Portraits de Jean de Bruyères et Jeanne de Recourt
fol. 1v-2
Ces effigies d'un homme et d'une femme sont un rarissime exemple de double portrait en pleine page au début d’un livre d’heures enluminé étudié par François Avril en 2011 (Avril 2011 et Avril 2011-2012). Les portraits se trouvent face à face dans un manuscrit de la main du Maître de Machéco, que l’on tend à identifier avec Oudot Matuchet, mais ils seraient, selon le spécialiste, d’une autre main dijonnaise anonyme. Les deux effigies sont datées de 1536 et comportent des armoiries et devises qui ont permis de les identifier comme un Jean des Bruyères et son épouse, Jean de Recourt (leurs devises respectives sont des anagrammes). Les armes de l’homme ont d’abord été identifiées comme celles de la famille dijonnaise des Machéco, mais François Avril a pu déterminer que le nom de Jean de Bruyères apparaît à plusieurs reprises dans le manuscrit et qu’un jeton frappé à son nom montre les mêmes armoiries que celles des Machéco. François Avril suggère que la date de 1536 aurait pu être ajoutée ultérieurement dans le manuscrit, qui aurait été réalisé à la fin des années 1520. Cependant les costumes sont compatibles avec la mode de la seconde moitié des années 1530, notamment la toque à fond plat, aux bords moins larges que dans les années 1520, et le col montant de Jean des Bruyères. Jeanne de Recourt porte un chaperon à bavolet, typique de la bourgeoisie. Son col ouvert paraît aussi difficilement datable des années 1520. La famille Recourt était établie à Langres. Jean des Bruyères était lieutenant du gruyer, verdier et garde des eaux et forêts de châtellenies au bailliage de Dijon.
Le couple de commanditaires est représenté à mi-corps dans un cadre architecturé, se détachant sur un fond vert, chacun tenant un livre de prières posé sur un parapet, faisant écho au manuscrit au sein duquel il sont dépeints. Les encadrements sont identiques à l’exception de la demi conque qui orne celui de Jeanne de Recourt sur le bas. L’emploi du fond vert et la composition en buste avec un parapet illusionniste évoque la portraiture des anciens Pays-Bas qui est importée en France dans les premières années de la décennie 1530, notamment par Corneille de Lyon, un argument qui renforce l’hypothèse de réalisation en 1536 L’auteur des portraits présente des similarités stylistiques fortes avec le Maître de Machéco, notamment avec les effigies d’Étienne III Berbisey et sa femme Anne de Moisson, représentés en prière devant saint Yves dans un manuscrit que François Avril à l’enlumineur en 2011.
DHEVRE.BIEN.Y.SERAS
anagramme du nom de Jean de Recourt
DE.RIEN.NE.TOVCHERA.
anagramme du nom de Jeanne de Recourt
p. 100-106