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Estampe d'Utamaro représentant une sauterelle posée sur un tuteur au milieu de fleurs roses et violettes.

POMPADOUR marquise de (FR)

Commentaire biographique

Jeanne-Antoinette Poisson, marquise de Pompadour et duchesse de Ménars près de Blois, dame de Saint-Ouen est née à Paris, le 29 décembre 1721. Elle reçut une éducation soignée grâce à la protection de l’ami de sa mère, le financier Le Normand de Tournehem, qui lui fit épouser le 9 mars 1741, son neveu, Charles-Guillaume Le Normand d’Étioles (1717-1799), chevalier d’honneur au présidial de Blois, puis fermier général, à qui elle donna un fils Charles-Guillaume (décédé dans sa première année en 1741) et une fille Alexandrine (1744-1754). Elle mit son ambition à devenir maîtresse de Louis XV (1710-1774). Elle eut d’abord un salon des plus brillants fréquenté par des financiers, artistes, écrivains, puis elle réussit à attirer sur elle l’attention du Roi. Le 23 avril 1745, elle fut installée dans l’ancien appartement de Madame de Mailly au château de Versailles et devint marquise de Pompadour. Elle joua alors un rôle déterminant à la cour. Le 8 février 1756, on la nomma dame du palais de la reine Marie Leszczyńska (1703-1768). Elle régna sans partage sur le roi et gouverna indirectement la France sous son nom, pendant dix-neuf ans, jusqu’à son décès à Versailles, le 15 avril 1764, âgée seulement de quarante-deux ans. Son frère Abel-François marquis de Marigny (1727-1781) hérita de tous ses biens (AN, MC/ET/LVI/113). Malgré les intrigues et les libelles de toute sorte qui pleuvaient sur elle, elle protégea les arts et les lettres, contribua à la fondation la manufacture de Sèvres, et mena une politique diplomatique intense, mais parfois défavorable pour la France (Petitfils J.-C., 2014).

Constitution de la collection

Madame de Pompadour avait un goût artistique sûr. Elle rénova le château de Crécy, fit construire Bellevue, sur le versant de Meudon par Jean Lassurance (1690-1755). En 1757, elle loua le château de Champs, et, trois ans plus tard, elle acquit l’élégante et imposante bâtisse de Ménars, sur la Loire, chargeant l’architecte Ange-Jacques Gabriel (1698-1781) de sa rénovation. L’hôtel d’Évreux (actuel palais de l’Élysée) fut sa résidence parisienne. À son décès, ses multiples propriétés étant toutes garnies d’œuvres d’art, il fut nécessaire de rédiger un inventaire après décès pour faciliter la succession et évaluer ses collections. L’inventaire débuta en juin 1764 et s’acheva en juillet 1765 (AN, MC/ET/LVI113 et AN, MC/ET/LVI/114). Madame de Pompadour était une grande collectionneuse de tableaux, de sculptures, de meubles, de laques, de porcelaines de France et d’Extrême-Orient, de pierres gravées, de bijoux, d’orfèvrerie, de livres et d’estampes. Seule sa bibliothèque dispersée entre le 3 juin et le 26 juillet 1765 fit l’objet d’un catalogue détaillé imprimé.

Madame de Pompadour et la porcelaine

Les porcelaines décrites dans son inventaire après décès furent prisées par le marchand mercier Simon-Philipe Poirier (vers 1720-1785) installé rue Saint-Honoré à Paris. Les marchands parisiens furent pour Madame de Pompadour les principaux fournisseurs d’objets d’art asiatiques inventoriés dans ses demeures. Disposant de moyens financiers conséquents, elle pouvait se procurer des pièces souvent coûteuses et d’une grande rareté sur le marché de l’art français. Ainsi, elle accumula près de trois cent pièces de porcelaine d’Extrême-Orient pour la plupart enrichies de montures en bronze doré de style rocaille. C’est dans la boutique de Lazare Duvaux (vers 1703-1758), son marchand favori rue Saint-Honoré, que Madame de Pompadour se procura plus de cent cinquante pièces de porcelaine montées. Grâce au livre-journal du marchand, nous savons que ses achats de céramiques asiatiques débutèrent en avril 1750 (Courajod, 1748-1758, p. 48). Elle dépensa énormément jusqu’en 1752, pour des vases, des magots, des animaux. Ses achats déclinèrent rapidement jusqu’en 1757. Outre Duvaux, la marquise était en contact avec le marchand Edme-François Gersaint (1694-1750). Dès 1748, Gersaint acheta ainsi, pour le compte de la marquise, lors de la vente Angran de Fonspertuis (1669-1747) un grand pot-pourri en porcelaine de Chine pour 1100 livres (Vente à Paris, décembre 1747, lot 52). La majorité des porcelaines acquises par la marquise provenaient de Chine, et étaient souvent assez récentes. Ainsi, son goût semble marqué par les céladons unis, truités ou craquelés, les porcelaines monochromes à fond bleu lapis, quelques rares blancs de Chine ou des porcelaines jaspées, toutes datées de la fin du XVIIe ou de la première moitié du XVIIIe siècle.

Les laques

Objets de très grand luxe, ses laques furent aussi décrites et estimées par Poirier lors de l’inventaire après décès. Elle posséda des laques d’une qualité exceptionnelle, comme la grande cassette de l’ancienne collection de la duchesse du Maine acquise chez Duvaux, le 15 avril 1753, pour l’importante somme de 5000 livres (Courajod, 1748-1758, p. 156-157). Prisée seulement 2800 livres, elle figura ensuite dans la collection du financier Randon de Boisset (1708-1776) (vente à Paris, 27 février 1777, lot 745), puis dans celle du grand amateur anglais William Thomas Beckford (1760-1844). Elle possédait en grand nombre des pièces en laque du Japon du XVIIe siècle, dont des cassettes, des boîtes de tailles diverses, des pots-pourris, des vases, des bouteilles, des caisses à fleurs souvent agrémentées de montures en bronze doré. L’ameublement de la marquise était complété par quelques belles pièces d’ébénisterie parisienne couvertes de panneaux en laque d’Extrême-Orient. Ces meubles d’une grande richesse et de grand prix, tels commodes, encoignures, secrétaires en armoire ou à dos d’âne plaqués de panneaux en laque orientale furent inventés par le marchand mercier Thomas-Joachim Hébert (1687-1773). Soucieux de régler rapidement la succession (AN, MC/ET/LVI113), les meubles, les objets en laque et les porcelaines de Chine de Madame de Pompadour ne passèrent pas dans la collection de son frère le marquis de Marigny, à l’exception de ceux inventoriés au château de Ménars. Ils furent dispersés aux enchères pratiquement tous les jours dès novembre 1764 à l’hôtel d’Évreux et les vacations se succédèrent pendant plus de deux mois. Au début de l’année 1766, on dispersa les derniers lots de ces ventes qui comblèrent les grands amateurs, les marchands d’art et les négociants (Cordey, 1939, p. 263-267).

Un goût raffiné

Compte tenu de la réputation du bon goût et de l’exigence de la marquise, la provenance de ses laques, comme celle de ses céramiques orientales devint une référence incontournable. Cette provenance prestigieuse fut parfois signalée dans des ventes postérieures. Preuve d’un intérêt singulier pour la Chine, Madame de Pompadour posséda quinze pièces à décor chinois exécutées en porcelaine de Sèvres par Charles-Nicolas Dodin (1734-1803). Cet attrait pour les pièces à décor chinois de la manufacture royale de Sèvres n’est pas anodin quand on sait combien la maîtresse royale aimait les porcelaines de Chine. Actuellement, les objets d’art asiatiques issus de la collection de la marquise de Pompadour sont conservés au musée du Louvre, au musée Nissim de Camondo, au Victoria and Albert Museum, au Metropolitan Museum of Art, dans les collections royales anglaises, et dans quelques prestigieuses collections particulières.