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Commentaire biographique

Louis Gardanne apparaît pour la première fois dans l’Indicateur marseillais en 1857 (p. 386). Il est fait mention de sa profession de négociant et de commissionnaire en marchandises de transits ; une catégorie pérenne dans le descriptif du guide de commerce marseillais.

Le monopole du commerce de « chinoiseries »

L’année suivante, l’entreprise est évoquée sous la raison sociale « Gardanne, Louis et Cie », commerçants en mercerie, quincaillerie et articles de Paris (Indicateur marseillais, 1858, p. 392). À partir de 1862, il est fait état de son commerce en gros (Indicateur marseillais, 1862, p. 835). Mais ce n’est qu’à partir de 1875 que Louis Gardanne et ses associés figurent comme vendeurs de « chinoiseries en gros » (Indicateur marseillais, 1875, p. 446), terme vague, qui recouvre un certain nombre d’objets, qui seront précisés l’année suivante. Les années courant de 1875 à 1881 constituent une période faste pour le négociant, qui s’octroie le monopole à Marseille de ce commerce de « chinoiseries ». Il s’agrandit ; ajoutant au comptoir pour la vente en gros, situé au 15, cours du Chapitre, un magasin pour les particuliers. En 1876, une annonce publicitaire lui est réservée en pleine page et figure en préambule de l’annuaire. Le 19, rue de la Darse, dans le premier arrondissement de Marseille, est dit réunir un « Magasin chinois » et un « Musée japonais ». Son offre s’étoffe par la suite. En plus des objets d’art et de curiosité, l’entreprise propose également à la vente d’autres produits en importation directe, tout à fait exotiques pour l’époque : des épices (la cannelle, plusieurs sortes de cafés et de thés), ainsi que des chapeaux en rotin de Manille et de Java. En 1877, il figure dans la catégorie nouvellement créée « Articles de Chine et du Japon » (Indicateur marseillais, p. 781). Il en a le monopole jusqu’en 1880.

Louis Gardanne face à la concurrence

L’année suivante, il partage l’affiche avec Barthélémy Bernard, dont le commerce est situé au 137, boulevard Longchamp (Indicateur marseillais, 1881, p. 821). En 1882, Nicolas Ansaldi le remplace, avec son commerce ayant pignon sur rue au 11, place Saint-Ferréol. Louis Gardanne s’insère également dans d’autres catégories commerciales. Si en 1883, son fonds de commerce en chinoiseries figure encore dans les pages de l’annuaire, cette spécialité disparaît dans les publications suivantes.

L’exposition des Beaux-Arts de Marseille (1879)

L’exposition rétrospective des Beaux-Arts de Marseille de 1879 lui permet certainement de se faire connaître et lui offre une grande visibilité auprès des amateurs d’art. Les objets insolites qu’il expose dans la vitrine no 8 retiennent l’attention de Louis Brès du Sémaphore de Marseille (1879).

À la suite, La Jeune République fait la réclame du « splendide Magasin Chinois » de Gardanne, « le plus en vogue », et qui constitue « l’une des curiosités de Marseille » à ne pas manquer. L’annonce évoque toutes ces « fantaisies » et « toutes les nouveautés exceptionnelles que l’industrie et l’art japonais et chinois produisent de plus remarquable » (1879).

Une implantation au Tonkin

Figurant de façon constante parmi les « Commissionnaires en marchandises de transit », il apparaît dans le cadre de classement comme « Quincailliers » et « Marchands de chapeaux de paille », en retrait de cette dernière catégorie à partir de 1882, du fait certainement de la concurrence dans ce champ d’activité. Dès lors, Louis Gardanne est désormais signalé comme « négociants-commissionnaires » exclusivement. C’est que le négociant monte un projet de plus grande ampleur.

Dans la continuité de l’explorateur et marchand Jean Dupuis (1829-1912), Gardanne fonde en 1881, avec Eugène Koenig, ce qui semble être « la première maison de commerce établie à Hanoï », suivant les termes de Claire Villemagne, qui a retrouvé trace de cette société dans les archives de la Chambre de Commerce de Marseille (2003). L’Indicateur ne le signale comme agent de la Société franco-tonkinoise d’Hanoï (Tonkin) qu’en 1885, date à laquelle l’entreprise périclite, devant faire face à la concurrence des produits anglais et allemands et devant composer avec une situation géopolitique devenue instable. Louis Gardanne a juste le temps de se réfugier au consulat de France, averti par le Conseil de guerre que le quartier sera condamné par le feu (Villemagne C., 2003).

De 1893 à 1910, la société se perpétue à Marseille, réduite au seul nom de « Louis Gardanne », comportant un changement d’adresse en 1900, où l’intéressé déménage du 78, boulevard du Musée, pour occuper le 3, rue Colbert.

Constitution de la collection

L’annonce de l’Indicateur marseillais de l’année 1876 fait l’inventaire des différents produits proposés à la vente par Louis Gardanne et ses associés. Le visiteur du Magasin chinois et du Musée japonais peut ainsi contempler une « riche collection d’objets d’art et de curiosité anciens et modernes » des pays de l’Asie du Sud-Est, de l’Inde, de la Chine et du Japon (entre p. 224 et p. 225, annonce p. 20). Émaux cloisonnés, bronzes, porcelaines, faïences, statuettes, laques, broderies, soieries, éventails, écrans, stores, nattes s’offrent aux yeux des visiteurs.

À cette liste s’ajoutent des produits usuels, issus de l’artisanat. Gardanne commercialise en effet des chapeaux en rotin de Manille et de Java, ainsi que des denrées exotiques, comme le café, le thé et la cannelle.

On apprend le goût personnel du marchand pour l’art asiatique à la visite de l’exposition rétrospective des Beaux-Arts de Marseille, où Louis Gardane fait étale de sa propre collection, composée de vases chinois et d’une armure de la même origine (Brès L., 1879). En l’état de nos recherches, nous n’avons pas retrouvé trace de cette collection.