciers. Mais l’ensemble certainement le plus emblématique de sa production chinoise est la série des dix petits cartons (Besançon, MBAA, D.843.1.1 ; D.843.1.2 ; D.843.1.3 ; D.843.1.4 ; D.843.1.5 ; D.843.1.6 ; D.843.1.7 ; D.843.1.8 ; D.843.1.9 ; 983.19.1) pour la Seconde tenture chinoise commandée par Jean-Baptiste Oudry (1686-1755) vers 1742. Depuis un demi-siècle, plusieurs chercheurs se sont penchés sur les sources visuelles utilisées par le peintre. S’il est établi depuis longtemps que Boucher exploite les récits de voyageurs européens à l’instar de celui d’Arnoldus Montanus (1625-1683), Perrin Stein a montré plus récemment (1996, 2007, 2019) qu’il a également recours aux motifs chinois qu’il isole et interprète très librement dans ses dessins réalisés pour la gravure et très tôt employés dans les arts décoratifs européens (mobilier, céramiques, boîtes à tabac ou de toilette). Ses sources sont diverses : statuettes en terre ou en pierre, porcelaines, estampes. Le Gengzhi tu 耕織圖 (traité de riziculture et de sériciculture publié en Chine en 1696) et la romance du Pavillon de l’Ouest, en chinois Xixiang ji, 西廂記, lui servent par exemple de modèle pour plusieurs Scènes de la vie chinoise. Le peintre n’isole pas seulement les motifs de certaines planches chinoises, il fait preuve d’une réelle attention pour la construction de l’espace et de la perspective dans les productions chinoises. Ainsi, quelques estampes des Scènes de la vie chinoise présentent un traitement de l’espace directement inspiré de la Chine (en particulier, les vues en angle des barrières et rambardes).
Article rédigé par Lisa Mucciarelli
Training
Born in Paris on 29 Septembre 1703, François Boucher probably did his apprenticeship under his father, Master Painter at the Académie de Saint-Luc. After a brief time in the workshop of François Lemoyne (1688-1737) and most certainly under Jean-François de Troy (1679-1752), he placed his talents as engraver at the service of Jean-François Cars (1661-1738) for the creation of frontispieces and theses. In 1722, he began a collaboration with Jean de Jullienne (1686-1766) which continued for a number of years. Here, he made over a hundred etchings based on drawings by Watteau for publication in the collection Figures de Differents Caracteres, published in 1726. At the age of 20, he was awarded First Prize by the Académie royale de Peinture et de Sculpture. However, he never received the grant money for his stay in Rome. Five years later, he finally decided to go to the Eternal City at his own expense, alongside Carle, Louis-Michel and François Vanloo (1708-1732). During his Roman sojourn – which lasted three years– he attended the classes delivered by the Académie and produced little paintings in the Flemish manner. Boucher had familiarised himself with northern painting styles by frequently visiting Parisians collections prior to his departure for Rome, where he further enriched his visual culture by studying the Italian artists.
Return to the Paris scene
In 1731, as soon as he returned, he participated in the publication of the second book of the Diverses Figures Chinoises peintes par Watteau…au Château de la Muette (Diverse Chinese figures painted by Watteau… at the Chateau of La Muette) for which he engraved twelve etchings. This was the painter’s initial incursion into chinoiserie and was certainly a decisive step in his developing attraction for the Orient. Aware of the reality of the market, in the 1730s François Boucher began implementing a commercial strategy to become the undisputed leading painter in the capital. To achieve this, he produed a series of large format paintings that would sealed his reputation, which he exhibited at the home of lawyer François Derbais (notably Aurore and Céphale (Nancy, MBA); Venus asking Vulcan to lay down his arms for Aeneas (Musée du Louvre). That same year, he was accepted as a history painter by the Académie de Peinture et de Sculpture and thanks to his presentation of Renaud and Armide (Musée du Louvre), on 30 January 1734. His first official commission came in 1735 (four Virtues in grisaille, for the ceiling of the Queen’s Bedroom in Versailles). Many more would follow: the Leopard hunt in 1736, followed by the Crocodile hunt in 1738-39, both for the gallery of the petits appartements du roi (private apartments) in Versailles, four pastorals for the petits appartements du roi in Fontainebleau, fifteen painting for the Château de Choisy begun in 1741, works for the Château de Marly, etc. The 1740s were synonymous with success for François Boucher, who became one of the most admired painters of his generation, becoming the protégé of Madame de Pompadour (1721-1764). His works touched upon every domain of the arts. He designed costumes for the Académie de musique, offered models for the decorative arts in collaboration with the manufactures of Vincennes, Beauvais and finally Les Gobelins, of which he became the inspector in 1755. His equally brilliant academic career lead to a professorship at the Académie in 1737, where he was appointed director in 1765. That same year, he was also appointed First Painter to the King, replacing Carle Vanloo. He died 30 May 1770 in his apartment in the Louvre Palace.
China, “one of the provinces of the rococo”
From 1740 onward François Boucher played an active role in the asiatica circuit, notably through his close ties with the marchand-mercier (merchant of objets d’art) Edme-François Gersaint (1694-1750), but most certainly also by simultaneously beginning an important collection. Though he never painted an easel painting in the Chinese manner, Boucher’s interest in oriental objects can be seen in the series of drawings intended for engraving and even etchings – which he did himself – bringing to life statuettes and painted human figures on porcelains or the Chinese etchings in his cabinet. Thus, Chinese objects appear as little touches in a few of his paintings of intimate subjects, in a number of his engravings and with dazzling effect in his sketches for the Seconde tenture chinoise (series of 6 tapestries). Boucher had a sensual relationship with the object, revelling in rendering materials, the velvety appearance of porcelain, the magnificent sheen of bronze pieces, brings to life his statuettes in unbaked clay, in a demonstration of his excellent knowledge of objects from the Far East. His “tableaux de mode” (costume paintings), placing scenes of female characters or families in sumptuous contemporary interiors, decorated with pagodas, richly mounted potpourri bowls and screens, participate in the promotion of objects one found in the boutiques of the merciers. However, certainly the most emblematic chinoiseries works is the series of ten little cartoons (Besançon, MBAA, D.843.1.1; D.843.1.2; D.843.1.3; D.843.1.4; D.843.1.5; D.843.1.6; D.843.1.7; D.843.1.8; D.843.1.9; 983.19.1) for the Seconde tenture chinoise commissioned by Jean-Baptiste Oudry (1686-1755) circa 1742. For half a century, several researchers have focused on revealing the visual sources Boucher used. If it has long since been established that Boucher relied upon stories recounted by European travellers such as the one of Arnoldus Montanus (1625-1683). As Perrin Stein more recently demonstrated (1996, 2007, 2019), Boucher also relied on Chinese motifs, which he isolated and freely interpreted in the drawings he did for engraving and that were very early on used in the decorative European arts (furniture, ceramics, snuff and toilette boxes). His sources were diverse: terracotta or stone statuettes, porcelains and etchings; the Gengzhi tu 耕織圖 (treatise on rice cultivation and silkworm farming published in China in 1696) and the romance of the Pavillon de l’Ouest, in Chinese, Xixiang ji, 西廂記, for example served as a model for several Scènes de la vie chinoise. The painter not only removed and isolated the motifs of certain Chinese plates, he also demonstrated the serious attention he paid to the construction of space and to perspective in his Chinese-inspired works. Thus, in some of the etchings of Scènes de la vie chinoise the way he treated space drew inspiration directly from China (in particular, the angled views of barriers and guardrails).
Article by Lisa Mucciarelli (translated by Gammon Sharpley)
[Objets collectionnés] bouteilles, flacons, coq en porcelaine ; boîtes, plateaux en laque.
[Objets collectionnés] porcelaines (théières, vases de formes diverses, pots-pourris, boules à parfum, coupes, canards, singe), grès (coupes, théières, tasses).
[Objets collectionnés] objets en argent (théière, tasses, soucoupes), objets en bronze (cassolettes, pots-pourris, vases).
[Objets collectionnés] instruments de musique, objets en matériaux divers (lanterne en bois et en ivoire, paravents en papier et bois, accessoires du costume), objets en laque (cassette, tablette).
[Objets collectionnés] statuettes et objets en stéatite, jades, ivoires.
[Objets collectionnés]
[Objets collectionnés] marbres.
[Objets collectionnés]
[Objets collectionnés] Ecoles de Florence, Sienne, Parme, Bologne, Venise, Naple et autres. Ecoles espagnoles, françaises et des Pays-Bas.
[Objets collectionnés] tableaux, gouaches, miniatures.
[Objets collectionnés] terres cuites, plâtres.
[Objets collectionnés] vases en « terre d’Angleterre ».
[Objets collectionnés] bronzes.
[Objets collectionnés] porcelaines de Perse, de Saxe, de France, biscuit.
[Objets collectionnés] minéraux, cristaux, pierres, polypiers, coquilles, bijoux.
Collectionneur boulimique s’il en est, François Boucher – par ailleurs connaisseur reconnu en matière de coquilles – évolua toute sa vie dans un monde peuplé d’œuvres d’art, d’objets orientaux et de naturalia. La collection d’objets orientaux de François Boucher, constituée sans doute à partir des années 1730-1740, est vendue dans l’appartement du peintre au palais du Louvre à partir du lundi 18 février 1771, soit dix mois après son décès. Le catalogue établi par Pierre Remy est la source la plus importante pour connaître et étudier cette collection en l’absence d’inventaire après-décès. Les recherches récentes (Joulie F., 2017 ; Une des provinces du rococo : La Chine rêvée de François Boucher, 2019) ont permis d’identifier trois objets ayant vraisemblablement appartenu au peintre : une paire de vases en porcelaine céladon et monture en bronze doré aux tritons et un pot-pourri en grès (dit « porcelaine truitée » dans le catalogue) et monture en bronze doré à tête de satyres (tous trois conservés dans des collections particulières). Si l’on ignore tout de l’agencement de la collection de Boucher avant 1756 – date de l’installation du peintre dans l’appartement de Charles Antoine Coypel (1694-1752) au Louvre –, les grands travaux qu'il mène ensuite pour réaménager les lieux sont documentés. Par ailleurs, le témoignage d’un jeune aristocrate savoyard, Joseph Henry Costa de Beauregard (1752-1824)– de passage à Paris – rédigé le 10 janvier 1767 nous renseigne sur la disposition de la collection. Les objets orientaux y sont mêlés aux curiosités naturelles (toutes sortes de pierreries, des papillons des Indes et de la Chine, quatre ou cinq très petits oiseaux, un nombre infini des plus beaux minéraux, de coraux, de plantes marines et de pétrifications).
François Boucher débute ses achats sans doute auprès du marchand Gersaint – qui décide, à partir de 1737, de se reconvertir dans la vente d’objets venus d’Extrême-Orient – et participe ainsi au développement du goût pour les objets chinois à Paris. Le peintre prend part à cette nouvelle activité en dessinant la carte-adresse du marchand et, grâce à sa pratique de collectionneur, s’inscrit dans un cercle de curieux et d’amateurs, entretenant des liens notamment avec Jean de Jullienne, Blondel d’Azincourt (1695-1776) et Randon de Boisset (1708-1776) qu’il côtoie dans les ventes publiques. L’examen des catalogues annotés nous apprend qu’il achète notamment lors des vacations d’Antoine de La Roque (1672-1744) en 1745, de René-Louis Bailly en 1766 et de madame Dubois-Jourdain (?). Outre Gersaint, il se fournit aussi chez les marchands-merciers Lazare Duvaux (1703-1758), Pierre Remy (1715 ou 1716-1797), Dubuisson, Rouveau et Simon-Philippe Poirier (vers 1720-1785). Véritable démarche de sociabilité, la collection participe à son ascension sociale. Il ne se contente pas seulement d’acquérir des objets orientaux, à partir des années 1730, il intègre discrètement et délicatement porcelaines et paravents dans ses peintures d’intérieurs, participant à la promotion de ce nouveau goût plébiscité par son ami Gersaint. Si les objets chinois disparaissent assez rapidement de ses peintures, sa collection elle, ne semble pas se limiter à un effet de mode. Elle est pour le peintre une véritable passion qui durera jusqu’à sa mort, en témoignent les nombreux achats qu’il réalise au moins jusqu’en 1767.
Amateur insatiable, il réunit une collection d’objets orientaux d’une grande diversité qui passait « de l’aveu de tout le monde, pour l’un des plus riches & des plus agréables collections que l’on voit à Paris » comme le souligne Pierre Remy dans l’avant-propos du catalogue de la vente après-décès. L’ouvrage est divisé selon quatre grands domaines : tableaux, « desseins, estampes », objets divers et « Minéraux, Cristallisations, Madrepores, Coquilles & autres Curiosités ». Les quelques sept-cent-un objets extrême-orientaux sont répartis dans trois-cent-vingt lots eux-mêmes ventilés dans dix catégories, selon leur matériau (« Bronzes, Ivoires, Pagodes de pâte des Indes, Pierre de larre, Curiosités en argent, Laques, Porcelaines, Terre des Indes ») ou leur typologie (« Peintures chinoises, Morceaux curieux et Effets curieux »). L’exemplaire conservé par la bibliothèque de l’Institut national d’histoire de l’art (VP 1771/3) est celui qui, à notre connaissance, est le plus riche en annotations. Il précise le nom de la plupart des acheteurs et le prix des lots, nous renseignant ainsi sur la présence de nombreux marchands (Doyen, Dufrêne, Claude-François Julliot (1727-1794), Legère, Neveu, Alexandre-Joseph Paillet (1743-1814), Perrin, Pierre Remy, etc.) et d’amateurs tels que les abbés Gruel et Le Blanc (1707-1781), les ducs de Caylus (vers 1733-1783) et de Chaulnes (1741-1792) ou Randon de Boisset. Le total des vacations pour les collections extrême-orientales s’élève à 23 775 livres 51 sols. La valeur marchande de la collection, loin d’être ridicule, n’atteint tout de même, pas les prix considérables des ventes de certains contemporains de Boucher comme Randon, Louis-Jean Gaignat (1697-1768) et Jean de Jullienne. Parmi les nombreux acheteurs mentionnés dans les marges de l’ouvrage, le duc de Chaulnes se distingue en se portant acquéreur d’au moins vingt-cinq lots pour un total de 3 131 livres et 82 sols, la somme la plus importante étant consacrée à une maison chinoise pour laquelle il dépense 1 199 livres et 19 sols (lot 942) – une somme considérable pour la vente Boucher. La lanterne chinoise à six pans provenant du cabinet de l’amateur Jean de Jullienne, remportée par Chaulnes pour 730 livres et 9 sols, se distingue par sa rareté et sa provenance. Pierre Remy est le second acheteur avec soixante-et-onze lots acquis pour un total de 3 954 livres et 81 sols. Les marchands Doyen, Dufrêne, Julliot, Légere, Neveu, Paillet, Perrin suivent de plus loin avec une dizaine de lots chacun. Si la collection est dominée par les porcelaines, les laques et autres objets très appréciés par les amateurs, elle est aussi ponctuée de pièces plus rares qui font sa singularité. Dans le domaine de la porcelaine, pièces communes de Chine et du Japon voisinent avec des types plus précieux tel que blancs de Dehua 德華, céladons, bleus célestes, craquelés et truités, formant un ensemble de 234 pièces dont un tiers est garni de bronze. Quatre-vingt-dix laques ventilées en quarante-trois lots sont mises à l’encans, en majorité des boîtes et des plateaux de formes et de dimensions variées. Quant aux pièces prisées sur le marché, il s’agit d’ivoires produits pour l’exportation, de « pagodes en pâte des Indes » certainement réalisées à Canton et d’objets en « pierre de larre » (stéatite). Enfin, bronzes chinois peu importés en Europe, curiosités en argent et instruments de musique constituent la réelle singularité de la collection, prouvant une fois encore que loin d’être une simple passade, cet ensemble reflète le réel intérêt du peintre pour l’Orient.
Article rédigé par Lisa Mucciarelli
A bulimic collector if there ever was one, François Boucher – also a recognised expert on shells – developed his art throughout his life in a world filled with works of art, oriental objects and naturalia. The collection of oriental objects François Boucher undoubtedly began building in the 1730s-1740s, was put up for sale in the painter’s apartment in the Louvre Palace from Monday 18 February 1771, ten months after his death. The catalogue prepared by Pierre Remy is the most important source for knowledge and study of this collection in the absence of an inventory after death. Recent research (Joulie F., 2017; Une des provinces du rococo: La Chine rêvée de François Boucher, 2019) has identified three objects that most probably belonged to Boucher: a pair of celadon porcelain vases in gilt bronze mounts with tritons and a stoneware potpourri bowl (called “porcelaine truitée” (flecked porcelain) in the catalogue) with gilt bronze mount with satyrs’ heads (all three held in private collections). Though nothing is known about the way his collection was displayed prior to 1756 – date of Boucher’s installation in the apartment of Charles Antoine Coypel (1694-1752) in the Louvre – the major refurbishing work Boucher undertook at that time is documented. Furthermore, the testimony of a young Savoyard aristocrat, Joseph Henry Costa de Beauregard (1752-1824), passing through Paris, written on 10 January 1767 informs us about the way the collection was displayed. The oriental objects were mixed in with natural curiosities (all kinds of stones, butterflies from India and China, four or five very small birds, an infinite number of the most beautiful minerals, corals, marine plants and petrified specimens).
François Boucher’s first purchases were undoubtedly made from the merchant Gersaint – who in 1737 decided to convert his activity to the sale of objects from the Far East – and participated in the development in Paris of the taste for Chinese objects. The painter took part in this activity by drawing the merchant’s address card and, thanks to his practice of collector, entered the circle of curious amateurs, maintaining ties notably with Jean de Jullienne, Blondel d’Azincourt (1695-1776) and Randon de Boisset (1708-1776), with whom he attended public auctions. The annotated catalogues reveals that he bought in particular during the estate sales of Antoine de La Roque (1672-1744) in 1745, René-Louis Bailly in 1766 and Madame Dubois-Jourdain (?). In addition to Gersaint, he bought from the marchands-merciers Lazare Duvaux (1703-1758), Pierre Remy (1715 or 1716-1797), Dubuisson, Rouveau and Simon-Philippe Poirier (circa 1720-1785). Truly an activity of sociability, his collection was instrumental in raising his social status. He not only acquired oriental objects. From the 1730s on, he began to discreetly and delicately include porcelains and screens in his paintings of interiors, participating in the promotion of this newly developed taste being tested by his friend Gersaint. Though the Chinese objects disappeared fairly quickly from his paintings, his collection does not seem to have been limited to a phenomenon of fashion. For the painter it was a genuine passion that lasted until his death, as attested by the number of purchases that he made, at least until 1767.
An insatiable amateur, he assembled a highly diverse collection of oriental objects which was considered “by the admission of everyone, as one of the richest & most agreeable collections one may see in Paris” as Pierre Remy emphasised in the foreword of the catalogue for the estate sale. This book is divided into four major domains: Paintings, “drawings, etchings”, diverse objects and “Minerals, Crystallisations, Madrepores, Shells & other Curiosities”. The seven-hundred-one some odd Far-Eastern objects are distributed into three-hundred-five lots, themselves broken out into ten categories, according to their material (“Bronzes, Ivories, Pagodas made of India pastes, Soapstone, silver Curiosities, Lacquers, Porcelains, India clay”) or their typology (“Chinese paintings, Curious pieces and curious Effects”). The copy held in the library of the Institut national d’histoire de l’art is the one which, to our knowledge, is the most richly annotated. It specifies the name of most of the buyers and the prices of the lots, while also detailing the presence of numerous dealers (Doyen, Dufrêne, Claude-François Julliot (1727-1794), Legère, Neveu, Alexandre-Joseph Paillet (1743-1814), Perrin, Pierre Remy, etc.) and amateurs such as the abbots Gruel and Le Blanc (1707-1781), the ducs de Caylus (vers 1733-1783) and de Chaulnes (1741-1792) and Randon de Boisset. The total sales for the Far East collections attained 23,775 livres 51 sols. The market value of the collection, though far from ridiculous, nevertheless did not reach the high prices of the estate sales of some of Boucher’s contemporaries, such as Randon, Louis-Jean Gaignat (1697-1768) and Jean de Jullienne. Among the many buyers mentioned in the margins of the catalogue, the duc de Chaulnes distinguished himself by purchasing at least twenty-five lots for a total of 3,131 livres 82 sols, the highest price being for a Chinese house for which he paid 1,199 livres 19 sols (lot 942) – a considerable sum for the Boucher sale. The six-paned Chinese lantern from the cabinet of the amateur Jean de Jullienne, won by Chaulnes for 730 livres 9 sols, stood out for its rarity and origin. Pierre Remy was the second buyer with seventy-one lots acquired for a total of 3,954 livres 81 sols. The merchants Doyen, Dufrêne, Julliot, Légere, Neveu, Paillet, Perrin followed further behind with about ten lots each. Though the collection was predominantly comprised of porcelains, lacquers and other objects highly appreciated by the amateurs, there waere also a number of rarer pieces that made it so singular. In the domain of porcelain, common pieces from China and Japan were mixed in with more precious types such as whites from Dehua 德華, celadons, celestial blues, crackled and flecked, forming an ensemble of 234 pieces of which one third is garnished with bronze. Ninety lacquers in fourty-three lots were placed auctioned off, most were boxes and trays of varying dimensions. The pieces most prized by the market were the ivories made for export, “pagodas in Indian clay” certainly made in Canton and objects made of “pierre de larre” (soapstone). Finally, Chinese bronzes, rarely imported in Europe, silver curiosities and musical instruments were the real singularity of this collection, proving once again that far from being merely a fad, this ensemble reflected Boucher’s genuine interest in the Orient.
Article by Lisa Mucciarelli (translated by Gammon Sharpley)
Boucher s’inscrit dans un cercle de curieux et d’amateurs, entretenant des liens notamment avec Jean de Jullienne, Blondel d’Azincourt (1695-1776) et Randon de Boisset (1708-1776) qu’il côtoie dans les ventes publiques. (Source : notice Agorha « François Boucher » rédigée par Lisa Mucciarelli)
En 1722, Boucher débute une collaboration avec Jean de Jullienne (1686-1766) qui se prolonge plusieurs années. (Source: Notice Agorha rédigée par Lisa Mucciarelli)
François Boucher fait probablement son apprentissage chez son père, Maître-Peintre à l’Académie de Saint-Luc. Après être passé brièvement dans l’atelier de François Lemoyne (1688-1737) et très certainement chez Jean-François de Troy (1679-1752), il met ses talents de graveur au service de Jean-François Cars (1661-1738) (Source : notice Agorha « François Boucher » rédigée par Lisa Mucciarelli)
François Boucher fait probablement son apprentissage chez son père, Maître-Peintre à l’Académie de Saint-Luc. Après être passé brièvement dans l’atelier de François Lemoyne (1688-1737) et très certainement chez Jean-François de Troy (1679-1752), il met ses talents de graveur au service de Jean-François Cars (1661-1738) (Source : notice Agorha « François Boucher » rédigée par Lisa Mucciarelli)
C’est à partir des années 1740 que François Boucher prend une part plus active dans le circuit de l’asiatica par ses liens étroits avec le marchand-mercier Edme-François Gersaint (1694-1750) notamment, mais aussi en débutant, très certainement au même moment, une importante collection. François Boucher débute ses achats sans doute auprès du marchand Gersaint – qui décide, à partir de 1737, de se reconvertir dans la vente d’objets venus d’Extrême-Orient – et participe ainsi au développement du goût pour les objets chinois à Paris. (Source : notice Agorha « François Boucher » rédigée par Lisa Mucciarelli)
L’ensemble certainement le plus emblématique de la production chinoise de François Boucher est la série des dix petits cartons (Besançon, MBAA, D.843.1.1 ; D.843.1.2 ; D.843.1.3 ; D.843.1.4 ; D.843.1.5 ; D.843.1.6 ; D.843.1.7 ; D.843.1.8 ; D.843.1.9 ; 983.19.1) pour la Seconde tenture chinoise commandée par Jean-Baptiste Oudry (1686-1755) vers 1742. (Source : notice Agorha « François Boucher » rédigée par Lisa Mucciarelli)
La collection d’objets orientaux de François Boucher, constituée sans doute à partir des années 1730-1740, est vendue dans l’appartement du peintre au palais du Louvre à partir du lundi 18 février 1771, soit dix mois après son décès. Le catalogue établi par Pierre Remy est la source la plus importante pour connaître et étudier cette collection en l’absence d’inventaire après-décès. (Source : notice Agorha « François Boucher » rédigée par Lisa Mucciarelli)
Boucher s’inscrit dans un cercle de curieux et d’amateurs, entretenant des liens notamment avec Jean de Jullienne, Blondel d’Azincourt (1695-1776) et Randon de Boisset (1708-1776) qu’il côtoie dans les ventes publiques. (Source : notice Agorha « François Boucher » rédigée par Lisa Mucciarelli)
Dans son Dictionnaire pittoresque et historique, Hébert (actif au milieu du XVIIIe, dates de naissance et de décès inconnues) écrit à propos de cette collection : « Monsieur Blondel d’Azincourt […] a formé ce cabinet, qui est très intéressant par la variété et le choix des objets qui le composent. Il mérite toute l’attention des amateurs et des curieux. Ce cabinet est dans un genre différent de celui de M. Blondel de Gagny son père […]. C’est par cette raison que cet amateur s’est attaché de préférence à quelques beaux tableaux modernes, à de belles esquisses et à une très grande quantité de dessins, au nombre desquels on en doit surtout remarquer près de cinq cents de Boucher.
(Source : Notice Agorha "Barthélémy-Augustin Blondel d'Azincourt" rédigée par Elodie Kong)
Boucher s’inscrit dans un cercle de curieux et d’amateurs, entretenant des liens notamment avec Jean de Jullienne, Blondel d’Azincourt (1695-1776) et Randon de Boisset (1708-1776) qu’il côtoie dans les ventes publiques. (Source : notice Agorha « François Boucher » rédigée par Lisa Mucciarelli)
L’examen des catalogues annotés nous apprend que Boucher achète notamment lors des vacations d’Antoine de La Roque (1672-1744) en 1745, de René-Louis Bailly en 1766 et de madame Dubois-Jourdain (?). (Source : notice Agorha « François Boucher » rédigée par Lisa Mucciarelli)
Outre Gersaint, Boucher se fournit aussi chez les marchands-merciers Lazare Duvaux (1703-1758), Pierre Remy (1715 ou 1716-1797), Dubuisson, Rouveau et Simon-Philippe Poirier (vers 1720-1785). (Source : notice Agorha « François Boucher » rédigée par Lisa Mucciarelli)
Outre Gersaint, Boucher se fournit aussi chez les marchands-merciers Lazare Duvaux (1703-1758), Pierre Remy (1715 ou 1716-1797), Dubuisson, Rouveau et Simon-Philippe Poirier (vers 1720-1785). (Source : notice Agorha « François Boucher » rédigée par Lisa Mucciarelli)
L'exemplaire du catalogue de la vente Boucher conservé par la bibliothèque de l’Institut national d’histoire de l’art (qui, à notre connaissance, est le plus riche en annotations) précise le nom de la plupart des acheteurs et le prix des lots, nous renseignant ainsi sur la présence de nombreux marchands : Doyen, Dufrêne, Claude-François Julliot (1727-1794), Legère, Neveu, Alexandre-Joseph Paillet (1743-1814), Perrin, Pierre Remy et d’amateurs tels que les abbés Gruel et Le Blanc (1707-1781), les ducs de Caylus (vers 1733-1783) et de Chaulnes (1741-1792) ou Randon de Boisset qui achètent lors de la vente Boucher. (Source : notice Agorha « François Boucher » rédigée par Lisa Mucciarelli)
L'exemplaire du catalogue de la vente Boucher conservé par la bibliothèque de l’Institut national d’histoire de l’art (qui, à notre connaissance, est le plus riche en annotations) précise le nom de la plupart des acheteurs et le prix des lots, nous renseignant ainsi sur la présence de nombreux marchands : Doyen, Dufrêne, Claude-François Julliot (1727-1794), Legère, Neveu, Alexandre-Joseph Paillet (1743-1814), Perrin, Pierre Remy et d’amateurs tels que les abbés Gruel et Le Blanc (1707-1781), les ducs de Caylus (vers 1733-1783) et de Chaulnes (1741-1792) ou Randon de Boisset qui achètent lors de la vente Boucher. (Source : notice Agorha « François Boucher » rédigée par Lisa Mucciarelli)
L'exemplaire du catalogue de la vente Boucher conservé par la bibliothèque de l’Institut national d’histoire de l’art (qui, à notre connaissance, est le plus riche en annotations) précise le nom de la plupart des acheteurs et le prix des lots, nous renseignant ainsi sur la présence de nombreux marchands : Doyen, Dufrêne, Claude-François Julliot (1727-1794), Legère, Neveu, Alexandre-Joseph Paillet (1743-1814), Perrin, Pierre Remy et d’amateurs tels que les abbés Gruel et Le Blanc (1707-1781), les ducs de Caylus (vers 1733-1783) et de Chaulnes (1741-1792) ou Randon de Boisset qui achètent lors de la vente Boucher. (Source : notice Agorha « François Boucher » rédigée par Lisa Mucciarelli)
L'exemplaire du catalogue de la vente Boucher conservé par la bibliothèque de l’Institut national d’histoire de l’art (qui, à notre connaissance, est le plus riche en annotations) précise le nom de la plupart des acheteurs et le prix des lots, nous renseignant ainsi sur la présence de nombreux marchands : Doyen, Dufrêne, Claude-François Julliot (1727-1794), Legère, Neveu, Alexandre-Joseph Paillet (1743-1814), Perrin, Pierre Remy et d’amateurs tels que les abbés Gruel et Le Blanc (1707-1781), les ducs de Caylus (vers 1733-1783) et de Chaulnes (1741-1792) ou Randon de Boisset qui achètent lors de la vente Boucher. (Source : notice Agorha « François Boucher » rédigée par Lisa Mucciarelli)
L'exemplaire du catalogue de la vente Boucher conservé par la bibliothèque de l’Institut national d’histoire de l’art (qui, à notre connaissance, est le plus riche en annotations) précise le nom de la plupart des acheteurs et le prix des lots, nous renseignant ainsi sur la présence de nombreux marchands : Doyen, Dufrêne, Claude-François Julliot (1727-1794), Legère, Neveu, Alexandre-Joseph Paillet (1743-1814), Perrin, Pierre Remy et d’amateurs tels que les abbés Gruel et Le Blanc (1707-1781), les ducs de Caylus (vers 1733-1783) et de Chaulnes (1741-1792) ou Randon de Boisset qui achètent lors de la vente Boucher. (Source : notice Agorha « François Boucher » rédigée par Lisa Mucciarelli)
Bénézit 1999. Ressource accessible sur abonnement.
Notice catalogue BNF : https://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb12218907t
Projet Karbowsky