DAVID D'ANGERS Pierre-Jean (FR)
Commentaire biographique
Pierre-Jean David (1788-1856) est l’une des figures emblématiques des musées d’Angers, d’abord en tant que sculpteur, mais également en tant que donateur. Sculpteur engagé, convaincu du rôle civil et moral de la sculpture publique, résolument républicain, il se donna pour objectif d’élever des statues aux Grands Hommes, et travailla inlassablement à la réalisation de cette ambition. Il parcourut l’Europe pour réunir les portraits de toutes les personnalités influentes de son siècle et fit souvent don de son travail aux commanditaires dès lors qu’il lui importait de voir réaliser la sculpture. Très tôt, dès 1811, il décida d’envoyer ses premiers travaux récompensés à la ville d’Angers : La Douleur et La Mort d’Épaminondas pour laquelle il reçut le premier Grand Prix qui lui permit de rejoindre l’Académie de France à Rome. Jusqu’à sa mort, il eut à cœur de faire parvenir à sa ville natale un modèle de ses principales réalisations, en reconnaissance du soutien financier octroyé par la municipalité au début de sa carrière. Il incita ses héritiers à agir de même, et les envois furent ainsi poursuivis par sa veuve, Émilie, et ses deux enfants, Robert et Hélène.
Constitution de la collection
Outre les propres travaux de David, furent ainsi donnés, par le sculpteur et sa famille, des sculptures de grande qualité de Jean-Antoine Houdon (1741-1828), de Philippe-Laurent Roland (1746-1816), d’Augustin Pajou (1730-1809), de François Delaistre (1746-1832), d’Antoine-Denis Chaudet (1766-1810)... mais également des dessins de Jacques-Louis David (1748-1825), d’Achille Devéria (1800-1857), de Caspar David Friedrich (1774-1840), de Théodore Géricault (1791-1824), d’Antoine-Louis Girodet (1767-1824) ou encore de Jean-Auguste-Dominique Ingres (1780-1867), pour ne citer que quelques auteurs. Des peintures, des miniatures, des daguerréotypes, des photographies, des gravures et des objets de famille complétèrent cet ensemble déjà riche. L’inventaire après décès de Pierre-Jean David d’Angers nous permet de connaître la nature et l’étendue de la collection du sculpteur au moment de sa mort en janvier 1856 (AN, MC/ET/LIX/608). En dépit des imprécisions des dénominations ou du contenu des différents lots prisés, il ressort qu’elle consistait en un rassemblement d’œuvres et d’objets très variés dont la richesse et l’intérêt ont été soulignés par plusieurs études (Caso J., septembre 1980, p. 85-97 ; Okada A., 1986 ; Le Nouëne P. et Lesseur C., 1995 ; Le Nouëne P., 2005). Si les œuvres du XIXe siècle, dessins et peintures, y sont prépondérantes, il n’est pas rare de voir apparaître des antiquités égyptiennes ou gréco-romaines, ou des œuvres a priori plus inattendues comme « six cadres contenant des peintures chinoises » (no 506) ou un « album (dessins chinois) » (no 527).
Quoique cet intérêt pour les arts et civilisations asiatiques ait déjà fait l’objet d’un catalogue en 1986 (Okada A., 1986), il continue de nous interroger aujourd’hui. L’approximation et probablement l’inexactitude des termes employés au XIXe siècle pour les qualifier — la « peinture chinoise » pouvant être confondue à cette époque avec celle d’origine indienne ou perse — sont le signe que l’intérêt porté aux textes orientaux devança celui porté à l’enluminure, dont le véritable engouement, et conséquemment la meilleure connaissance, ne se développèrent que vers la fin du XIXe siècle. Néanmoins, c’est bien de ce goût pour les arts asiatiques que révèlent les collections de David d’Angers données au musée d’Angers en 1901 puis en 1911, par la fille du sculpteur, Hélène Leferme (trente-deux miniatures indiennes sont données en 1901, inventoriées de MBA 365.1 à MBA 365.32 et quatre fixées sous verre en 1911, inventoriées de MBA 730 à MBA 733). David, tout comme ses contemporains, a connu les prémices de la découverte de l’Orient, « ce vaste mouvement d’ouverture [...] dont Victor Hugo, dans la célèbre préface des Orientales (1829) n’avait pas manqué de souligner l’irrésistible élan et les durables conséquences » (Okada, 2009, p. 19). Peut-être cet intérêt fut éveillé par un de ses proches, Théodore Pavie (1811-1896), brillant orientaliste, chargé de l’enseignement du sanscrit au Collège de France et grand voyageur qui avait rapporté de ses expéditions de nombreux documents et manuscrits asiatiques. Sans doute pouvons-nous même imaginer que c’est Théodore qui donna les œuvres évoquées ci-dessus à David. Quoi qu’il en soit, le sculpteur acheta par ailleurs une peinture indoue (Almée, gouache indoue, 31 x 17,5 cm, don d’Hélène Leferme, n.inv. MBA 730) qui avait appartenu à Girodet, comme l’attestent les notes d’Hélène au dos du dessin. On peut certes se demander si c’était l’œuvre en elle-même ou plutôt le souvenir du peintre qui avait prévalu dans cette acquisition. Pour preuve supplémentaire de son intérêt pour ces œuvres orientales précieuses, dont la délicatesse, l’épure des traits, la beauté des détails et la subtile construction de l’espace ne pouvaient que résonner en lui, il copia, tout comme Girodet avant lui, une miniature de Murshidabad, de 1760 environ, Femme se coiffant (BNF, Estampes, Réserve Od 53 4°, f.1), dans un petit dessin au crayon (Femme se coiffant, crayon graphite sur papier vergé, 13,6 x 9,5 cm, inv. MBA 364.9.1172). Il est enfin significatif que, dans le Catalogue de vente après décès de la bibliothèque de M. David d'Angers, en avril 1856, aient également figuré plusieurs ouvrages asiatiques ou concernant les Indes, tels Le Bhâgavata purâna, ou Histoire poétique de Krichna (no 131 du catalogue), traduit et publié en 1840 par Eugène Burnouf, le maître de Théodore Pavie ; La Bibliothèque orientale (no 132) d’Herbelot, Visdelou et Galand, de 1777-1779 ; Pérégrinations en Orient (no 140), d’Eusèbe de Salle, de 1840 ; ou encore Histoire philosophique et politique des établissements et du commerce des Européens dans les deux Indes (no 179), de Raynal. Dans le fonds David de la bibliothèque municipale d’Angers sont conservés notamment deux ouvrages : Noms de quelques plantes, minéraux, animaux, usités dans la médecine chinoise qui est la copie d’un manuscrit chinois rédigé par un missionnaire (Ms. 1967), ou encore le manuscrit chinois, Noms d’instruments de musique qu’il serait intéressant d’acheter en chine (Ms.1967 bis).
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