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Lefèvre, Camille

Statut
Publiée
Contributeur
Dartiguenave, Elisabeth
Dernière modification
12/01/2024 13:32 (il y a 11 mois)
Type de personne
Type de personne : 
Noms
Nom : 
Lefèvre
Prénom : 
Camille
Sexe : 
Nationalité : 
Naissance et mort
Date de naissance : 
31 décembre 1853
Lieu de naissance : 
Date de mort : 
23 mai 1933
Lieu de mort : 
Professions / activités
Type de profession / activité : 
Biographie
Commentaire biographique : 

Camille Lefèvre (1853-1933) manifeste très tôt un goût pour le dessin et la peinture. Après un apprentissage chez un sculpteur sur bois, il s’installe à Paris à dix-sept ans pour suivre l’enseignement de l’École des Arts décoratifs. En 1872, il entre à l’École des beaux-arts dans l’atelier des sculpteurs Pierre-Jules Cavelier (1814-1894) et Aimé Millet (1819-1891). Il y reçoit une formation classique dominée par l’exemple de l’Antiquité et du néoclassicisme. Les diplômes conservés au musée d’Art et d’Histoire de Belfort (MAHB, n.c.) indiquent qu’il remporte deux fois, avec ces professeurs, le Second grand prix de sculpture (1877 et 1878), ainsi que la Grande médaille d’émulation de l’École des beaux-arts (1877), mais pas le Grand prix de Rome, seule reconnaissance assurant les commandes. Il est récompensé d’une médaille de 3e classe dans la section de sculpture lors du Salon de 1884 (MAHB, n.c.), d’une médaille de 2e classe dans cette même section en 1888 (Catalogue général officiel de l’Exposition universelle de 1889,1889, p. 86) et d’une médaille d’argent dans la section de sculpture de l’exposition universelle de 1889 (MAHB, n.c.). Il est cité dans un diplôme de 1884 en qualité de professeur à l’École de dessin et de modelage de la chambre syndicale de la bijouterie à Paris, puis en 1908 comme professeur de l’École des Arts décoratifs (MAHB, n.c.).

Parallèlement, sa production révèle qu’il recherche les grandes commandes, qu’elles soient publiques ou privées, et qu’il participe aux concours ouverts par les municipalités pour l’érection de monuments commémoratifs (Guibert C., 2003). La Troisième République poursuit les grands travaux d’urbanisation lancés sous le Second Empire et les bâtiments publics se couvrent de sculptures, offrant aux statuaires des chantiers innombrables. Camille Lefèvre réalise ainsi deux statues pour le monument aux victimes du siège de Paris de 1871 (1879), le fronton du siège central du Crédit Lyonnais (1881), la statue du Gué achetée par la Mairie de Paris (grand succès au Salon de 1884) ou encore le décor des façades des mairies d’Ivry-sur-Seine et d’Issy-les-Moulineaux (1896).

Portraits d’amis

L’amitié et l’appui d’Eugène Carrière (1849-1906), dont l’œuvre peint se rapproche par de nombreux aspects de l’œuvre de Lefèvre (Guibert C., 2003, p. 19-21), lui permettent peut-être d’attirer l’attention des commanditaires publics. Le soutien de Rodin (1840-1917) est également assuré : si rien, dans les archives du musée Rodin, ne confirme que Lefèvre aurait été salarié par Rodin comme praticien, contrairement à ce qu’écrit Guibert Caroline (2003), la correspondance reçue par le maître montre que ce dernier soutient Lefèvre dans de nombreuses démarches, qu’il s’agisse de fournir des œuvres lors des tombolas de soutien à l’Orphelinat des arts de Mme Lefèvre à Sant-Ay (Loiret) ou d’aider Camille Lefèvre à obtenir des commandes de l’État (MR, dossier LEF 3745) ou une médaille (MR, dossier Fagel).

Les amis et la famille se prêtent souvent au jeu du portrait, la période mettant à l’honneur cette pratique : Lefèvre réalise ainsi ceux de Jules Lermina (bronze, CLS. 54), Marie Howet (bronze, CLS. 55) ou Lisbeth Carrière (pierre, CLS. 44), tout en honorant les commandes de particuliers en plâtre, bronze ou pierre (Guibert C., 2003, p. 22-24). Héritier de l’éclectisme qui domine toute la seconde moitié du XIXe siècle, Camille Lefèvre ne se limite pas à un style caractérisé et sait varier les types, du profil en bas-relief au buste en ronde-bosse, dans un style réaliste et robuste empreint d’humanité et de sensibilité.

L’Art nouveau au cœur des principes décoratifs

Dans le domaine des arts décoratifs, l’œuvre de Camille Lefèvre porte la marque du style Art nouveau, où figures et ornements sont dominés par une ligne souple et décorative. Il est significatif, comme le souligne Nicolas Surlapierre (2014) au sujet du Sculpteur de la façade principale de la mairie d’Ivry (in situ ; modèle en plâtre à Belfort : CLS. 101) que Lefèvre choisisse l’image d’un artiste travaillant un décor floral pour figurer l’allégorie de son métier. Avec les partisans de l’Art nouveau, il est attaché à l’idée de l’art dans tout, et il participe à la réhabilitation de l’objet domestique qui ennoblit le décor intime de la vie. La collection qu’il donne au musée d’Art et d’Histoire de Belfort inclut de nombreux modèles de vaisselle, vases, mobilier, cheminée, montrant jusqu’à la fin son attachement aux arts décoratifs et son goût pour le décloisonnement des genres.

Par ailleurs, la sculpture décorative occupe une place très importante dans la carrière de Lefèvre au tournant du XXe siècle. La collection d’esquisses donnée par Camille Lefèvre au musée d’Art et d’Histoire de Belfort traduit l’intérêt nourri par l’artiste pour les motifs floraux, appliqués à des modèles de consoles ou de carreaux de céramique. Sans que la participation de Lefèvre soit claire, il semble participer à la décoration de la vitrine de la boutique de Siegfried Bing (1838-1905), située rue de Provence à Paris (Guibert C., 2003, p. 110) ; plus certaine en revanche, sa contribution aux décors de façade de divers immeubles parisiens (50, rue du Rocher, 8e arrondissement ; 15-21, boulevard Lannes ; 12, rue Puvis-de-Chavannes, 17e arrondissement), dont certains modèles sont conservés au musée d’Art et d’Histoire de Belfort, témoigne de sa capacité à adapter les motifs naturels à l’architecture des immeubles.

Un artiste consacré puis… oublié

L’Exposition universelle de 1900 marque une étape majeure dans sa double carrière de sculpteur et décorateur. Les archives du musée de Belfort gardent la trace des nombreux diplômes qui lui sont décernés : médaillé d’argent en tant que représentant de la chambre syndicale de la bijouterie dans la catégorie « Enseignement spécial industriel et commercial », membre du comité d’admission en « Joaillerie et bijouterie », médaille d’or en « Sculpture et gravure en médaille », Grand prix en « Décoration fixe des édifices publics et des habitations » avec la maison Poussielgue-Rusand, médaille d’or en « Céramique » avec la maison Alfred Hache. La Légion d’honneur lui est accordée en 1901 (MAHB, n.c.) et il obtient également une certaine reconnaissance internationale : reconnu comme partenaire par la Société des artistes hongrois en 1901, récompensé d’une médaille d’argent à l’Exposition franco-anglaise de 1908 (MAHB, n.c.). Il est professeur à l’École nationale des Arts décoratifs à partir de 1903, possède son propre atelier de 1910 à 1918 et fait partie des membres fondateurs du Salon d’Automne en 1903, dont il est vice-président jusqu’à sa mort (Guibert C, 2003, p. 58-59). Cela marque un apogée dans sa carrière. Il devient une figure importante du paysage institutionnel, mais sa création se tarit progressivement. Il réalise, grâce à sa collaboration avec l’architecte Adolphe Dervaux (1871-1945), la décoration des gares de Biarritz (1907) et de Rouen (1928), ainsi que plusieurs monuments funéraires (Vaucresson, Saint-Ay et le monument Rouché, par exemple) et décors d’intérieurs.

Si le choix de certains thèmes liés au monde ouvrier (Débardeur invectivant, crayon sur papier, CLD. 29) ou au monde de la rue (Dans la rue, œuvre détruite), ainsi que certaines tentatives d’accorder la primauté à une approche sensible, notamment dans Le Remords (plâtre, CLS. 41), le rapprochent de l’œuvre réaliste d’Aimé Jules Dalou (1838-1902), la facture reste classique, douce et tendre, et ne se libère jamais totalement de l’enseignement reçu. Marqué par le réalisme, Lefèvre remporte quelques succès grâce à plusieurs réalisations (Le Bonheur, marbre, thermes d’Aix-les-Bains) qui demeurent sans lendemain. Certains commentateurs parlent ainsi d’un artiste « tiraillé entre son éducation classique et les recherches les plus modernes auxquelles sa volonté plus peut-être que son tempérament l’a conduit » (Vitry P., 1910, p. 64). Quoique toujours membre du Salon d’Automne, son aura décline fortement, il n’est plus que très rarement cité dans les comptes rendus de Salons postérieurs à la Grande Guerre, il meurt en 1933 dans une sorte d’indifférence (Guibert C., 2003).

Article rédigé par Marc Verdure

Commentaire biographique : 

Camille Lefèvre (1853–1933) showed an early talent for and interest in drawing and painting. After his apprenticeship with a woodcarver, he moved to Paris at the age of seventeen where he attended courses at the École des Arts Décoratifs. In 1872, he enrolled at the École des Beaux-Arts in the studio run by the sculptors Pierre-Jules Cavelier (1814–1894) and Aimé Millet (1819–1891). Here, he received a classical training inspired by antiquity and neoclassicism. The diplomas held in the Musée d’Art et d’Histoire in Belfort (MAHB, unknown) indicate that, under these teachers’ guidance and tutelage, he won the Second Grand Prix de Sculpture twice (1877 and 1878), as well as the Grande Médaille d’Émulation awarded by the École des Beaux-Arts (1877), but not the Grand Prix de Rome, the only recognition that could ensure commissions. He was awarded a third-class medal in the sculpture section at the 1994 Salon (MAHB, unknown), a second-class medal in the same section in 1888 (Catalogue Général Officiel de l’Exposition Universelle de 1889,1889, p. 86), and a silver medal in the sculpture section at the 1889 Exposition Universelle (MAHB, unknown). He is cited in a diploma dating to 1884 as a being a professor at the École de Dessin et de Modelage de la Chambre Syndicale de la Bijouterie in Paris, then in 1908 as professor at the École des Arts Décoratifs (MAHB, unknown).

At the same time, his works show that he sought major commissions—whether public or private—, and that he took part in contests to erect commemorative monuments that were run by municipalities (Guibert, C., 2003). The Third Republic pursued the major urbanisation work launched during the Second Empire and public buildings were adorned with sculptures, providing statue sculptors with numerous projects. Hence, Camille Lefèvre created two statues for the monument dedicated to the victims of the 1871 Siege of Paris (1879), the fronton of the headquarters of the Crédit Lyonnais (1881), the Guéstatue (a great success at the 1884 Salon) bought by the Mairie of Paris, and the decorative elements on the façades of the mairies of Ivry-sur-Seine and Issy-les-Moulineaux (1896).

Portraits of friends

The friendship and support of Eugène Carrière (1849–1906), whose paintings are similar in many ways to the work of Lefèvre (Guibert, C., 2003, pp. 19–21), enabled him perhaps to attract the attention of public patrons. He also benefited from the support of Rodin (1840–1917): although nothing in the Musée Rodin archives confirms that Lefèvre was employed by Rodin as a practician, in contrast with the claims made by Guibert Caroline (2003), the correspondence the master received shows that the latter supported Lefèvre in many endeavours, whether it involved providing works for the raffles at Madame Lefvre’s Orphelinat des Arts in Sant-Ay (Loiret) or backing Camille Lefèvre’s attempts to obtain commissions from the French State (MR, file: LEF 3745) or a medal (MR, file: Fagel).

His friends and family often posed for portraits, a practice that was very common at the time: hence, Lefèvre created the portraits of Jules Lermina (bronze, CLS. 54), Marie Howet (bronze, CLS. 55), and Lisbeth Carrière (stone, CLS. 44), while executing commissions from private individuals in plaster, bronze, and stone (Guibert, C., 2003, pp. 22–24). An heir to the eclecticism that predominated throughout the second half of the nineteenth century, Camille Lefèvre did not restrict himself to a particular style and adopted a variety of approaches, ranging from bas-reliefprofiles to busts en ronde-bosse, in a realistic and vigorous style imbued with humanity and sensitivity.

Art Nouveau at the core of his decorative principles

In the field of the decorative arts, Camille Lefèvre’s oeuvre is typically Art Nouveau in style, in which figures and ornamentation are dominated by supple and decorative lines. It is significant, as pointed out by Nicolas Surlapierre (2014) with regard to the Sculpteur of the main façade of the Mairie of Ivry (in situ; plaster model in Belfort: CLS. 101) that Lefèvre selected the image of an artist working on floral decorations to represent an allegory of his métier. In line with the partisans of Art Nouveau, he was very interested in the idea of art in everything, and contributed to the rehabilitation of domestic objects that enriched the intimate decorations of everyday life. The collection he donated to the Musée d’Art et d’Histoire de Belfort includes many models of crockery, vases, furniture, and fireplaces, demonstrating that right to the end he had a passion for the decorative arts and a taste for the decompartmentalisation of genres.

In fact, decorative sculpture played a very important role in Lefèvre’s career at the turn of the twentieth century. The collection of sketches donated by Camille Lefèvre to the Musée d’Art et d’Histoire de Belfort reflected the artist’s interest in floral motifs, applied to models of consoles and ceramic tiles. Although Lefèvre’s role is unclear, he seemed to participate in the decoration of the shop window of Siegfried Bing (1838–1905), located on the Rue de Provence in Paris (Guibert, C., 2003, p. 110); more certain, however, was his contribution to decorating the façades of various Parisian buildings (50, Rue du Rocher, in the 8th arrondissement; 15–21, Boulevard Lannes; and 12, Rue Puvis-de-Chavannes, in the 17th arrondissement), of which certain models held in the Musée d’Art et d’Histoire de Belfort attest to his ability to adapt natural motifs to the architecture of buildings.

A consecrated … then forgotten artist

The 1900 Exposition Universelle marked a major step in his dual career as a sculptor and decorator. The Musée de Belfort archives provide a record of the many diplomas he was awarded: a silver medal as a representative of the Chambre Syndicale de la Bijouterie in the category ‘Enseignement spécial industriel et commercial’; a member of the admissions committee for ‘Joaillerie et bijouterie’; a gold medal in ‘Medal sculpture and engraving’; a Grand Prix for ‘Décoration fixe des édifices publics et des habitations’ for the Maison Poussielgue-Rusand; and a gold medal in ‘Céramique’ for the Maison Alfred Hache. He was awarded a Légion d’Honneur in 1901 (MAHB, unknown), and he also achieved a certain international recognition: he was acknowledged as a partner by the Société des Artists Hongrois in 1901, and awarded a silver medal at the 1908 Exposition Franco-Anglaise (MAHB, unknown). He was a professor at the École Nationale des Arts Décoratifs as of 1903, had his own studio between 1910 and 1918, and was one of the founding members of the Salon d’Automne in 1903, of which he was Vice-President until his death (Guibert, C, 2003, pp. 58–59). This marked the high point in his career. He became a major figure of the institutional landscape, but his creative work gradually subsided. Thanks to his collaboration with the architect Adolphe Dervaux (1871–1945), he decorated the railway stations of Biarritz (1907) and Rouen (1928), along with various funeral monuments (Vaucresson, Saint-Ay, and the Rouché monument, for example), and created interior decorations.

While the choice of certain themes linked to the world of labour (Débardeur invectivant, pencil on paper, CLD. 29) and street scenes (Dans la Rue, work destroyed), as well as certain attempts to prioritise a sensitive approach, in particular, in Le Remords (plaster, CLS. 41), which can be likened to the realistic work by Aimé Jules Dalou (1838–1902), the facture remained classical: soft and tender, and never really freeing itself from his initial training. Influenced by realism, Lefèvre achieved some success thanks to several works (Le Bonheur, marble, thermal baths of Aix-les-Bains), which were subsequently forgotten. Hence, certain commentators referred to an artist ‘torn between his classical education and the most modern of approaches that his will rather than his temperament led him to explore’ (Vitry, P., 1910, p. 64). Although he was still a member of the Salon d’Automne, his fame rapidly declined, and he only rarely featured in the Salon’s reports after the Great War; and his death in 1933 was treated with indifference (Guibert, C., 2003).

Article by Marc Verdure (Translated by Jonathan & David Michaelson)

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Lefèvre semble participer à la décoration de la vitrine de la boutique de Siegfried Bing (1838-1905) située rue de Provence à Paris (Source : notice Agorha "Camille Lefèvre" rédigée par Marc Verdure)
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En 1872, il entre à l’École des Beaux-arts dans l’atelier des sculpteurs Pierre-Jules Cavelier (1814-1894) et Aimé Millet (1819-1891). (Source : notice Agorha "Camille Lefèvre" rédigée par Marc Verdure)

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En 1872, il entre à l’École des Beaux-arts dans l’atelier des sculpteurs Pierre-Jules Cavelier (1814-1894) et Aimé Millet (1819-1891). (Source : notice Agorha "Camille Lefèvre" rédigée par Marc Verdure)

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Sources en ligne
Référence de notice : 
00116923
Date de consultation : 
20/02/2009
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ressource accessible sur abonnement

Source
Institut national d'histoire de l'art (France)
Licence
Attribution 4.0 International (CC BY 4.0)
Rédacteur
Marc Verdure