Jeanne d'Angennes (ap. 1538 - ap. 1578), dame de Saint-Bohaire puis baronne de Chambray et Theuray
Le modèle de ce portrait a été identifié avec plusieurs personnes :
- Jeanne d'Angennes, dame de Saint-Bohaire puis baronne de Chambray, depuis le XVIIIe siècle selon l'inscription au revers et l'inventaire de Charles Sauvageot (inventaire Sauzay 1861 ; dossier œuvre)
- puis à tort Madeleine de Gaignon (Brière 1924, Lemoisne 1925)
- et enfin Marie de Gaignon, dite « dame de Saint-Bohaire » (Sterling 1965), qui a erronément prévalu jusqu'à ce jour.
Un dessin montrant les traits du visage de cette dame et attribué à François Clouet (musée Condé, Chantilly, MN 157, Zvereva 2011) présente une inscription "Madame la gran Ste Boire". Ce nom est repris, mais avec une erreur, dans l'inscription apocryphe placée en partie haute de ce panneau, où on lit: "M. de S.t Boive". Le portrait représenterait donc la dame de Saint-Boire, dite aussi de "Saint-Bohaire". Nos recherches ont permis de conclure que Marie de Gaignon ne reçut pas ce titre. Elle fut appelée "Madamoiselle de Sainct-Boire la belle, despuis madame la Grand" [Brantôme, ed. 1868] ou "dame de Boisy". La seule raison pour laquelle Marie de Gaignon aurait pu être appelée dame de Saint-Bohaire aurait été l'abandon du domaine et du titre en sa faveur par l'héritier (communication écrite d'Etienne Pattou, 10 février 2022). Ceci ne fut pas le cas puisque le frère de Marie de Gaignon, Jean de Gaignon, est bien connu comme seigneur de Saint-Bohaire, comme le confirme l'inventaire du château, rédigé par Jehan Hardouyn à l'occasion de la mort du seigneur avant le 7 janvier 1574 (Archives départementales du Loir-et-Cher, 1/J/334). Cet inventaire précise que le seigneur avait pour épouse Jeanne d'Angennes.
Il est par conséquent possible de conclure que l'étiquette du revers est fiable et que l'identification traditionnelle est la bonne.
Peu d'informations sont connues au sujet de cette dame. Fille de Denis d'Angennes (m. 1552), seigneur de la Loupe, La Forte-Maison et Ruffly, et de Jacqueline de Silly, son épouse depuis 1538 (m. 1552), elle naquit donc entre 1538 et 1552. Jeanne d'Angennes eut trois frères : Claude, René et Jacques, et une sœur, Louise. Elle épousa Jean de Gaignon à une date inconnue, qui a sans doute été l'occasion de l'exécution de ce portrait. Les dates correspondent, puisque le modèle aurait posé pour ce portrait connu par le dessin au début de la décennie 1560 et représente une femme dans sa jeune vingtaine. Il n'est pas sûr que ce mariage ait porté fruit, en tout cas pas d'héritier mâle puisque l'inventaire du domaine cité précédemment est en la faveur de la veuve. Il est toutefois possible qu' une fille en soit née, Jeanne de Gaignon, connue comme "l'une des filles damoiselles de la Reine Mère du Roi", c'est-à-dire Catherine de Médicis, qui épousa Amblard de Chadieu en 1576 (Paris, Archives nationales, MC/ET/XXIV/56, 20 août 1576 ; Y//117, F. 378, 21 août 1576). Le 27 janvier 1578, Jeanne d'Angennes se remaria avec Gabriel de Chambray, baron de Chambray et Theuray. Jeanne d'Angennes mourut à une date inconnue. [Etude C. Cachaud mai 2022]
Arrière-plan repeint ; restaurations anciennes et vernis jaunis sur le visage, retouches sur le costume, surface picturale craquelée (observation 15 mars 2022).
avec cadre
Me de St Boive
Mme de St-Bohaire de la maison d’Angennes, numéro 2…
Identité erronée. « Bohaire » a été rectifié pour faire Boive et ajout d’une étiquette « 995 » sur le numéro.
Jeanne d’Angennes, fille de Denis d’Angennes, Seig.r de la Loupe / valet tranchant du Roy henry 2 en 1549. Mort en 1552. Et de Jacqueline de / [S]illy, Dame de Ste Cd[…] morte le 22 septembre 1552. Naquit vers l’an 1548. E- / pouse en 1° noces en 15.. Jean de Gaignon, Seig.r de St Bohaire, en […] / mort en 15.. et en 2° noces, le 27janvieer 1578 Gabriel baron de / Chambray, […] chevalier de l’ordre du Roy. Gentilhom- / me ordinaire de la chambre et capitaine de 50 hommes d’armes, mort / en 15.. Elle n’eut point d’enfants de son 1° mary, mais du second elle / eut postérité qui [sub]siste actuellement en Normandie.
Notice biographique datable du XVIIIe siècle. En partie supérieure, étiquette noircie.
L'œuvre ne semble pas avoir été attribuée anciennement au maître : elle est généralement considérée comme une copie d'après François Clouet par Dimier (1924-26) ou provenant de son atelier (Sterling & Adhémar 1965). En effet, la peinture reprend le dessin du musée Condé, précédemment cité, mais le tableau n'est pas de la même main. Les traits du visage sont assez bien repris, bien que moins aboutis. Le costume y est beaucoup plus schématique, avec notamment une chemise rapidement brossée à l'aide d'un pinceau large. La présence d'une erreur dans l'inscription suggère également que le portrait a été copié d'après le dessin sans véritablement comprendre l'identité du modèle, puisqu'il est écrit Boive et non Boire.
Une copie du XVIIIe siècle de ce portrait était conservée dans les collections de John Pierpont-Morgan en 1907. S'agit-il de la version appartenant à M. Granzener qui se trouvait chez le marchand Ferdinand Wortmann, Bâle en 1945 ? (Cf. documentation)
Si le dessin est datable autour de 1560-1565, il est possible que la peinture ait été produite a posteriori, à la fin du XVIe siècle, sans doute pour orner une galerie de portraits.
« École française ou flamande » selon l'étiquette au revers.
Sterling (1965)
Collection inconnue ; acquisition par Alexandre-Charles Sauvageot (1780-1860) en 1846 (livre d'entrée n° 2179 ; inventaire Sauvageot n° 995) ; donation au musée du Louvre, 1856.
p. 236 n° 995 (école des Clouet)
III p. 256 n° 34 (
II n° 523 (d'après François Clouet)