Le musée des Monuments français d’Alexandre Lenoir, histoire et collections
Le musée des Monuments français (1795-1815), créé et dirigé par Alexandre Lenoir à la fin de la Révolution française et sous le Premier Empire, a joué un rôle considérable dans l’histoire des musées, des collections et du goût. Imposteur ou précurseur, Alexandre Lenoir est un personnage qui, aujourd’hui encore, ne laisse pas indifférent, et son musée a toujours d’importantes résonances dans le public. Cette base de données propose le récolement systématique des œuvres identifiées, en particulier dans les collections publiques françaises avec des notices précisant leur historique.
Le musée des Monuments français
Le musée des Monuments français, ainsi appelé en donnant au mot « monuments » la valeur de témoignage du passé, s’inscrit dans le mouvement des antiquaires français du XVIIIe siècle, tels Gaignières ou Montfaucon. Il constitue l’évolution tout à fait originale d’un des dépôts provisoires nationaux créés par la Révolution française à la suite de la confiscation des biens du clergé, puis de la noblesse, pour y recueillir les œuvres d’art mises à la disposition de la nation. Ce dépôt, destiné aux œuvres parisiennes, se trouvait dans un ancien couvent du XVIIe siècle, les Petits-Augustins, sur la rive gauche de la Seine à Paris. Alexandre Lenoir, nommé au départ simple garde du lieu, s’attache très vite à faire démonter avec soin les sculptures destinées à son dépôt, qui abrite aussi des tableaux et des objets d’art. Pendant l’été et l’automne 1793, il parvient à éviter la destruction totale de nombreux tombeaux royaux et princiers de l’abbaye de Saint-Denis, et les fait transporter au dépôt. Progressivement, Alexandre Lenoir se concentre sur les sculptures et ensembles sculptés, dans le but d’écrire une sorte d’histoire monumentale de la France, aménageant les différents espaces de l’ancien couvent en salles consacrées aux XIIIe, XIVe, XVe, XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles, et complétant cette séquence par la création d’un jardin Elysée, où sont mis en valeur les tombeaux et mémoriaux d’hommes illustres. Œuvrant avec les matériaux dont il disposait, il ne reculait pas devant la réunion d’éléments composites, pour évoquer tel ou tel personnage célèbre de l’histoire de France. De 1795 à 1815, pendant vingt ans, son établissement, devenu le musée des Monuments français, fait évoluer ses présentations, édite des catalogues et diffuse, par la gravure, des reproductions de ses œuvres phares. Il connaît un grand succès auprès du public, qui vient de toute l’Europe le visiter. Lieu pittoresque décrit par tous les guides touristiques de l’époque, il joue un rôle bien plus profond encore sur la conception du patrimoine et de l’histoire. A l’instar de Jules Michelet, qui dit y avoir vécu l’émotion fondatrice de sa pensée historique, nombre d’intellectuels et d’artistes français et étrangers y saisissent la puissance évocatrice du passé qui ébranle leur rapport à l’art et au patrimoine.
En rivalité avec le musée du Louvre voisin, qui constitue un panorama de l’art universel, et avec les partisans du maintien des œuvres dans les lieux auxquels elles étaient initialement destinées, Alexandre Lenoir, qui avait su évoluer avec habileté, au gré des changements politiques sous la Révolution et le Premier Empire, voit la suppression de son musée prononcée sous la Restauration, dès 1816. Les tombeaux provenant de Saint-Denis et des églises parisiennes y retournent pour la majeure partie. Les œuvres dépourvues de lieux d’accueil vont former, dans la galerie d’Angoulême du Louvre, le premier noyau du département des Sculptures du musée du Louvre, tandis que certains ensembles, plus monumentaux, demeurent sur place, dans les bâtiments qui accueillent désormais l’Ecole des Beaux-Arts.
L’étude du musée des Monuments français est une tradition. Pour la connaissance des collections, on citera en particulier Louis Courajod, Georges Huard, Jacques Vanuxem, Françoise Baron, Jean-René Gaborit, Geneviève Bresc-Bautier, Béatrice de Chancel-Bardelot. Pour l’étude de l’institution et de son rayonnement, on citera entre autres Dominique Poulot, Roland Recht, Pascal Griener, Stephen Bann, Emmanuel Schwartz… Une exposition organisée par le musée du Louvre en 2016, Un musée révolutionnaire, le musée des Monuments français d’Alexandre Lenoir, a constitué un point d’orgue au programme de recherche mené à l’INHA à partir de 2010. Le catalogue, publié à l’occasion par Geneviève Bresc-Bautier et Béatrice de Chancel-Bardelot, en offre un état de l’art exhaustif. (Lien à la notice du catalogue)
La base de données
La connaissance des collections du musée des Monuments français passait principalement par les catalogues édités par Alexandre Lenoir. En 1969, Bruno Foucart écrivait : « on devine de quelle utilité serait ce catalogue raisonné complet du musée des Monuments français dont la thèse de M. Vanuxem n’est qu’un chapitre et celle de Mlle Beaulieu un numéro ». Dès le XIXe siècle, plusieurs conservateurs et chercheurs ont entrepris de retracer et repérer les milliers d’œuvres, principalement des sculptures, passées par le musée des Monuments français et répertoriées dans les catalogues d’Alexandre Lenoir (à distinguer des œuvres, beaucoup plus nombreuses, qui ont transité par le dépôt révolutionnaire qui l’a précédé). Cette base de données offre désormais accès aux résultats de ces minutieuses et patientes enquêtes.
La base compte à ce jour plus de 2000 notices, de façon à permettre de suivre l’historique parfois compliqué des sculptures : provenant par exemple d’un tombeau original, certains éléments (gisant, colonne, bas-reliefs) ont pu être réagencés pour former au musée des Monuments français des évocations de personnages de la petite et grande histoire de France. Les notices ont été élaborées principalement entre 2010 et 2016, ce que reflète l’état de la bibliographie. L’informatique permettant des mises à jour, en fonction des redécouvertes, telle celle du génie funéraire provenant du monument de Languet de Gergy à Saint-Sulpice, réidentifié en 2014 (Lien à la notice), la base offre aussi la possibilité d’actualiser l’état des connaissances.
La base a été complétée par un travail de numérisation des catalogues du musée des Monuments français mené par l’INHA en coopération avec le Louvre. Les catalogues sont disponibles dans la bibliothèque numérique de l’INHA.
Le point de départ de cette base de données est constitué par des fichiers papier, réalisés dans les années 1970-1990, au département des Sculptures du musée du Louvre. L’un, composé par les notices des catalogues successifs du musée des Monuments français a été coordonné par Geneviève Bresc-Bautier ; l’autre, compilé par Anne-Marie de Lapparent, introduit également des gravures des œuvres et des éléments d’historique postérieurs à 1816-1818, période de dispersion des collections du musée des Monuments français. Il a été réalisé sous la direction de Geneviève Bresc-Bautier et de Jean-René Gaborit. Entre 1998 et 2008, Michèle Lafabrie a également contribué au catalogue des œuvres passées par le musée des Monuments français, en supervisant une première base de données, conçue sous File MakerPro par Laurent Chastel. A partir de 2010, le programme a été mené conjointement par l’Institut national d’histoire de l’art et le musée du Louvre, sous la supervision de Geneviève Bresc-Bautier et avec la participation de Béatrice de Chancel-Bardelot.
Équipe
La base de données est gérée par le Département des études et de la recherche (DER) de l'Institut national d'histoire de l'art (INHA).
INHA :
- Jean-Marie Guillouët (conseiller scientifique, 2008-2012)
- Béatrice de Chancel-Bardelot (pensionnaire, 2010-2014)
- Pierre-Yves Laborde, chargé de ressources documentaires et numériques (2010-)
- François Lafabrié (moniteur-étudiant, 2011-2013) ; Julien Rocha (moniteur-étudiant, 2014).
Musée du Louvre :
- Geneviève Bresc-Bautier (directrice du département des Sculptures, 2004-2014)
- Angèle Dequier (chargée d'études documentaire)
- Laurence Brosse (chef du service de la documentation)
- Laure Starcky (documentaliste scientifique).
Equipe :
- Pauline Pernet (2010-2011, stagiaire)
- Nicolas Tini Brunozzi (2011, stagiaire)
- Laëtitia Barragué-Zouita (2011-2012, conservateur-stagiaire)
- Clémentine Ordzinski (2011-2012, stagiaire)
- Marie Ferey (2012, stagiaire)
- Maëva Nguyen (2012, stagiaire)
- Elsa Musio (2013, stagiaire)
- Delphine Croset (2013, stagiaire)
- Justine Gain (2017-2018, stagiaire)
L'élaboration des notices a bénéficié des remarques et suggestions des membres du comité d'orientation scientifique du programme. A également contribué à enrichir la base, pour ses données textuelles et surtout par des photographies Angèle Dequier, chargée d’études documentaires au département des Sculptures du musée du Louvre. François Lafabrié, moniteur-étudiant à l’INHA (2011-2013) a été un important contributeur aux notices. Leur élaboration a bénéficié des conseils de nombreux collègues : au département des Sculptures, Geneviève Bresc-Bautier, Pierre-Yves Le Pogam, Isabelle Leroy-Jay-Lemaistre, Sophie Picot-Bocquillon, Guilhem Scherf ; au département des Objets d’art Elisabeth Antoine, Michèle Bimbenet-Privat, Agnès Bos ; au musée de Cluny Xavier Dectot (en 2010-2011), puis Damien Berné ; au musée national de la Renaissance, Thierry Crépin-Leblond, Bertrand Bergbauer, au musée de Versailles Alexandre Maral ; à la sous-direction des Monuments historiques Marie-Hélène Didier, à la ville de Paris Lionel Britten. Il faut également citer parmi les personnes qui ont contribué à divers titres à la réunion des informations présentées : Jean-René Gaborit, Sophie Jugie, Serge Santos, Jacqueline Wormit.