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[1902, peinture, rapport Institut procès-verbal]Rapport de l'Institut sur les envois de 1902, peintu [...]

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Dernière modification
02/12/2021 10:47 (il y a presque 3 ans)
Type de document
Description
[1902, peinture, rapport Institut procès-verbal]
Rapport de l'Institut sur les envois de 1902, peinture
TYPE : rapport de l'Institut de France - officiel
AUTEUR : Breton, Jules
PAGE DE TITRE : Séance du 19 juillet 1902. M. le Secrétaire perpétuel, pour M. Jules Breton, donne lecture, au nom de la section de peinture, du rapport sur les Envois des pensionnaires peintres
LIEU DE REDACTION : Paris
DATE : 19/07/1902
COMMENTAIRE : le rapport sur les envois de peinture de 1902 conservé dans les archives de l'Académie de France à Rome (carton 135, folios 1-6) est identique à la version du procès-verbal de l'Institut.
Descriptions
Transcription : 
[p. 508] Première année : M. Sabatté / Eve après le péché / Elle est accroupie et pelotonnée reposant sur le genou gauche, allongeant le cou et la tête vers le genou droit, le bras gauche enroulé au mollet, tandis que l'autre bras retombe, abandonnant la main à terre où a roulé la pomme mordue d'un seul coup de dent, bien large pour la petite bouche. Toute cette figure péniblement empâtée fondue en douceur dans une teinte grise, finement ambrée, s'enlève sur un fond de feuillage et de fleurs brillant et fouillé. Ce parti pris de riches accessoires autour d'un centre neutre et voilé, n'est pas sans charme. Les anciens ne le connaissaient guère. [p. 509] C'est d'un raffinement tout moderne, très à la mode aujourd'hui. Cependant nous croyons qu'il ne faudrait pas trop compter sur ces effets exceptionnels qui, trop répétés, tomberaient vite dans la banalité, et ce serait dommage. M. Sabatté a aussi cherché dans son Eve, un dessin exceptionnel aux visées michelangelesques. L'immense Buonarotti prenait parfois ses aises avec la nature ; mais quelle science profonde, quelle hauteur d'inspiration dans le despotisme de son merveilleux génie ! Notre jeune artiste a ici sacrifié témérairement le dessin à un caprice insuffisamment informé. Il a exagéré à plaisir le torse et la cuisse énorme et, plutôt que de sacrifier la ligne longue et courbe de son cou trop mince, il a tout simplement supprimé le cervelet et une partie du crâne d'une tête déjà trop peu volumineuse. M. Sabatté a dépensé dans un cadre plus bizarre qu'ingénieux, certainement exécuté d'après ses dessins, une application qui eut été mieux à sa place appliquée au tableau même. Il nous est difficile de distinguer les tendances personnelles de ce pensionnaire. La seconde toile est l'antipode de la première. Ce Saint Jérôme est d'un archaïsme sec et lourd, haché de traits noirs soulignant trop de fautes de construction, ne passant aucune des rides qui font la roue sur le visage de l'anachorète et oubliant la foi qui devrait l'animer, car ces traits d'une application trop cursive, ne sont pas assez dirigés par l'ardente passion des gothiques. Je ne dirais rien de son lion dont Rome ne lui a peut-être pas donné de modèle et ce serait son excuse ; mais aucune circonstance atténuante ne fera pardonner l'insuffisance [p. 510] de ses dessins, la Vénus accroupie et le portrait d'après Bellini. / En résumé nous croyons que M. Sabatté ne manquerait pas de talent si, pour l'instant, il se préoccupait moins d'imiter les candides naïvetés des primitifs, impossibles aujourd'hui et les hautes visées de la Renaissance et s'il se laissait aller plus simplement à l'admiration des vieux maîtres et à son entraînement personnel dans l'étude de la nature. Deuxième année : M. Roger / Se préoccupe moins d'imiter les vieux maîtres, mais puisqu'il attaque un sujet tout à fait moderne il aurait dû se conformer, se plaçant en pleine réalité, aux exigences de l'effet rationnel et ne pas placer sous le ciel des figures éclairées par un jour d'atelier. / Son tableau représente des Terrassiers découvrant des squelettes de guerriers. Quoique le style de cette toile soit trop connu dans sa sincérité plus naïve que neuve, on y remarque une certaine puissance d'exécution. Le sujet y est clairement expliqué, trop expliqué même. La peinture nous en semble trop égale ; émoussée sur les bords que l'on voudrait plus perdus, par endroit et par autres, accentués d'une arête plus nette. Les modelés ne sont pas assez rigoureux et dans les chairs des bras plus d'un trou ne s'arrête pas à la rencontre des os. / En somme l'ensemble de cette composition est d'un praticien habile et assez robuste. Nous avons dit que le sujet y est trop expliqué, nous préférerions une émotion moins variée selon les recettes, mais plus unanime, moins doctorale et plus profonde. On y voit, en effet, [511] l'homme au discours, celui qui salue les dépouilles et la femme effrayée qui en dérobe la vue à son petit enfant trop jeune pour comprendre la mort. Mais nous le répétons, il y a là plus d'un bon morceau. L'Académie regrette de devoir ici mentionner un blâme sévère : M. Roger ne s'est pas soumis au règlement qui exigeait deux figures nues et qui ne trouve là, comme nu, qu'un torse et demi. Troisième année : M. Gibert / Son esquisse est bien choisie comme convenance architecturale mais les groupes qui y sont dispersés, n'offrent aucun intérêt et ne pourraient composer un tableau. / Ils sont hors d'échelle et disposés au hasard. La figure principale qui, seule, aurait pu être touchante, se trouve perdue faute d'exécution et surtout de juste distribution de lumière. Cette étude avec quelques qualités dans les morceaux secondaires manque d'unité. L'Académie regrette d'autre part que la copie de M. Gibert ne soit pas d'un choix heureux. L’œuvre est d'un goût douteux. Quatrième année : M. Laparra / Dans son Job, M. Laparra semble se distinguer pour la concentration dramatique du sentiment et de la pensée. Y aurait-il ici une véritable vigueur ? Cet ensemble poignant et intense ne peut guère être attribué au hasard. Il y a bien des choses à critiquer aussi dans ce tableau d'abord rêche et désagréable. Mais il ressort une impression double et bien exprimée : un orientalisme très primitif et une grande désolation. Nous accordons que son Job, plus éprouvé encore que dans la Bible, est plus qu'exténué, [p. 512] plus que mort ; il n'a jamais existé. Aucun organe n'a pu animer ce bloc, sinistre seulement à force d'être réduit au minimum de la maigreur informe. Mais ses amis ne sont pas sans caractère ; et la ruine étroite de sa maison est toute une épouvante. Il était inutile de chercher à en augmenter l'horreur par cet embrasement qu'une toute petite lampe répand partout en rougeur d'incendie qui, d'ailleurs, ne sont pas sans puissance et qui exaspèrent un coin de ciel bleu d'une singulière audace. M. Laparra nous donne ici plus que des promesses, espérons que son avenir n'amènera pas de déception. L'Académie n'a pas encore vu arriver le chef-d’œuvre tant attendu. On la trouve sévère, les meilleurs élèves l'en accusent parfois. Qu'ils apportent ce chef-d’œuvre et ils verront comme elle est bonne mère. Elle a eu de tout temps des déconvenues mais elle ne désespère pas ; et, si encore aujourd'hui elle cherche en vain plus d'originalité aux pensionnaires de la Villa Médicis, elle se félicite néanmoins de voir disparaître ce genre moucheté, anémique et flottant qui, malgré la barrière des Alpes avait parfois influencé nos romains.
Localisations
Cote / numéro : 
Académie des beaux-arts, 2 E 20, p. 508-512
Source
source : Institut national d'histoire de l'art (France) - licence : Attribution 4.0 International (CC BY 4.0)
Commentaire interne
Base Envois de Rome FMP, fichier Documents.fp7, notice : £Rapport envois, procès-verbal, 1902, peinture£ Notice créée le 19/08/2002. Notice modifiée le : 07/04/2017. Rédacteur : France Lechleiter.
Rédacteur
France Lechleiter