La sphinge ou la sphinx est un être hybride : une tête de femme, des ailes d'oiseaux et un corps de lionne. Elle est ici représentée assise à droite, sur une petite base quadrangulaire, la tête tournée de face. On aperçoit sa queue entre ses pattes, et ses ailes sont recoquillées. La surface garde des traces de préparation blanche et de polychromie rose. La statuette est complètement fermée : pas de trou d'évent, pas de découpage sous la base. La statuette a été cassée et recollée, avec quelques bouchages modernes, notamment dans la base.
Dans le monde grec, la sphinge est fréquemment placée sur les tombes ou déposée en offrande avec le mobilier funéraire ; Cyrène a dédié au sanctuaire de Delphes une statue en mabre d'une sphinge sur un colonne au 6e siècle av JC. Le visage au léger sourire de cette figurine comme les ailes recoquillées relèvent du style archaïque (voir l'autel votif provenant sans doute de Calabre, daté vers 480-460, https://collections.mfa.org/objects/337948/sphinx-seated-on-an-aeolic-capital?ctx=dbc3f9d5-6c85-4e65-a128-fccd1c1855d4&idx=0 ou la statue trouvée dans le cimetière du Céramique à Athènes, datée vers 560, LIMC suppl., Sphinx, add.4), mais on peut envisager une datation encore au 5e siècle. La cité de Cyréne, sur la côte de la Libye actuelle, a été fondée par des Grecs de Santorin dans la seconde moitié du Vlle siècle av. J.-C. et a connu un grand rayonnement, notamment grâce au commerce du silphion, une plante dont le suc était utilisé comme remède et condiment. Jospeh Vattier de Bourville, consul à Benghazi en 1847-1849, a rapporté en France le premier ensemble important d'antiquités de Cyrène ; en trouve un nombre important de ses figurines dans la collection de Jean-Baptiste Muret.
Bibliographie : Lexicon iconographicum mythologiae classicae (LIMC), VIII. Zürich : Artemis Verlag, 1997, Sphinx, 52-60 ; Lexicon iconographicum mythologiae classicae (LIMC), suppl.. Zürich : Artemis Verlag, 2009, Sphinx ; Elsa Bergès, "La vente maudite de 1855. Sur la trace des antiquités perdues de Cyrénaïque…", dans Les ventes d'antiques en France au XIXe siècle, 18/06/2021, https://venteantique.hypotheses.org/2882
Auteur : Cécile Colonna
Cette figurine, rapportée de Cyrénaïque par J. Vattier de Bourville, serait passée entre les mains du collectionneur Turpin de Crissé ; le marchand Rollin l'aurait achetée, selon Muret, à la vente (anonyme) du 29 décembre 1852, puis elle a intégré la collection Muret, vendue après sa mort par son fils Ernest à Arnold Morel Fatio, qui la donne au musée en 1867
n°63b, p. 96-97