Adélaïde de France
Titres : Madame Quatrième de 1732 à 1733, Madame Troisième de 1733 à 1737, Madame de 1755 à 1759, Duchesse de Louvois de 1777 à 1792.
Château de Versailles, Place d’Armes
Château de Bellevue, Place du Président Wilson & Rue Basse de la Terrasse
Marie Adélaïde de France est le sixième enfant et la quatrième fille de Louis XV (1710-1774) et de Marie Leszczyńska (1703-1768). À la différence de ses sœurs cadettes, Marie Adélaïde est élevée et éduquée à Versailles, avec ses sœurs aînées, Madame Louise Élisabeth (1727-1759), Madame Henriette (1727-1752) et Madame Marie Louise (1728-1733) ainsi qu’avec son frère Louis, dauphin de France (1729-1765). Confiée aux bons soins de Marie Isabelle de Rohan, duchesse de Tallard (1699-1754), elle étudie l’italien avec Carlo Osvaldo Goldini (1707-1793) et la musique auprès de cet esprit universel français qu’est Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais (1732-1799). Selon Madame Campan (1752-1822), « Madame Adélaïde, surtout, eut un désir immodéré d’apprendre ; elle apprit à jouer de tous les instruments de musique, depuis le cor (me croira-t-on ?) jusqu’à la guimbarde » (Jeanne-Louise-Henriette Campan, Mémoires sur la vie de Marie-Antoinette […] suivis de souvenirs et anecdotes historiques sur les règnes de Louis XIV, de Louis XV et de Louis XVI, Édition Didot Frères, 1849, p. 52).
En 1744, Mesdames Henriette et Adélaïde quittent la pouponnière royale pour emménager dans les appartements de Mesdames aînées, et deux ans plus tard elles voient entrer à leur service leur propre dame d’honneur, Marie-Angélique-Victoire de Bournonville, duchesse de Duras (1686-1764). Après la mort d’Henriette, en 1752, les appartements de Mesdames aînées deviennent ceux de Madame Adélaïde, régis par Marie-Suzanne-Françoise de Creil, duchesse de Beauvilliers (1716-1780). Adélaïde est donc la seule des princesses non mariées qui disposât de ses appartements privés. Marie Adélaïde ne se marie jamais. À la fin des années 1740, quand elle atteint l’âge d’avoir un époux, on ne trouve aucun parti de son rang qui fût en outre catholique. En 1761, on suggère, dit-on, qu’elle épouse Charles III (1716-1788) d’Espagne, veuf depuis peu, mais elle refuse lorsqu’elle voit son portrait.
Lorsque ses jeunes sœurs reviennent de Fontevrault, entre 1748 et 1750, Adélaïde prend la tête du groupe des quatre sœurs non mariées, outre elle-même, Madame Victoire (1733-1799), Madame Sophie (1734-1782) et Madame Louise (1737-1787). Adélaïde est d’une personnalité ambitieuse encline à dominer, douée d’une forte volonté, qui s’affirme sur celle de ses sœurs cadettes. Madame Campan écrit : « Madame Adélaïde avait plus d’esprit que Madame Victoire ; mais elle manquait absolument de cette bonté qui seule fait aimer les grands : des manières brusques, une voix dure, une prononciation brève la rendaient plus qu’imposante. Elle portait très loin l’idée des prérogatives du rang » (J.-L.-H. Campan, 1849, p. 58). Elle est la seule parmi les filles non mariées de Louis XV qui a des ambitions politiques, et elle tente (sans succès) d’exercer son influence à travers son père le roi, son frère le dauphin et plus tard son neveu, nouveau dauphin et futur Louis XVI (1754-1793).
Avec son frère et ses sœurs, elle tente, sans plus de succès, de briser la relation entre son père et Madame de Pompadour (1721-1764), puis plus tard celle qu’il entretient avec Madame du Barry (1743-1793). À la fin des années 1750, alors que la santé de Madame de Pompadour décline, Adélaïde devient un temps la favorite et l’intime de son père. Après la mort de Marie Leszczyńska, en 1768, elle encourage le roi, afin qu’il ne retombe pas dans les rets d’une nouvelle maîtresse, à épouser la princesse de Lamballe (1749-1792), riche et veuve. En 1769, Louis XV présente pourtant à la Cour Madame du Barry. En 1770, Marie-Antoinette (1755-1793) devient la dauphine, et durant les premières années qu’elle vit en France se rapproche de Mesdames, en raison notamment des étroites relations qu’elles entretiennent avec leur neveu Louis, le dauphin. Madame Adélaïde s’efforce de gagner le soutien de Marie-Antoinette dans sa lutte contre Madame du Barry, l’encourageant régulièrement à lui témoigner son mépris. En 1772, cette situation a à ce point tendu les rapports entre le roi et Marie-Antoinette que la mère de celle-ci, l’impératrice Marie-Thérèse (1717-1780) et son ambassadeur, inquiets des conséquences politiques de cette inimitié pour les relations entre la France et l’Autriche, contraignent la Dauphine à s’entretenir avec Madame du Barry, ruinant ainsi les intrigues de Madame Adélaïde et mettant un terme à l’amitié entre Mesdames et Marie-Antoinette.
D’avril 1774 à la mort de Louis XV, le 10 mai 1774, Madame Adélaïde et ses sœurs veillent leur père, malade de la variole. Les sœurs contractent la maladie et sont placées en quarantaine près du château de Choisy, puis guérissent. Lorsque Louis XVI monte sur le trône, Madame Adélaïde est de nouveau amenée à jouer un rôle politique : elle fournit une liste de candidats aux ministères, jouant ainsi un rôle non négligeable dans la formation du nouveau gouvernement, devenant la conseillère de son neveu. Elle compte parmi ses soutiens et ses partisans le duc d’Orléans (1725-1785), le duc de Richelieu (1696-1788), le duc d’Aiguillon (1720-1788), la duchesse de Noailles (1729-1794) et Madame de Marsan (1720-1803). Finalement, sa participation aux affaires du royaume rencontre l’opposition de la Cour et Louis XVI est contraint de l’exclure de toute fonction politique. En 1777, Madame Adélaïde est faite duchesse de Louvois par le roi. Avec sa sœur Victoire, elle s’éloigne de la Cour, préférant résider dans son château de Bellevue, à Meudon. Après la désagrégation de leurs relations avec Marie-Antoinette, le salon de Mesdames devient le lieu de rencontre des ennemis de la reine ; il est fréquenté par le ministre Maurepas (1701-1781), dont Adélaïde a soutenu la position, par le prince de Condé (1727-1776) et par le prince de Conti (1717-1776), tous membres du parti anti-autrichien, et Beaumarchais y lit ses satires contre l’Autriche.
Madame Adélaïde et sa sœur Victoire sont présentes à Versailles lorsque les femmes parisiennes marchent sur le château le 6 octobre 1789, et sont parmi celles et ceux qui se réfugient dans les appartements du roi la nuit où est attaquée la chambre à coucher de Marie-Antoinette. Lorsque la Cour quitte Versailles pour les Tuileries, leur voiture se sépare du convoi et prend la route du château de Bellevue. Après avoir obtenu leurs passeports pour Rome, Victoire et Adélaïde s’apprêtent à partir, le 3 février 1791. Mais leur intention s’est ébruitée ; le départ prévu provoque des protestations à l’Assemblée nationale et, le 19 février, une foule de femmes se rassemblent au Palais-Royal dans le but de marcher sur Bellevue afin d’empêcher Mesdames de quitter le royaume. Elles partent néanmoins le 20 février 1791, mais elles sont à nouveau arrêtées par des manifestations à Moret, et détenues quelques jours, à partir du 21 février, à Arnay-le-Duc. À Paris, les protestations contre leur départ reprennent ; les protestataires marchent sur les jardins des Tuileries, demandant au roi le retour de ses tantes. Après un débat à l’Assemblée nationale, il est décidé que la défection de Mesdames aura peu de conséquences sur la cause générale de la Révolution. Après que de nouvelles protestations ont encore retardé le départ d’Arnay-le-Duc, Mesdames quittent finalement la ville, le 3 mars, pour la Savoie, où le roi de Sardaigne les héberge dans son château de Chambéry. Adélaïde et Victoire sont accueillies le 16 avril 1791 à Rome, où elles demeurent cinq ans. Lorsque l’Italie est envahie par la France révolutionnaire, en 1796, elles quittent Rome pour Naples, et lorsque Naples est envahie par la France, en 1799, elles partent pour Corfou. Elles s’installent enfin à Trieste. Adélaïde meurt en 1800 et son corps, ainsi que celui de sa sœur Victoire, morte en 1799, est ramené en France sur ordre de Louis XVIII durant la Restauration des Bourbons. Elle est enterrée à la basilique de Saint-Denis.
Article rédigé par Natasha Shoory (traduit par François Boisivon)
Marie Adélaïde de France was the sixth child, and fourth daughter, of Louis XV (1710-1774) and Marie Leszczyńska (1703 – 1768). Unlike her younger siblings, Marie Adélaïde was raised and educated at Versailles, along with her older sisters Madame Louise Élisabeth (1727-1759), Madame Henriette (1727-1752), and Madame Marie Louise (1728-1733), as well as her brother Louis, Dauphin of France (1729-1765). She was put in the care of Marie Isabelle de Rohan, Duchesse de Tallard (1699-1754), and studied Italian under Italian librettist Carlo Osvaldo Goldini (1707-1793) and music under French polymath Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais (1732 – 1799). According to Madame Campan (1752 – 1822), ‘Madame Adélaïde, in particular, had a most insatiable desire to learn; she was taught to play upon all instruments from the horn (will is be believed!) to the Jew’s harp.’ (Campan J.-L.-H., 1854, p. 58).
In 1744, Mesdames Henriette and Adélaïde were moved from the royal nursery to their household, the Household of the Mesdames aînées, and two years later were provided their own dame d’honneur, Marie-Angélique-Victoire de Bournonville, duchesse de Duras (1686-1764). Following the death of Henriette in 1752, the Household of the Mesdames aînées became the Household of Madame Adélaïde, run by Marie-Suzanne-Françoise de Creil, duchesse de Beauvilliers (1716-1780), and Adélaïde was therefore unique in being the only unmarried princess with her own separate household. Madame Adélaïde never married: in the late 1740s when she reached the appropriate age for marriage, there were no potential Catholic suitors of appropriate status. In 1761 it was reportedly suggested she marry the recently widowed Charles III of Spain (1716-1788), but she refused upon seeing his portrait.
When her younger sisters returned from Fontevrault in 1748-50, Adélaïde headed the group of the four unmarried younger sisters, including Madame Victoire (1733-1799), Madame Sophie (1734- 1782), and Madame Louise (1737-1787). Adélaïde had a dominant and ambitious personality, with a strong will, and dominated her younger sisters. Madame Campan said that, ‘Madame Adélaïde had more talents than Madame Victoire; but she was altogether deficient in that kindness which alone creates affection for the great: abrupt manners, a harsh voice, and a short way of speaking rendered her more than imposing. She carried the idea of the perogative of rank to a high pitch.’(campan J.-L.-H., 1854, p. 63). She was unique amongst her unmarried sisters with her political ambition, and attempted (unsuccessfully) to gain influence through her father the king, her brother the Dauphin, and then through her nephew, the next Dauphin and Louis XVI (1754-1793).
Along with her siblings, Madame Adélaïde unsuccessfully attempted to sabotage their father’s relationship with Madame de Pompadour (1721-1764) and later Madame du Barry (1743-1793). In the early 1750s, when Madame de Pompadour’s health was deteriorating, Adélaïde took her place as the favourite and close companion of her father. Following the death of Marie Leszczyńska in 1768, Adélaïde encouraged her father to remarry to prevent another royal mistress, supporting the Dowager Princess de Lamballe (1749-1792) for the role. Nonetheless, in 1769 Louis XV introduced Madame du Barry to court. In 1770, Marie-Antoinette (1755-1793) became the Dauphine, and during her first years in France she became close with the Mesdames due to the close relationship they had with their nephew the Dauphin Louis. Madame Adélaïde worked to gain Marie Antoinette’s support against Madame du Barry and frequently encouraged the Dauphine to rebuff Madame du Barry. By 1772 this had created a rift in the relationship between the King and Marie Antoinette. Marie Antoinette’s mother, Empress Maria Theresa (1717-1780), and her ambassador, concerned for the political consequences for the relationship between France and Austria, forced her to speak to Madame du Barry, thus throwing off Madame Adélaïde’s plot and ending the close friendship between Adélaïde and the Dauphine.
From April 1774 until the death of King Louis XV on 10th May 1774, Madame Adélaïde and her sisters attended to their father through his illness with smallpox. The sisters caught smallpox and were quarantined near the Palace de Choisy but later recovered. Following the succession of her nephew Louis XVI, Madame Adélaïde came to play a political role once again: she provided a list of minister candidates, thus playing a significant role in the formation of the new government, and became his political advisor. Her supporters and followers included the Duc d’Orléans (1725-1785), the Duc de Richelieu (1696-1788), the Duc d’Aiguillon (1720-1788), the Duchesse de Noailles (1729-1794) and Madame de Marsan (1720-1803). Ultimately, her involvement in political affairs was opposed at court and Louis XVI was obliged to exclude her. In 1777, Madame Adélaïde was created Duchesse de Louvois by her nephew the King. She, along with her sister Victoire, distanced themselves from court and preferred to spend time in their own Château de Bellevue at Meudon. Following the disintegration of their relationship with Marie Antoinette, the salon of the Mesdames became a hotspot for nobility in opposition to the Queen; it was frequented by the minister Maurepas (1701-1781), whom Adélaïde had supported for his position, the Prince de Condé (1727 – 1776) and the Prince de Conti (1717-1776), both members of the Anti-Austrian party, and Beaumarchais, who read aloud his satires of Austria.
Madame Adélaïde and her sister Victoire were present at Versailles during the Parisian women’s march on 6 October 1789, and amongst those gathered in the King’s apartment on the night of the attack on Marie Antoinette’s bedroom. When leaving Versailles for the Tuileries in Paris, their wagon separated from the procession and headed instead to the Château de Bellevue. Upon obtaining their passports to leave for Rome, Adélaïde and Victoire were due to leave on 3 February 1791. However, an anonymous tip-off of their intention to leave caused a protest at the National Assembly, and on 19 February a crowd of women gathered at the Palais Royal and intended to march to Bellevue to prevent the Mesdames’ departure. Nonetheless, they departed on 20 February 1791. The Mesdames were temporarily halted by a protest against their departure in Moret, and detained for several days from 21 February in Arnay-le-Duc. Back in Paris, riots continued against the Mesdames’ departure, and protestors marched on the gardens of the Tuileries demanding the King order his aunts’ return. Following a debate in the National Assembly it was decided that the Mesdames’ departure had little consequence for the overall cause of the Revolution. Whilst protests at Arnay-le-Duc further delayed their departure, the Mesdames eventually left on 3 March and headed to Savoy, where the King of Sardinia installed them at the Château de Chambery. Adélaïde and Victoire arrived and were welcomed in Rome on 16 April 1791, where they remained for five years. When Italy was invaded by Revolutionary France in 1796, the Mesdames left for Naples, and when Naples was invaded by France in 1799 they left for Corfu, eventually settling in Trieste. Adélaïde died in 1800 and her body, along with that of her sister Victoire who died in 1799, were ordered back to France by Louis XVIII during the Bourbon Restoration, and buried at the Basilica of Saint-Denis.
Article by Natasha Shoory
[Objets collectionnés] Tapisseries, tapisseries portière représentant Jupiter et Juno, tapisseries portière des Gobelins, tapisserie à motif indien ; rideaux en taffetas, rideaux en tissu indien
[Objets collectionnés] Mobilier : écrans de cheminée et outils de cheminée ; deux paravents à 6 plis en acajou et bronze doré à motif chinoiserie ; lit à la duchesse en impériale avec draperies motif chinoiserie, fauteuils et tabourets motif chinoiserie ; horloges en bronze doré et nacre, horloge en bois d’ébène, bronze doré et nacre, horloges en marbre et bronze doré
[Objets collectionnés] Vases en porcelaine ; Porcelaine de Sèvres : vases, figurines, services à thé, plateaux, pot et bassin
Marie Adélaïde de France est la fille de Marie Leszczyńska et de Louis XV. (Source : notice Agorha "Marie Adélaïde de France" rédigée par Natasha Shoory)
Marie Adélaïde de France et Victoire de France sont sœurs. Elles s'exilent ensemble en Italie à la suite de la Révolution Française. (Source : notice Agorha "Marie Adélaïde de France" rédigée par Natasha Shoory)
Louis XVI est le neveu de Marie Adélaïde de France. (Source : notice Agorha "Marie Adélaïde de France" rédigée par Natasha Shoory)
[signé Marie Adélaïde et Victoire Louise Marie Thérèse de France], [1791]
Notice catalogue BNF : https://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb12449465t
ok