Le Christ en croix entre la Vierge et saint Jean Evangéliste avec la Madeleine agneouillée
Le Christ en croix entre la Vierge et saint Jean Evangéliste avec la Madeleine agneouillée.
Détrempe et or au pinceau sur vélin collée sur bois.
Le vélin étant fixé sur bois, il n’a pas été possible d’établir si son verso portait un texte, signe qu’il ne s’agirait pas d’un petit tableau mais d’un feuillet d’un manuscrit de dimensions exceptionnelles.
Présenté comme une œuvre de l’entourage de Noël Bellemare par Jörn Günther à Maastricht, TEFAF, mars 2017, et Paris, Grand Palais, Salon du livre rare et de l’objet d’art, avril 2017.
"Continuateur de Noël Bellemare: Louis Dubreuil? " :
"On peut suggérer une nouvelle identité pour ce peintre exceptionnel, actif vers 1543-1549, qui fit évoluer l’art de Bellemare vers celui de Cousin et fut employé par de hauts personnages du royaume (François II de Dinteville, évêque d’Auxerre, pour les Heures d’Henri II/Dinteville, le connétable Anne de Montmorency pour les Heures qui portent son nom). Son profil historique correspond en effet parfaitement à celui d’un maître-peintre parisien, Louis Dubreuil, que l’on suit dans les archives de 1531 à 1562-63 (Leproux, 2001, p. 176) et qui fut associé à Noël Bellemare au château de Fontainebleau, entre 1541 et 1550 (Laborde, 1877, I, p. 188-189, 190, 409) et à Jean Cousin le Père en 1549 pour l’exécution de cartons de tapisseries, sous forme de toiles peintes, sur la
Vie de saint Germain l’Auxerrois
(Roy, 1914, p. 4 ; 1929, I, p. 71 ; Nassieu-Maupas, 2013, p. 86-88.)
Giovacchino Ferroni, Florence et Rome ; sa vente après décès, Rome, Jandolo e Tavazzi, Galleria Sangiorgi, 14-22 avril 1909, n°477 (« Inconnu? Commencement du XVIe siècle ») ; probablement Edward Julius Berwind (1848-1936), New York et « The Elms », Newport, Rhode Island ; par héritage à sa s?ur Julia A. Berwind (décédée en mai 1961); sa vente après décès, Newport, Rhode Island, The Elms, organisée par Parke-Bernet Galleries, New York, 27-28 juin 1962, n°lot 180, repr. (acquis par un collectionneur new-yorkais); collection privée, New York ; Jörn Günther, Bâle, 2017.
p. 175-176, n°61 ( notice de Dominique Cordellier): composition dont les principaux motifs – le Christ, la Vierge, saint Jean mais aussi la représentation conventionnelle de Jérusalem comme une citadelle occidentale – sont issus du répertoire de Noël Bellemare. On retrouve ces motifs, réunis ou dissociés, dès 1530 environ, dans les
Heures d’Anne d’Autriche
, dans les Heures de la Morgan Library (M. 452,f° 75 v°), dans les Heures de la British Library ( Add. Ms 35318, f° 40 v°),puis, vers 1540-1545, dans les
Heures Wittert
de la bibliothèque universitaire de Liège (Ms. Wittert 29, f° 3) et plus tard encore, vers 1550, dans les
Heures de Claude de Guise
(BnF, Arsenal, Ms. 654, f° 98).
Par ailleurs, un autre motif, celui de la Madeleine embrassant le pied de la Croix, a une origine totalement différente puisqu’il appartient au répertoire d’un autre peintre enlumineur et cartonnier de vitraux et de tapisseries actif à Paris mais pleinement français, Jean Cousin le Père (documenté de 1526 à 1561). Cette Madeleine apparaît en effet dans deux verrières dont on attribue le carton à Cousin (à la cathédrale Saint-Maclou à Pontoise (datée 1545) et à la chapelle du château de Champigny-sur-Veude).
La façon dont le Calvaire intègre cette double culture – celle franco-flamande de Bellemare et celle, française et plus tardive, de Cousin – est comparable à ce que l’on observe dans deux chefs-d’œuvre du livre d’heures parisien des années 1543-1549 : les
Heures d’Anne de Montmorency
et les
Heures d’Henri II Dinteville
. Il faut également relever que les Heures d’Henri II Dinteville comptent une représentation de Daniel dans la fosse aux lions qui est certainement du même auteur que le Calvaire. La tête du saint Jean dans ce dernier est pratiquement identique à celle du prophète, jusque dans la façon de poser l’ombre sous le menton.