[1857, sculpture, rapport Institut à AFR]Rapport sur les envois de sculpture de 1857TYPE : rapport d [...]

M. Chapu - première année / Adoration des anges (Bas-relief en plâtre) / L'âge de fer (Esquisse bas-relief en plâtre) / Ce n'est point sans regrets que la section de sculpture se voit obligée d'être sévère dans l'examen des travaux d'un pensionnaire qui avait remporté le prix de manière si distinguée. Le bas-relief représentant l'adoration des anges n'a pas le caractère religieux que comportait le sujet. En effet, on ne trouve dans cet ouvrage ni le calme ni l'onction qui devaient dominer dans la composition. Rien ne saurait justifier le mouvement désordonné des draperies des anges. La figure du Christ dans laquelle se trouvent pourtant quelques parties d'étude assez bien modelées, manque d'élévation et affecte une contraction qui est contraire au sentiment du sujet. M. Chapu aurait dû aussi se mieux pénétrer des lois du bas-relief, en évitant dans les plans, de choquantes disparates qui nuisent à l'harmonie de l'ensemble. Ce pensionnaire a fait preuve de zèle en envoyant une esquisse (l'âge de fer) qui n'était point demandée par le règlement, mais il est fâcheux qu'il n'ait pas été mieux inspiré dans cette composition. Le défaut de masser dans la disposition des groupes, l'exagération dans les mouvements des figures et des draperies, lui donnent un aspect de mauvais goût, et lui ôtent ce caractère de grandeur et cette clarté que doit toujours conserver la sculpture, lors même que, par la nature du sujet, elle est appelée à rendre les passions les plus violentes. Que M. Chapu étudie l'antique, et il y trouvera d'utiles leçons. Il est toujours dangereux de s'affranchir des grands principes de l'art consacrés par l'expérience, le goût et la raison. Nous ne saurions donc trop l'engager à sortir de la fausse voie dans laquelle il s'est égaré, et à faire en sorte que les envois qui suivront répondent davantage aux espérances que son passé avait fait concevoir et que nous conservons toujours. // M. Doublemard (deuxième année) / Enfance de Bacchus (Bas-relief en plâtre) / Tête de jeune fille (Étude d'après nature, plâtre) / Thésée triomphe du Minotaure (Esquisse ronde bosse, plâtre) / Le bas-relief (Enfance de Bacchus) d'une disposition large et d'une bonne entente de plans, a le défaut grave de paraître un pastiche de l'antique. Si nous recommandons toujours aux pensionnaires d'étudier les chefs-d'oeuvre des anciens, nous ne leur conseillons jamais de les imiter d'une manière servile. Sans cesser de s'en inspirer, M. Doublemard comprendra qu'il doit donner au sentiment qui lui est propre une liberté qui imprime à ses ouvrages un cachet particulier et par cela même plus d'originalité. L'exécution de ce bas-relief est généralement faible. L'étude de la nature ne s'y fait point assez sentir. Sans nous attacher à relever tout ce qu'il offre de défectueux sous le rapport du dessin et du modelé, nous devons pourtant signaler un défaut de proportion dans la figure principale, dont la tête est beaucoup trop petite. Nous devons dire aussi que le pied, mal attaché, donne à la jambe un mouvement raide et disgracieux. La tête d'étude, faite d'après un modèle d'un caractère agréable, présente dans la forme générale assez de naïveté, mais le modelé en est indécis, et l'arrangement de la coiffure et du costume pourrait être d'un meilleur goût. Nous regrettons que M. Doublemard n'ait pas mieux compris la portée du règlement qui exige avec raison une tête d'étude exprimant un sujet. L'esquisse représentant Thésée vainqueur du Minotaure est bien conçue et ne manque pas de caractère. Ce groupe paraîtrait encore d'un meilleur aspect, si la jambe gauche du Thésée portait plus franchement. Le tronc d'arbre que rien ne motive, pourrait disparaître aussi sans nuire à la solidité de la figure. // M. Bonnardel (cinquième année) / Notre-Dame de Pitié (Groupe en marbre) / Les Vierges sages et les Vierges folles (Esquisse bas-relief en plâtre) / C'est avec l'émotion profonde que nous fait éprouver la perte d'un artiste mort si jeune et au moment où tout semblait présager pour lui un heureux avenir, que nous venons exprimer à l'Académie notre opinion sur ses deux derniers ouvrages. Nous dirons peu de chose de l'esquisse ayant pour sujet les Vierge sages et les Vierges folles, composition qui laisse à désirer, sous le rapport de l'ordonnance et de l'entente des plans, bien que quelques figures soient heureusement conçues. Nous avons hâte de rendre compte à l'Académie des impressions qui résultent pour nous de l'examen du groupe présentant Notre-Dame de Pitié. Ce sujet, souvent traité par d'illustres artistes, offrait par cela même, dans sa conception, de très grandes difficultés. Le groupe de M. Bonnardel n'en reste pas moins original. Il frappe et attache par le sentiment pathétique et religieux généralement répandu dans cette oeuvre remarquable que recommandent aussi de belles qualités d'exécution. Mais, en parlant de l'exécution, nous ne devons pas oublier qu'à l'époque de la mort de M. Bonnardel le marbre était à peine ébauché. Il est juste de reconnaître que dans les éloges donnés à cet ouvrage, qui honore la mémoire de celui qui l'a conçu, il en revient une part aux jeunes artistes de cœur dont les talents se sont réunis pour donner un si noble et si touchant témoignage de leurs regrets à celui qui fut leur condisciple, leur ami.