Plusieurs motifs trouvent leur origine dans les gravures italiennes antérieures :
- la servante agenouillée sur la gauche dérive d'une gravure de Gian Giacomo Caraglio d'après Rosso Fiorentino représentant le Défi des Piérides
- l'Amour brandissant le vase dérive d'une gravure du Maître B au dé d'après un panneau ornemental de Perino del Vaga
Comme l'ont souligné Sterling et Adhémar (1965) le ton général dérive de la culture raphaélesque élaborée à Rome dans le premier tiers du XVIe siècle, et en particulier de la suite gravée de l'Histoire de Psyché.
L'iconographie de la scène est ambigüe : cette toilette de Vénus pourrait montrer Vénus soit en compagnie d'une servante et de son fils Cupidon, soit, moins probablement, recevant de l'Amour et en présence de Psyché agenouillée le vase contenant la beauté de Proserpine. C'est en tout cas la version mythologique du motif de la dame à sa toilette que la peinture française du XVIe siècle, suivant l'invention de François Clouet, développe parallèlement de manière très originale comme une sorte de scène de genre.
Au milieu Vénus nue est assise de face sur le bord d’une baignoire de pierre ovale (on en voit une identique chez Luca Penni, Mars assistant au bain de Vénus, dessin, Louvre AG Inv. 1396) ; elle tient de la main gauche un miroir doré dans lequel elle se regarde et de la main droite dispose sur sa tête un voile transparent très fin ; à droite un Amour nu ailé lui tend un flacon de senteur doré (reconnaissable à son bouchon perforé). Il porte son carquois décoré en sautoir tandis que son arc et une flèche sont à ses pieds. Entre Vénus et l’Amour, une aiguière d’argent « à l’antique » décorée d’une ronde de satyres ciselés et dorés. Sur la gauche une suivante nue est accroupie sur un coussin, pieds croisés, et tient encore le linge blanc qui est sur le rebord de la baignoire et dont elle a essuyé Vénus. Le fond est occupé par une lourde draperie vert sombre à galon d’or relevée symétriquement « en bonne grâce » et formant un pavillon (Bimbenet-Privat, 2009).
Les deux figures féminines ont des coiffures sophistiquées composées de tresses maintenues par un touret orné de perles.
Les bijoux et pièces d’orfèvrerie ont été détaillées par M. Bimbenet-Privat (2009) : bijou frontal de Vénus en forme de médaillon à cabochon de rubis orné d’une perle descendant au ras du front ; vase de senteur à la manière anglaise, grande aiguière à l’antique.
Le motif principal peut être mis en rapport avec la Toilette de Vénus, dessin du Fogg Art Museum, Harvard University, Cambridge (Mss.), considéré comme School of Fontainebleau, exposé n° 24 dans « French Art of the Sixteenth Century », Cummer Gallery of Art, Jacksonville, Florida, 27 juin – 30 septembre 1964. Ce dessin, sans doute une copie, pourrait être un autre reflet de la composition de Rosso à l'une des extrémités de la Galerie François Ier. Il semble plutôt une copie d’après Luca Penni, mais on y trouve en tout cas le même geste et la même attitude de Vénus.
Bois transposé sur toile à une date inconnue.
Bois transposé sur toile. Il est difficile de compter le nombre des planches horizontales composant le support d'origine : au moins trois (C. Scailliérez, 2023).
Mailly
Probable indication de provenance car elle s'accorde avec l'ex-libris portant les armes et la devise de la famille Mailly collé aussi au revers de la toile : d'or à trois maillets de sinople, surmonté d'un buste de cerf dressé sur une couronne alternativement fleuronnée et fleurdelysée, dessous la devise HONGNE QUI VONRA et encore en dessous l'inscription Mailly.
Duchartre, 1922 ; Sterling-Adhémar, 1965 ; Compin-Roquebert, 1986, IV, p. 293 ; Scailliérez, cat.exp Bicentenaire du Musée du Louvre, Tokyo, 1993, n°53
Sylvie Béguin (1989, p. 830) a émis l’hypothèse intéressante que le tableau de la Toilette de Vénus du Louvre pouvait en partie refléter une des compositions des extrémités de la Galerie François Ier, celle que Vasari décrit, après Bacchus et Vénus comme Vénus et l’Amour , mais qui pourrait aussi avoir été une Toilette de Psyché .
Cette hypothèse de Sylvie béguin est intéressante dans la perspective d’une attribution au Maître de la Charité du Louvre, qui travaille volontiers en interprétant des sources formelles italiennes présentes à Fontainebleau, matériel d’artistes (estampes et dessins), collections royales et décors du château (Scailliérez 2023).
Hypothèse avancée par C. Scailliérez (2023).
L'identité exacte du membre de la famille de Mailly ( attestée par les indications du revers de la toile: voir chapitre Matérialité/ inscriptions ci-dessus) n'est pas encore trouvée.
Don au musée du Louvre, 1891.
n° 1014 A (Attribué à Nicolo dell' Abate).
p. 110 : « Parmi les quelques tableaux authentiques de l’Ecole de Fontainebleau, c’est le seul où nous reconnaissons une influence directe de Rosso ; la servante accroupie représentée sur ce tableau est semblable au personnage de droite [gauche] et de premier plan du Défi des Pièrides ».
reproduit en première page mais non commenté