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17/02/2022 Répertoire des acteurs du marché de l'art en France sous l'Occupation, 1940-1945, RAMA (FR)

Marchande d'art à Munich, Maria Gillhausen effectua des acquisitions dans la France occupée en profitant de ses relations avec Adolf Wüster.

Une carrière de marchande d’art

Née en 1898 à Mülheim-an-der Mosel, Maria Gillhausen vivait depuis les années 1920 à Munich1. Elle travailla d’abord comme secrétaire pour la marchande d'art Anna Caspari (1900 - 1941) qui, parce que juive, sera ensuite déportée et assassinée par les nazis. À partir de 1931, Gillhausen pratiqua le commerce d'antiquités et d'objets d'art pour son propre compte. Elle ouvrit sa première boutique d'art sous son nom dans le pavillon de jardin du 38a de la Leopoldstrasse à Munich en mai 19412. Faute de documents conservés, il est impossible de donner plus d’informations quant au programme de la galerie et à ses expositions. Les ventes attestées montrent un éventail allant des maîtres anciens néerlandais et italiens jusqu’à l'expressionnisme allemand en passant par le XIXe siècle. Gillhausen réussissait particulièrement bien dans la vente des antiquités, avec un chiffre d'affaires annuel pour 1940 d'un million de Reichsmark3. Il faut sans doute en chercher les principales raisons dans les bonnes relations qu'elle entretenait avec les dirigeants nazis, comme l’indique un « jugement général » de la Reichskammer der bildenden Künste [chambre des beaux-arts du Reich ; RdbK] de 1942, qui qualifie Maria Gillhausen d’« aimable et très habile en affaires » et « très favorable au parti »4. C’est à elle que Maria Almas-Dietrich acheta la plupart des tableaux allemands du XIXe siècle qu'elle vendit à son tour à la « Mission spéciale Linz ». D’autres œuvres ayant appartenu à Gillhausen entrèrent également par l'intermédiaire de Gerdy Troost, Heinrich Hoffmann et Martin Bormann dans la collection prévue pour Linz5.

Acquisitions en France et liens avec Adolf Wüster

Selon le rapport final de l'ALIU, Maria Gillhausen était en contact d'affaires avec le marchand Walter Bornheim, qui travaillait pour Hermann Göring, ainsi qu'avec Ernst Buchner, directeur général des Bayerische Staatsgemäldesammlungen [collections de peintures de l'État de Bavière], et elle exerça à Paris des activités de marchande d’art et d’intermédiaire. Jusqu'à présent, il n'a pas été possible de déterminer plus précisément s’il y avait corrélation entre ses contacts et ses activités en France. On sait qu'elle y acheta plusieurs œuvres françaises du début du XXe siècle, notamment des tableaux de Pierre-Auguste Renoir et Claude Monet, Alfred Sisley et Édouard Vuillard, et qu’elle en conservait quelques-unes dans sa résidence du château de Thalhausen près de Freising. Mais parmi les œuvres provenant de France entreposées au château, certaines étaient destinées à Adolf Wüster. À la suite des demandes de restitution françaises, toutes ces pièces furent renvoyées en France par l’intermédiaire du Collecting Point de Munich1.

Maria Gillhausen était en contact étroit avec Adolf Wüster qui, à la fin de la guerre, indiquait comme adresse dans sa correspondance avec les autorités d'occupation le pavillon de jardin du 38 de la Leopoldstraße, là où se trouvait la galerie de Gillhausen2. C'est probablement grâce à ses relations avec Wüster que Gillhausen put profiter de transports groupés destinés aux musées rhénans pour acheminer en Allemagne des œuvres qu’elle avait achetées à Paris. Les différentes correspondances à ce sujet sont conservées dans les archives des musées de Düsseldorf et de Krefeld, dont les directeurs collaboraient étroitement avec Adolf Wüster pour leurs acquisitions en France3.

Sur sa demande, Gillhausen obtint le 27 septembre 1947 du gouvernement de Haute-Bavière l’autorisation d’exercer à nouveau son activité de commerce de l’art4. Quelques mois plus tard, le 14 mai 1948, elle décédait à Francfort-sur-le-Main. La galerie Gillhausen exista jusqu'au 28 mai 19505.