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Œuvrant d'abord comme bijoutier puis marchand de curiosités, Sigismond Mannheim devint une figure centrale du marché des objets d’art parisien, alors en plein essor (Mestdagh, Saint-Raymond, à paraître).

Il est né à Francfort-sur-le-Main et s’établit à Paris en février 1817 en tant qu' "ouvrier bijoutier joaillier", selon sa demande de naturalisation qu’il présente en 1847 (AN, BB/11/523/ Extrait 4337). A son arrivée il est recommandé à James Mayer de Rothschild (1792-1868), certainement par Amshel Mayer de Rothschild (1773-1855), frère de James et héritier du fondateur de la banque Rothschild à Francfort. En 1821, Sigismond ouvre un commerce au Palais Royal, 128 Galerie de Valois, où on le retrouve dans l'Almanach à partir de 1827 en tant que « joaillier ». Quelques années plus tard, il devient marchand de curiosités, probablement encouragé par James de Rothschild qui forme alors l'une des plus grands collections de la capitale. En 1841, il s'installe au 8 rue de la Paix en tant que marchand de « joaillerie, objets d’art et hautes curiosités ». La boutique est louée à Hippolyte Aucoc, fondateur de la célèbre maison d'orfèvrerie et de joaillerie.

À cette époque il a déjà développé une activité d’expertise pour les ventes aux enchères puisque dès 1835 il apparaît comme « expert » dans une vente d'armes, d'armures et de curiosités apportées par un marchand de Hambourg (Collection d’armes, d’armures et objets de curiosité, recueillis en Allemagne par M. Auerbach, antiquaire de Hambourg, et provenant des collections les plus estimées, entre autres celle du prince de Hesse-Hambourg, 8 avril 1835). Ce rôle d’expert motive par la suite une longue et régulière collaboration avec le commissaire-priseur parisien Bonnefons de Lavialle auquel succèdera Charles Pillet en 1855. Sigismond Mannheim les assiste auprès des notaires pour les inventaires de succession et à la rédaction des catalogues de ventes spécialisées. Suivant cette collaboration, ils organisent régulièrement des ventes de curiosités et d'objets d'art et stimulent ainsi le marché. À ce titre il contribue à développer le connaisseurship autour des objets d’art et à structurer un marché en plein essor, surtout après l'ouverture de l’Hôtel Drouot en 1852 (Charpy, 2010). 

À partir de 1861, Sigismond est rejoint par son fils Charles en tant qu’expert associé. C’est à ce moment que sont organisées à Paris les ventes aux enchères proposant des objets asiatiques issus du pillage de l'ancien Palais d'été de Pékin en 1860. Nombre d’entre elles sont menées sous la houlette de Pillet, ainsi Sigismond et Charles Mannheim apparaissent comme les acteurs principaux dans ce domaine d’expertise relativement nouveau ; ils sont sollicités pour 10 des 16 ventes recensées entre 1861 et 1868, dont la vente attitrée d’Objets d’art et de curiosité de la Chine provenant du Palais d’été de Yuen-Ming-Yuen du 12 décembre 1861 (Saint-Raymond, 2021 ; Howald, Saint Raymond, 2018). 
Les Mannheim, père et fils, apparaissant comme les principaux experts dans les ventes d’objets asiatiques, témoignent bien de ce glissement d’expertise des objets d’art du XVIIIe siècle vers les objets d’origine chinoise qu’ils connaissent alors principalement par le spectre du goût européen pour les porcelaines orientales montées en bronze et les laques (Mestdagh, 2019). 

Lorsque Sigismond Mannheim prend sa retraite, en 1867, trois ventes de son stock sont organisées à l'Hôtel Drouot: la première consacrée aux Objets de Chine et du Japon (25-26 novembre), la deuxième et la troisième aux "Objets d'art et de Curiosité", désignant des sculptures en marbre et en bronze, des porcelaines de Sèvres, des bronzes dorés et des tableaux (du 9 au 11 décembre) mais aussi de l'argenterie, des ivoires, des armes et armures, des verres et des manuscrits (23-23 décembre). Contrairement à nombre de personnalités actives sur ce marché à l’époque aucune collection personnelle n’est recensée après son décès survenu en 1880.