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Commentaire biographique

Né le 27 janvier 1858 à Commercy (Meuse) d'un père sellier-harnacheur et d'une mère sans profession, Adrien Recouvreur naît dans un milieu bien établi. Son père, Jean-Joseph Recouvreur, est conseiller municipal de 1879 à 1912, administrateur de la Caisse d'Épargne de 1882 à 1904, directeur de la banque à titre honorifique de 1905 à 1914. Il fait aussi partie de la commission administrative du bureau de bienfaisance de la ville de Commercy de 1885 à 1905. Les Recouvreur possèdent aussi de nombreux prés et terres aux alentours de Commercy, héritées du père de la mère de Recouvreur, Thérèse Victorine Esselin (AM Commercy, 2Z15).

En 1869, Adrien Recouvreur devient élève au collège de Commercy où il suit des cours de dessin auprès de Gustave Henry (1838-1902), peintre, graveur et aquarelliste lorrain. Ce dernier devient son maître.

Adrien Recouvreur fait des études de pharmacie à Nancy de novembre 1882 à octobre 1885. Il y suit en parallèle l’enseignement artistique de Charles-Louis Gratia (1815-1911) et Jules-Antoine Voirin (1833-1898). Il contracte une hydarthrose du genou qui l'oblige à interrompre plusieurs fois ses études et semble l'empêcher d’accomplir son service militaire. Il doit réaliser plusieurs cures à Granville (Manche) où il rencontre le peintre orientaliste Jan-Baptist Huysmans (1826-1906) en 1881 (AM Commercy, 2Z14).

Après l'obtention de son diplôme de pharmacien de seconde classe, il s’installe à Commercy avant de mettre rapidement fin à son activité professionnelle en 1898 pour se consacrer uniquement à l'art. Il occupe alors plusieurs fonctions administratives : membre du comité d’inspection et d’achat des livres de la bibliothèque municipale de 1898 à 1905, membre de la commission de perfectionnement et de surveillance des cours de dessins de 1901 à 1906, vice-président de l’association des anciens élèves du collège normal de 1904 à 1912, administrateur de la Caisse d’Épargne de Commercy de 1905 à 1906. Il obtient les palmes d'Officier d'Académie en 1902 (AM Commercy, 2Z15).

Le 02 septembre 1891, il épouse Marie Eugénie Lintz à Ligny-en-Barrois. Le couple s’installe à Commercy. (AM Commercy, 2Z15).

Adrien Recouvreur n'a jamais apprécié son métier de pharmacien, mais ses connaissances en chimie lui permettent de se faire connaître des milieux artistiques grâce à plusieurs ouvrages où il étudie notamment la nocivité du bitume en peinture.

En parallèle de ses livres, il écrit de nombreux articles pour les revues artistiques et des monographies sur des artistes lorrains qu’il a côtoyés. Très impliqué dans les milieux artistiques lorrains, il est membre de l'Alliance provinciale des industries d'art, plus connue sous le nom d'École de Nancy, de la Société Lorraine des Amis des Arts et de la Société Lorraine d’Archéologie.

Recouvreur quitte Commercy en décembre 1906 pour s'installer à Angers pour des raisons de santé. Il s’intègre vite au milieu artistique Angevin : membre de la Société des Amis des Arts d’Angers dès 1909, puis secrétaire de 1910 à 1911, il en est le président de 1912 à 1920 puis le président d’honneur à partir de 1924.

Il est aussi le conservateur du musée de Pincé de 1917 à 1938. À partir de 1928, il publie une série de fascicules, Les Cahiers de Pincé, pour faire connaître les collections du musée Pincé. Il rejoint la Société des Aquafortistes français en 1924.

Il est proche d'un certain nombre d'artistes lorrains et angevins. Outre Gustave Henry et Jan-Baptist Huysmans, on peut citer Charles de Meixmoron de Dombasles (1839-1912), Victor Prouvé (1858-1943), Émile Friant (1863-1932), Charles Tranchand (1884-1955) ou Georges Gobo (1876-1958).

Sa carrière artistique ne connaît pas le même succès malgré plusieurs expositions dans les Salons artistiques de Nancy puis d’Angers et les conseils de ses amis artistes, même si son travail en tant que graveur est reconnu (AM Commercy, 2Z16).

Adrien Recouvreur lègue ses collections à Commercy et à Angers à sa mort le 18 mars 1944.

Constitution de la collection

L’inventaire du legs que fait Adrien Recouvreur à la Ville de Commercy en 1944 permet d'identifier la plupart des œuvres qu'il avait en sa possession (AM Commercy, 2Z14).

Celui-ci est composé de peintures, de dessins et de gravures. Les dimensions et les auteurs sont généralement indiqués.

Peintures

Trente-sept peintures dont beaucoup de peintres lorrains.

Léon Barotte (1866-1933), Paul Bonnaud (1873-1953), François Boucher (1703-1770), Georges Caïn (1856-1919), Pierre-Nicolas Euler (1846-1915), Émile Friant (1863-1932), Paul-Eugène Goepfert (1849-?), d(1815-1911), Louis Hestaux (1858-1919), Jules Lenepveu (1819-1898), Fernand Lutscher (1843-1923), Louis-Ferdinand Malespina (1874-1949), Charles de Meixmoron de Dombasle (1839-1912), Émile Mesnager (XIXe-XXe), Charles Seureau (XIXe-XXe), Jean-Matthias Schiff (1884-1919), Ernest Wittman (1846-1921) et Charles Wittman (1876-1953). Adrien Recouvreur lègue aussi quatorze de ses tableaux et trois de Victor Fagnani (oncle de son épouse).

Dessins

Plus de quinze dessins sont inventoriés, mais certaines attributions sont à reconsidérer. Dans les artistes cités, on trouve François Boucher (1703-1770), Gaston Bussière (1862-1928), Eugène Delacroix (1798-1863), Édouard-Henri Baudot (1871-1953), Angelica Kauffmann (1741-1807), Nicolas Lancret (1690-1743), Charles Le Brun (1619-1690), Nicolas Poussin (1594-1665), Ligier Richier (1500-1567), Pierre Paul Rubens (1577-1640), François-Ferdinand Sausse (1815-?), Antoine van Dyck (1599-1641), Jules-Antoine Voirin (1833-1897) et Léon-Joseph Voirin (1833-1887). Plusieurs dessins et croquis de son maître et ami Gustave Henry (1838-1902) se trouvent aussi dans le legs. Adrien Recouvreur a également versé plusieurs de ses gravures à l'eau-forte.

Estampes et pochoirs

Adrien Recouvreur a versé un ensemble de recueil d'estampes japonaises ainsi que plusieurs estampes encadrées dont le mode d’acquisition reste inconnu.

Cependant, dans une lettre à son ami et maître Gustave Henry (1838-1902) rédigé à son retour de l'Exposition Universelle de Paris en 1889, il écrit : « j'ai égrainé aux vitrines quelques japonaiseries et quelques vieux tapis dont j'ai apporté une brassée dans le wagon » (AM 2Z14). Dans une note, il cite les frères Goncourt pour le rôle qu'ils ont joué dans la diffusion du japonisme en France, mais rien n'indique qu’ils aient été en contact : « On ne peut presque plus aujourd'hui se dispenser d'ouvrir dans tous nos musées français une section japonaise, tant l'art de ce pays a contribué à la révolution actuelle de notre peinture. C’est chez les Goncourt, dans des petites réunions du mercredi à chaque semaine que des artistes étaient associés au plum-pudding à partager, que les artistes aimaient à feuilleter les cartons bourrés d'estampes japonaises très généralement inconnues ailleurs » (AM Commercy, 2Z).

Parmi les ouvrages japonais légués à la Ville de Commercy on trouve :

  • Deux des trois volumes du Gafu de Katsushika Hokusai (1760-1849), publiés initialement en 1849.
  • Trois estampes d’Hiroshige Utagawa (1797-1858).
  • Deux volumes du Kacho gafu de Watanabe Seitei (1851-1918), publiés initialement en 1903.
  • Un ouvrage de Morikuni Tachibana (1679-1748).
  • Un ouvrage (Les Hommes célèbres ?) de Totoya Hokkei (1780-1850).
  • Cinq ouvrages anonymes, dont l'un de 1864 d'après le cachet de censeur.

Adrien Recouvreur semble avoir étudié avec intérêt l'art asiatique, écrivant dans la note précédemment mentionnée : « Ne pas confondre avec l'art chinois, qui est plus courant, d'un dessin très imprécis et moins réaliste, c'est boursouflé ça n'a pas de forme anatomique. L’art chinois prédomine ailleurs, en céramique par exemple. Note : L’École Japonaise qui a influencé sur notre art moderne, ne comprend qu'un siècle – du milieu du XVIIIe au milieu du XIXe – (par l'estampe en couleurs) – la décadence est venue rapidement, faute à l'introduction de notre perspective. » Il écrira spécialement sur l'art japonais, dans les Cahiers de Pincé no 8 où il écrit « l'estampe japonaise, cette grande œuvre d'un peuple artiste si discipliné, que l'on peut bien dire qu'elle est une exception dans le monde moderne » (Cahier de Pincé, 1930, p. 1).

La couverture des Cahiers de Pincé no 7 et no 8 représentent d’ailleurs le mont Fuji à la manière des estampes japonaises (AM Commercy, 2Z9). L'influence du Japon sur Adrien Recouvreur se retrouve aussi dans une des gravures qu'il a réalisée durant la Première Guerre mondiale, Le Droit de la force (musée de Commercy, MC 2016.0.31), et qui reprend à l’identique une estampe d’Hokusai représentant le yokai Tsuchigumo. Recouvreur dit d'ailleurs de celui-ci qu'il est « le plus grand dessinateur peut-être de tous les temps » (Cahiers de Pincé, 1930, p. 2).

Adrien Recouvreur a également versé l'intégralité des ouvrages qu’il a écrits à la Ville de Commercy (AM Commercy, 2Z9).

Dans les collections qu'il lègue à la ville d'Angers, on retrouve 37 objets asiatiques en métal (bronze, cuivre doré, étain...), en céramique (terre vernissée, faïence vernissée, porcelaine), en bois ou en verre peint, mais aussi des dessins sur papier, nacres ou encore des peintures sur soie ou des aquarelles, et même une paire de babouches.

Les objets asiatiques d'Adrien Recouvreur qui se trouvent dans les collections d'Angers vont du XVIIIe au XIXe siècle et viennent du Japon et de la Chine.