[1874, peinture, rapport Institut procès-verbal]Rapport sur les envois de peinture de 1874TYPE : rap [...]

[p. 284] L'Académie s'en référant d'ailleurs à M. le Directeur de l'Académie de France à Rome pour les excuses qu'il pourrait juger valables, se voit à regret dans la nécessité d'infliger un blâme à l'un des pensionnaires peintres, M. Toudouze, qui a failli à ses obligations réglementaires en ne faisant pas les envois exigés. Elle espère que dorénavant tous les pensionnaires seront exacts à remplir les engagements que le titre qu'ils portent leur impose, et que leurs travaux, commencés à temps, seront prêts pour l'époque fixée par le règlement. M. Ferrier (1e année). M. Ferrier qui s'est strictement conformé à toutes les prescriptions de ce règlement, a droit à des félicitations pour son tableau représentant Ganymède enlevé par l'aigle. La composition de cet ouvrage est heureuse, le dessin en est généralement élégant, la couleur agréable et vraie, l'agencement pittoresque. / Le règlement exige de tout pensionnaire de première année l'envoi de deux dessins : l'un d'après l'antique, l'autre d'après un maître. M. Ferrier a obéi à la lettre du règlement, mais il ne semble pas en avoir bien saisi l'esprit. Son dessin sur fond rouge [p. 285] reproduisant la Vénus accroupie, est d'un fini qui ferait présumer chez l'artiste une préoccupation exagérée des détails au détriment du caractère général. Son dessin d'après Raphaël est si peu satisfaisant qu'on pourrait croire qu'il n'a pas été exécuté directement d'après l'original. Ces deux dessins ne sont point ce qu'ils auraient du être, de véritables études au moyen desquelles un jeune artiste s'exerce et s'élève à l'intelligence de l'art antique et de l'art des grands maîtres, à la perception intime des beautés que recèlent les chefs-d'oeuvre. Ceci soit dit d'ailleurs moins comme un reproche à l'adresse de M. Ferrier, si digne à d'autres égards d'encouragements, que comme un avis dont pourront en général profiter les pensionnaires auxquels le règlement impose ces deux études dessinées. M. Lematte (3e année). L'Académie loue le choix du sujet traité par M. Lematte pour l'esquisse dont il devait l'envoi : les Vestales quittant Rome et la composition ingénieuse de cette scène. Il est regrettable toutefois que le ton des figures manque de solidité dans les ombres, et que certains sacrifices à la recherche de l'agrément pittoresque aient pour résultat d'enjoliver un peu trop l'aspect de la scène ; de compromettre la gravité nécessaire en pareil cas, du style. / La copie exécutée par M. Lematte d'après Raphaël, manque d'entrain et de force. On ne saurait accuser l'artiste de l'avoir peinte avec négligence, mais on doit regretter qu'il n'ait pas mieux réussi à s'assimiler les qualités de son modèle. M. Merson (4e année). Le tableau que M. Merson a envoyé et qu'il intitule Patrie n'est point encore achevé. L'Académie en loue volontiers la pensée première et l'ordonnance générale, mais elle exhorte vivement M. Merson, quand il reprendra son oeuvre pour la terminer, à se mettre en garde contre les tendances qui semblent aujourd'hui l'entraîner à l'imitation de pratiques exubérantes ou conventionnelles des maîtres de second ordre, qu'il consulte directement et plus ingénument la nature, qu'il s'inspire des monuments de l'art antique et des oeuvres des maîtres souverains, de préférence aux modèles qu'il choisit imprudemment aujourd'hui. / M. Merson, par ses envois précédents, et, notamment par l'esquisse qu'il avait exposé l'année dernière, a donné à l'Académie le droit d'attendre beaucoup de lui. Elle a la confiance qu'il achèvera de justifier ses espérances, et que, en réformant à quelques égards sa manière, il mettra d'autant mieux en relief les mérites qui lui appartiennent et les dons naturels [p. 286] qu'il a reçu.