Hilliard, Nicholas
Entre 250 et 300 oeuvres sont attribuée à Nicholas Hilliard (cf. Auerbach 1961, p. 387-335 ; Cachaud 2017, vol. II).
Nicholas Hilliard, fils de l'orfèvre anglais Richard Hilliard, est un miniaturiste, orfèvre, peintre, et dessinateur de modèles anglais. Né à Exeter autour de 1547, il est formé à Londres auprès de l'orfèvre d'Elisabeth I, Robert Brandon, après un séjour à Genève (Suisse) entre 1557 et 1559 au plus tard (Strong 1983, p. 58 ; Cachaud 2017, p. 18-22 ; Goldring 2019, p. 51-57). En parallèle de cette formation, il a également été formé à l'art de la miniature et la peinture, peut-être par Levina Teerlinck (m. 1576), miniaturiste de la Reine, et le Peintre de la Comtesse de Warwick, voire par Lucas de Heere, miniaturiste flamand alors actif à Londres (Strong 1983, p 58 ; Goldring 2019, p. 74-77). Cette formation pourrait avoir eu lieu assez tôt si on considère l'autoportrait de l'artiste à l'âge de 13 ans en 1560 (Reynolds 1971, cat. 1 et 2). Devenu maître orfèvre en 1569, il ne semble pourtant ne pas s'être installé en tant qu’orfèvre mais en tant que miniaturiste. Ses premières œuvres attestées datent de 1571. Par la possible entremise de Robert Dudley, comte de Leicester et favori d’Elisabeth I, Hilliard aurait eu accès au patronage de la reine dès l’année suivante (portrait à la National Portrait Gallery, Londres).
Peu après son mariage avec Alice Brandon, fille de son maître, le 15 juillet 1576, Hilliard embarque pour la France : ce voyage est sans doute organisé puisqu’il apparaît sur les comptes de son hôte, François, duc d’Alençon, au 5 août de cette même année, avant même sa possible arrivée en France (Cachaud 2017, p. 32-34). Il est en effet possible qu’Hilliard soit arrivé en même temps que le nouvel ambassadeur, Sir Amias Paulet, en septembre 1576 ; il exécute le portrait de l'ambassadeur et de la reine d'Angleterre sur chêne français à Paris en 1578 (Auerbach 1961, p. 11-13, Cachaud 2017, p. 34-37, Bayliss et al. 2018). En France, il semble rapidement s’installer, dès les premiers mois de 1577, dans l’atelier de Joris van der Straeten, peintre de Louise de Lorraine, reine de France (Grodecki 1986, p. 165, Cachaud 2017, p. 36-37, Goldring 2019, p. 142-148) avant de s’installer indépendamment quelques rues plus loin, ce qui était alors illégal (Bimbenet-Privat 1991, p. 504 ; Cachaud 2017, p. 73-108 ; Cachaud 2019 ; Goldring 2019, p. 166-167). En 1577, il est également intégré dans la suite du duc d'Alençon ; ainsi il est possible qu'il ait voyagé à La Fère où il aurait produit des médailles avec le portrait du duc (Cachaud 2017, p. 50-51, Aslet et al. 2019, p. 109). Plusieurs portraits témoignent de sa présence à Paris, à commencer par ceux du duc d’Alençon, dont l’exemple le plus authentique est celui conservé à Vienne ; celui de son frère le roi Henri III (coll. Djanogly), récemment découvert, mais aussi un portrait dit de Marguerite de Valois (coll. privée), des gravures sur bois du duc et de la duchesse de Nevers (Paris, BnF, daté 1578). A celle-ci s’ajoute une production plus privée incluant son propre autoportrait, le portrait de son père, tous deux datés 1577, et celui de son épouse Alice en 1578, tous conservés au Victoria & Albert Museum. Hilliard rentre au plus tard après le 16 novembre 1578, date de la visite des gardes de l’Orfèvrerie de la corporation parisienne à son atelier (Ibid) et avant le printemps 1579, possiblement avec Jean de Simiers, le 3 janvier 1579 (Cachaud 2017, p. 108). Sa présence en France a été capitale pour le développement de la miniature en tant qu’art indépendant en France. De nombreuses miniatures ont d’ailleurs été produites par des artistes français au moment de sa présence à Paris.
De retour en Angleterre, Nicholas Hilliard poursuite une carrière entre la cour, où il reçoit de nombreuses commandes mais semble peu rétribué, en particulier par la reine, qui ne lui offrira une pension qu’à partir de 1599, et sa clientèle citadine. Père de sept enfants, il est contraint de diversifier ses activités afin de pouvoir s’en sortir financièrement. Les sources d’archives le montrent souvent en manque d’argent (Auerbach 1961, p. 16-18 ; Goldring 2019, p. 201-205). Recevant un grand nombre de commandes, il prend ainsi de nombreux apprentis à son service : John Cobbold en 1570, Gualter Reynolds en 1571, William Smythe en 1573, William Franke en 1573, John Pickrynge en 1575, Rowland Lockey en 1581, le huguenot rouennais Isaac Olivier (1565-1617) à cette même période et enfin son propre fils, Laurence, vers 1597 (cf. Hearn 2005, p. 11 ; Goldring 2019, p. 178-181). Olivier étant son meilleur élève, il l’éclipse rapidement alors que Hilliard vieillit. Ainsi, sous le règne de Jacques Ier (r. 1603-1625), bien que Nicholas Hilliard demeure le miniaturiste en titre du roi, Olivier est celui qui reçoit le plus de commande et est engagé au service de la reine Anne du Danemark et de ses enfants (Auerbach 1961, p. 38-42 ; Strong 1983, p. 88-92). De plus en plus pauvre, Il laisse son atelier de Gutter Lane à son fils en 1613, devenu maître en 1605, et s’installe vers Westminster. Il aurait également été emprisonné pour dette à Ludgate pendant cette période. Le jour de Noël 1618, il fait rédiger son testament : il est alors âgé de plus de 70 ans. Il est enterré à Saint-Martin-in-the-Field à Londres le 7 janvier 1619 (Auerbach 1961, p. 42 ; Hearn 2005, p. 18 ; Goldring 2019, p. 276-277).
Reconnu par les poètes et contemporains comme un artiste de très grand talent, Erna Auerbach écrit en 1961 : « Apart from his artistic talents, he certainly had a forceful personality, buoyant and full of esprit, generous to his friends, and never embittered by the adversity of fate […] always ready to learn and to embark in new adventures of human invention and skill » (Ibid, p. 42). Sa technique est facilement reconnaissable par son style libre et enlevé, sa maîtrise du pinceau, son attention aux détails et à sa volonté d’idéalisation de ses modèles, ainsi que par son inventivité à partir des techniques d’orfèvrerie (Londres 2019, p. 20-29). Outre près de 300 œuvres qui lui sont attribuées, principalement des miniatures mais aussi des peintures, des estampes, des dessins, etc., il laisse un traité à la postérité, publié pour la première fois dans le Volume of the Walpole Society en 1912, et depuis maintes fois étudié comme un des grands traités de l’art du XVIe siècle en Angleterre (Auerbach 1961, p. 198-223 ; Strong 1983, p. 28-32 ; Londres 2019, p. 216-217, cat n°91). Gentilhomme selon son testament, courtisan et affable mais peu économe, il a eu soin de représenter la cour élisabéthaine ainsi que celle des Valois tout au long de sa longue carrière.
Cachaud 2019