Lugt n°29009
La vente Castellani de 1866 est la première et unique vente aux enchères d’antiques organisée de son vivant par le marchand et orfèvre Alessandro Castellani. Toutefois, il n’est pas exclu qu’en qualité d’antiquaire, Castellani ait organisé des ventes à Paris pour le compte de tiers, dont la trace est difficilement détectable autrement que sur les procès-verbaux originaux des ventes. La vente ouvre le 4 avril 1866 par une première vacation dédiée aux objets d’art du Moyen-Age et de la Renaissance (PV n°1- 73). Nous n'avons pris en compte, pour le répertoire des ventes d'antiques, uniquement les objets archéologiques, qui sont mis en vente le lendemain et jusqu’au 7 avril. Les lots d’antiques sont présentés aléatoirement. La vente est close le 11 avril 1866 et le résultat total s’élève à 148 455,50 Francs, objets d’art et antiques confondus. Elle est organisée par Charles Pillet, commissaire-priseur, par le biais de son employé et mandataire le sieur Lasquin, demeurant rue Cadet. L’expertise est effectuée par Rollin et Feuardent, ainsi que de Charles Mannheim pour les objets d’art. Le procès-verbal montre les signatures de Castellani, qui assiste en personne à cette organisation, aux côtés de tous les autres acteurs.
La majorité des vases présentés à la vente avaient préalablement été exposés au Palais de l’Industrie l’année précédente lors du Musée Rétrospectif de l’Union Centrale des Beaux-Arts appliqués à l’Industrie. Avant cela, ils avaient fait l’objet d’une courte étude rédigée par le célèbre baron de Witte, auteur des catalogues des plus grandes ventes d’antiquités du siècle. Le contenu de cette Notice sur quelques vases peints de la collection de M. Alexandre Castellani a été repris par le baron afin de former le catalogue de la présente vente. Une préface du catalogue, également de la main du baron, fait l’éloge de l’état de conservation des vases, qui d’après lui, n’ont pas subi de restaurations abusives comme c’était souvent la pratique en Italie (Catalogue Antiquités Castellani,1866, p. VI). La majorité des objets proviennent de fouilles italiennes, à l’exception notable d’une petite collection de statuettes en calcaire chypriotes, ajoutées à la fin du catalogue. A. Caubet propose d’y voir la collection chypriote de Claude Sosthène Grasset d’Orcet (1828-1900), qui aurait été cédée par ce dernier à Castellani. Son nom n’apparaît pas dans le catalogue de vente.
La vente est par ailleurs connue par un procès-verbal aux Archives de Paris ainsi que par de nombreux articles de presse, tant à propos de la vente d’objets d’art que d’antiquités. Les résultats mitigés de la vente Castellani – l’antiquaire rachète 38,6 % des lots – sont difficilement explicables. Une semaine plus tard, dans la même salle n°5 de l’Hôtel Drouot, commençait la vente très anticipée du vicomte de Janzé, qui a pu faire de l’ombre à la collection Castellani. La mise en vente des antiques aurait pu avoir comme objectif de donner une meilleure visibilité aux objets avant d’être vendus de gré à gré. Enfin, l’antiquaire a peut-être racheté ses objets afin d’éviter la vente à perte.
La vente est largement dominée par deux acteurs : Castellani lui-même, qui est le plus gros acheteur, et la firme Rollin et Feuardent, acquéreur de 26,5% des lots. La consultation d’archives a permis de retracer certains acquéreurs représentés par Rollin, notamment le baron de Witte, chargé d’acquisition par Ludwig Müller pour le musée de Copenhague. Joséphine Rousset acquiert quant à elle pour le compte des Czatoryski, dont la collection est désormais conservée au musée national de Pologne à Cracovie. Les achats de Carle Delange pour les frères Eugène et Auguste Dutuit forment une partie de la collection du musée du Petit Palais à Paris, arrivée par legs des Dutuit en 1902. Le Louvre, représenté par son conservateur des antiquités, Adrien de Longpérier, acquiert en majorité des statuettes chypriotes qui manquaient encore à ses collections. Parmi les adjudicataires, on voit le nom de célèbres collectionneurs, tels Paravey, Oppermann, Barre, Lecomte, Dreyfus, mais aussi Cernuschi, plus connu pour sa célèbre collection d’art asiatique. On remarque également la présence de Lucien Falize, orfèvre comme Castellani, qui exposa aux côtés de ce dernier dans les Expositions Universelles et de l’Union centrale des années 1870 et 1880. Figurent également les marchands collectionneurs comme Piot, Charvet, Hoffmann ou Arondel, et quelques acquéreurs dont les noms demeurent inconnus. Le procès-verbal est particulièrement soigné ; quelques lots n'ont pas de numéros de catalogue, et quelques numéros de catalogues n'apparaissent pas sur le PV.