Portrait de Michel Mothion

Acquis auprès d’un antiquaire local qui disait les tenir du château de Chaintré (Saône-et-Loire), les portraits de Michel Mothion et de son épouse Perrenette Cartier rejoignent les collections du musée d’histoire locale de Mâcon, autrefois installé dans l’Hôtel de Ville, en 1895. Michel Mothion doit naître, si l’on en croit la date et l’inscription placées en haut à gauche, autour de 1550. Cependant, son acte de sépulture le dit âgé d’environ 75 ans en 1616, ce qui situerait sa naissance vers 1541. Si sa date de naissance demeure incertaine, le costume qu’il porte confirme une datation à la fin du XVIe siècle, tout comme sa barbiche en pointe et sa moustache. Léonce Lex, premier conservateur du musée, a pu trouver des mentions de Michel Mothion dans divers documents d’archives (Lex 1895, p. 267-270) : en 1581, il est hôte du logis qui avait pour enseigne « La Coppe d’or », alors qu’en 1591, date de la réalisation du portrait, il est sergent-major de la morte-paye du pont, c’est-à-dire à la tête d’une garnison en charge de la protection de la porte du pont. Ce n’est donc probablement pas un hasard qu’il se fasse représenter la main sur la garde de son épée, symbole de son statut militaire. Au mois d’août 1594, peu de temps après la prise de Mâcon en mai, Mothion est dénoncé aux échevins en tant que membre de la Ligue et expulsé de la ville auprès des sieurs de Pise et de Rymon. Ses déboires politiques et religieux ne semblent pas l’avoir empêché de poursuivre une belle carrière municipale : en 1599, il est échevin et receveur de la ville. Il est enterré en 1616 dans l’église Saint-Pierre de Mâcon. Un autre document le voit offrir, en qualité de marchand 800 écus en 1590 pour acheter une part de l’abbaye du doyenné de Saint-Gengoux, qui sera finalement acquise par Aymé de Rymon pour 1292 écus et 50 sous tournois. Sa femme, Perrenette (et non pas Anne comme l’affirme le catalogue de 1999), meurt deux ans plus tard et est inhumée aux côtés de son mari. Les deux époux logeaient rue de la Barre, à Mâcon. Nous pouvons raisonnablement imaginer que les portraits ornaient une des pièces de leur logis. Cette demeure correspondrait, selon Léonce Lex, à la maison où naît Lamartine deux siècles plus tard, car il y retrouve une similitude presque parfaite entre le blason ornant l’arc de la porte d’entrée et les armoiries sur le portrait de Michel Mothion.

L’auteur des deux portraits, visiblement conçus en diptyque malgré le fait que les deux époux ne se fassent pas face (ce genre de disposition n’est pas si inhabituel pour des portraits de couple), demeure anonyme. Cependant, son style laisse deviner que nous avons affaire à un peintre actif en Bourgogne s’inscrivant dans une tradition locale appréciée dans la seconde moitié du XVIe siècle. Si le portrait de Perrenette Cartier semble trop retouché pour parler prudemment du style de du peintre, celui de Michel Mothion révèle un artiste d’une certaine qualité, capable de modeler les visages avec précision et de rendre les tissus avec de beaux effets de réel. Par son intérêt pour des chairs fondues, le peintre trahit une influence flamande, notamment celle de Nicolas de Hoey, actif dans la région.

1591 / AETATIS SUA 41

Michel Mothion sergent major de la paye morte du pont de mascon et bouregois de la dite ville peint en 1591 âgé de quarante et une année