Le Miracle de la croix, épisode de la légende de l'invention de la Vraie Croix par sainte Hélène
Sculpture provenant d’un retable.
- Étude et restauration, Anne Gérard-Bendelé, 2001.
- Observation, Juliette Levy-Hinstin, Laurence Brosse, Sophie Guillot de Suduiraut, 2021.
Sculpture taillée dans une pièce de bois (tilleul ?) avec éléments secondaires assemblés.
-Traces de fixation dans l’étau de l’établi : non décelés sur le dessus ; dessous non accessible.
-Revers plat avec traces d’herminette et, localement, de gouges.
-Parties ajourées du relief : à senestre entre le mort ressuscité et le personnage masculin au premier plan ; derrière les jambes des deux personnages masculins ; dans le bas, sous le cercueil.
-Éléments assemblés à l’origine : tour senestre de l’enceinte de la ville dans le haut du relief ; plusieurs mains (restituées) devaient être assemblées, comme par exemple les mains du personnage masculin à dextre, ainsi que son avant-bras droit.
-Traces d’outils : sol travaillé au tremblé.
-Quatre percements, deux à dextre, deux à senestre : traces de fixation du relief dans le retable ?
-Attaque d’insectes xylophages (actuellement inactive).
-Manques dus à des actes de destruction volontaire (coups d’outils tranchants) : extrémités de l’index de l’empereur, de l’index et du majeur du personnage à sa droite, du pouce droit du bourreau (poignée de l’épée restituée) ; extrémité de sa braguette (reste d’un clou) ; nez de tous les personnages supprimés (aujourd’hui restitués). Ces dommages évoquent les actes iconoclastes envers les images religieuses à l’époque de la Réforme.
-Manques : quatre fleurons de la couronne de sainte Hélène ; la tête de la suivante de la sainte : ses seins et les plis de sa robe ont été arasés lorsque la tête a été remplacée par une tête de Christ qui, par la suite, a été supprimée à son tour (sur le plan de coupe : deux cavités et une cheville arasée) ; extrémités de quatre doigts (sauf le pouce) de la main droite du personnage masculin dextre ; extrémité de l’annulaire du personnage à senestre ; croix et sa traverse vraisemblablement tenue par les deux personnages masculins au premier plan. Éclats sur l’extrémité du voile et sur le bas de la robe de sainte Hélène, le bord de la manche gauche du vêtement de l’empereur (avec retaille locale), le turban de l’empereur, la partie inférieure du pourpoint du personnage à dextre, le bord dextre du cercueil, les architectures, les cheveux et les barbes.
-Restitutions (19e siècle) : nez des personnages ; avant-bras et mains, et partie inférieure de la jambe droite (pied et cheville) du personnage masculin à dextre ; mains de sainte Hélène ; avant-bras et main droite du ressuscité ; partie médiane des doigts de la main droite de la suivante de sainte Hélène, des personnages masculins et du roi ; couronne de sainte Hélène (sauf la base) ; partie centrale de la base du relief (une pièce de bois assemblée).
-Traces d’éléments rapportés (clous, restes de tiges de clous, cavités) sur la robe de la suivante de sainte Hélène et sur son cou (une tête de Christ avait été ajoutée d’après une description de 1902-1905).
-Pour stabiliser la sculpture, ajout d’un socle mouluré en chêne calé au revers par une pièce de bois résineux chevillée (19e siècle).
Rares vestiges de la polychromie d’origine décelables sous l’actuelle polychromie postérieure.
1.Polychromie d’origine :
Préparation blanche.
-Base de la couronne : mixtion, or.
-Robe de la suivante de sainte Hélène : rouge (vermillon ?).
-Linceul : blanc.
2.Polychromie postérieure :
Préparation blanche épaisse.
-Robe de sainte Hélène, manteau de l’empereur : mixtion, or.
-Couronne de sainte Hélène : rouge, bleu et or.
-Turban de l’empereur : vert clair, bleu et ocre-jaune.
-Bonnet de l’homme au premier plan à senestre : blanc avec rayures bleues.
-Vêtements des personnages : brun-rouge, rouge, ocré, vert sombre, bleu.
-Voile et linceul : blanc.
-Cercueil : ocre-jaune avec rehauts pour imiter le bois.
-Sol : brun et vert sombre.
-Architectures : toit rouge, mur de l’enceinte : gris ; murs des maisons : blanc ocré.
-Barbe et cheveux : brun clair ; gris.
-Carnations : beige rosé.
sculpture
socle mouluré en chêne
La scène réunit six personnages, deux femmes et quatre hommes en vêtements civils, autour d’un défunt qui est enveloppé dans son linceul et assis sur son cercueil. Comme l’une des femmes est couronnée et que les personnages masculins n’ont pas les caractéristiques de figures d’apôtres ou du Christ, les hypothèses d’une représentation de la Résurrection de la fille de Naïm ou de celle de la Résurrection de Lazare sont ici abandonnées en faveur d’une autre iconographie.
Malgré les réfections de la sculpture, il est possible de reconnaitre l’image d’un épisode majeur de la légende de l’invention de la Vraie Croix par sainte Hélène, mère de l’empereur Constantin. Selon la version rapportée par la Légende dorée de Jacques de Voragine, l’impératrice fut envoyée par son fils à Jérusalem pour retrouver la croix du Christ. Elle obligea un juif, nommé Judas, à lui révéler l’emplacement où était enfouie la croix sur le Golgotha. Trois croix ont été retrouvées dans le sol et posées sur le corps d’un défunt pour distinguer celle du Christ de celles des deux larrons : le mort ressuscita aussitôt au contact de la troisième, la croix du Christ.
Le mort, qui émerge de son cercueil placé sur un brancard, occupe ici le centre de la composition, dont le sol rocheux évoque le Golgotha avec au loin la ville de Jérusalem. Les personnages masculins de part et d’autre du ressuscité devaient tenir la croix, comme le suggèrent leurs gestes et leurs attitudes (les mains sont restituées). À senestre, l’homme à barbe grise coiffé d’un bonnet représente peut-être le juif Judas, associé à la scène du Miracle de la Croix dans la Légende dorée. L’impératrice, qui porte une couronne (en grande partie restituée), est accompagnée d’une suivante (mutilée lorsqu’elle fut transformée en Christ ressuscitant la fille de Naïm). Bien que sa présence ne soit pas mentionnée dans le récit, l’empereur Constantin peut être figuré dans certaines images de la scène du Miracle de la Croix. L’homme barbu coiffé d’un turban pourrait ici représenter l’empereur, avec à son côté un personnage de sa suite. Les physionomies et les bouches entrouvertes veulent exprimer l’étonnement des témoins du miracle.
Allemagne du Sud (Bavière, Bayern ?, Souabe, Schwaben ?)
Origine inconnue. Acquisition après de M. Perrot, antiquaire à Rouen, 1896.
tome IV, p. 101-104, n° 102 (Allemagne, début du XVIe siècle, La Résurrection du fils de la veuve de Naïm).
p. 20 (Allemagne, La Résurrection de Lazare).
p. 76-77 (« […] Cette propension à l’exagération est moins sensible dans le fragment de retable évoquant La Résurrection de Lazare, dont la polychromie a été ravivée au siècle dernier sans doute, bien que les vêtements présentent des arêtes vives et anguleuses et que les visages émaciés recherchent l’expression véhémente. »).