La Vierge à l'Enfant

Sculpture taillée dans une pièce principale de bois (probablement tilleul) avec éléments assemblés.

- Traces de fixation dans l’étau de l’établi : une cavité cylindrique sur la tête (diamètre : 2,5 cm) comblée par une pièce de bois ; dessous de la base non observé (non accessible).

- Revers évidé à la gouge et à l’herminette.

- Base polygonale.

- Voile de la Vierge : revers travaillé au tremblé et bord souligné de petits creux parallèles, pour suggérer la nature de l’étoffe et la bordure finement plissée du voile.

- Bride du manteau sculptée dans la masse en ménageant un ajour entre le buste et la bride.

- Éléments assemblés à l’origine : parties dextre et senestre de la chevelure la Vierge, chacune assemblée avec une cheville ; bras gauche de l’Enfant assemblé avec une cheville ; plusieurs boucles de cheveux de l’Enfant (chaque boucle, taillée à part et prolongée par un tenon, est insérée dans une cavité sur la tête de l’Enfant).

- Importante fente dans le bas à senestre, en partie comblée.

- Attaque d’insectes xylophages (actuellement inactive).

- Manques : auriculaire de la main droite de la Vierge ; index et auriculaire de la main droite de l’Enfant et les doigts de sa main gauche ; bord de la base à senestre ; éclats sur le voile, les cheveux, les vêtements et la base. 

- Interventions postérieures : partie dextre du voile détachée, refixée par un clou ; sexe de l’Enfant arasé.

Polychromie d’origine et polychromies postérieures

1.Polychromie d’origine :

Toile encollée localement, notamment sur la base ; préparation blanche.

- Manteau, ceinture de la robe : bol, or.

- Croissant de lune (et base ?) : bol, argent.

- Robe : décors moulés et appliqués, dits « brocarts appliqués » (vestiges observés sur la manche droite).

- Revers du manteau : bleu.

- Revers de la robe : rouge (probablement rouge vif, glacis rouge sombre).

- Voile : blanc.

- Carnations : rose.

2.Polychromies postérieures :

- Revers du manteau, chaussure : bleu (plusieurs couches).

- Manteau : sur les côtés et dans le creux de certains plis : couche jaunâtre.

- Robe, voile : épaisse couche blanc-gris.

- Cheveux : brun.

- Carnations : rose grisâtre ; lèvres roses ; sourcils bruns ; yeux : iris bleu sombre, pupille noire.

La Vierge debout sur un croissant de lune est un nouveau type iconographique apparu au 14e siècle et largement diffusé dans le monde germanique et les anciens Pays-Bas à la fin du 15e et au début du 16e siècle. Cette iconographie se fonde sur la vision décrite dans l’Apocalypse (12, 1) : « Un signe grandiose apparut au ciel : une Femme, le soleil l'enveloppe, la lune est sous ses pieds et douze étoiles couronnent sa tête ». La Vierge Marie est identifiée à la Femme de l’Apocalypse resplendissant de la lumière du Christ et triomphant du démon. L’image de la Vierge debout sur un croissant de lune exprime la croyance en l'Immaculée Conception selon laquelle Marie, dès l’instant de sa conception, est exemptée du péché originel. La Mère de Dieu se présente ainsi dans sa pureté intacte et sa toute-puissance céleste, en dehors des hommes et du temps. La lune à ses pieds, astre à l’éclat emprunté dont l’aspect varie sans cesse, est le symbole de la fausseté et des égarements du monde terrestre que domine la Vierge. La lune est ici représentée sous la forme, usuelle au Moyen Âge, d’un croissant enserrant un visage humain qui peut évoquer Ève ou le démon : la Vierge est considérée comme la « nouvelle Ève » qui écrase la tête du serpent tentateur, selon la prédiction de la Genèse (3, 15).

Provient de l’église du couvent des Franciscains de Rouffach, dit des Récollets depuis la réforme de l’ordre au 15e siècle. Église désaffectée en 1954, sculpture transférée dans un local municipal. Dépôt au musée du Bailliage, Rouffach, 1960.

p. 579 (Église des Franciscains de Rouffach : Vierge à l’Enfant gothique tardive sur la tribune d’orgue Renaissance).

p. 100-101, 275, n° 254 (années 1480-1500).