Julien Pillois, lieutenant des habitants en 1592
L’identité du modèle est uniquement attestée par l’inscription du cartel : « JULIEN PILLOIS, / LIEUT DES HABTS en 1592 ». Le panneau faisait autrefois partie de la collection de Louis Bidet, lieutenant des eaux et forêts qui possédait également le portrait de Raoul Copillon (Reims, musée des Beaux-Arts, inv. 836.10.1), Julien Pillois occupe plusieurs charges importantes, dont celle de conseiller à la cour des aides, receveur des tailles en 1592 ou encore lieutenant des habitants de Reims en 1592-1593 (Almanach de Reims, 1776). Il porte également le titre de seigneur de la Metz, près d'Attigny. Il est resté dans les mémoires pour avoir trahi la ville en 1594 à Saint-Paul, maréchal de la Ligue, qu’il soutenait et par lequel il avait été dupé pour faire entrer des garnisons dans Reims (une chanson de l’époque avait pour jeu de mot “Et toi qui Pillois / Tandis qu’on mouroit”, Loriquet 1881). Il est poursuivi en justice pour trahison mais n’est soumis à aucune sanction. Il meurt en 1601 mais nous ignorons sa date de naissance, jetant un doute sur l’identité du modèle. Les informations qui le concernent nous proviennent majoritairement de M. Henry, qui a écrit sur l’histoire de la Ligue à Reims.
Daté de 1598, le portrait est donc réalisé après ces troubles politiques et religieux. Ce n’est peut-être pas un hasard de voir Pillois représenté fixant le spectateur, avec la main droite sous le manteau et sur le cœur, qui ne fait pas partie des habitudes iconographiques du portrait français. Généralement interprété comme un signe de sincérité, de fidélité, de bonté ou encore de déférence, ce geste est probablement à comprendre dans le contexte des événements de 1594. Il est aussi possible d’y voir la manifestation d’un serment. Vêtu d’un pourpoint noir duquel se détache une manche de chemise blanche et une collerette de la même couleur, il est drapé d’un manteau noir, le tout se détachant sur un fond brun. La fraise présente un beau volume, tout comme le visage, contrastant avec le reste du corps et des vêtements esquissés plus sommairement. Une attribution à Georges Boba est proposée pour la première fois par Max Sutaine, une hypothèse reprise par Charles Loriquet. Louis Dimier a rejeté cette attribution, suivi par Marguerite Sartor, qui préfère y voir avec prudence un tableau de l’école rémoise de la seconde moitié du XVIe siècle (on peut en effet lui supposer une provenance locale, attestée dès le XVIIe siècle). Le rapprochement avec le portrait anciennement dit de Clicquot est pourtant suggestif dans le traitement vif des chairs et des coloris, ainsi que des morphologies un peu "brutes". A défaut d'y voir une œuvre de Boba lui-même, il s'agit peut-être d'une production d'atelier.
ÆTATIS. SVÆ. 41
BOBA (GEORGES) / REIMS XVIE Siècle
sans doute écrit par Loriquet
Collection Aubin-Louis Hédouin de Pons-Ludon ; acquisition en 1851.
n° 628