[1908, peinture, rapport Institut procès-verbal]Rapport sur les envois de peinture de 1908TYPE : rap [...]

[p. 188] L'exposition des envois des pensionnaires peintres a produit, cette année, une impression plus favorable. Il semble que les pensionnaires aient tenté des efforts méritoires. Une préoccupation plus sérieuse et plus élevée se manifeste dans leurs recherches. M. Roganeau (1e année) a envoyé, d'abord, des dessins d'après Michel-Ange. Ce travail est traité un peu trop superficiellement. En demandant au pensionnaire de première année des dessins d'après les maîtres, l'Académie n'entend pas l'inviter à produire des dessins comme on en fait pour un concours ; c'est aux études de l'artiste qu'elle a songé. / M. Roganeau exposait en outre un tableau qu'il intitulait "Nymphée". Il représente une figure nue, dont la pose contournée s'affirme par des lignes peu agréables. La tête et les bras sont insuffisamment indiqués. Il eût été intéressant de donner à cette figure du caractère et du style. Son type ne sort pas de la banalité. Le dessin est faible, la couleur molle, l'ensemble manque d'atmosphère. Le faune, placé au fond du tableau, n'ajoute rien à la composition. Ce personnage, qui aurait pu être supprimé, fait que le terrain entre lui et la figure de femme paraît perpendiculaire et empêche la figure principale d'être à son plan et dans sa proportion. En résumé, l'oeuvre manque surtout de distinction. L'Académie espère que M. Roganeau tiendra compte de ces observations et que son second envoi justifiera les espérances que l'on fonde en lui. M. Leroux (2e année) présente un tableau comportant plusieurs figures : Bords du Tibre, et que dominent des pins et des monuments étagés. / Ici, le dessin, quoique un peu banal, a plus de correction. L'art y est plus sain et plus vivant, nous reprochons à cette composition de représenter un fragment de tableau plutôt qu'un tableau [p. 189] véritable. Au point de vue de la couleur, les ombres des personnages paraissent trop transparentes. Peut-être eût-il été préférable d'exécuter le deuxième personnage dans un autre ton. La couleur du fleuve qui est heureuse [sic]. L'effet produit ne répond pas à la peine que s'est donnée l'artiste. Aujourd'hui moins que jamais, la violence des contrastes et la dureté des silhouettes ne sont admissibles dans une étude de plein air. Néanmoins il y a du savoir dans cet ouvrage qui trahit de louables intentions. L'envoi de M. Monchablon, (4e année) est un fragment d'une grande composition : "La Chiourme". Une double rangée de galériens, au dos nu et coloré, manoeuvrent, sous l'oeil d'un gardien, les rames d'un navire lancé en plein courant sur une mer aux vagues menaçantes. / L'ouvrage est solidement peint, dans une large lumière bien contenue. L'ensemble d'un beau ton. M. Monchablon est peintre, nous regrettons toutefois qu'il se contente facilement d'un premier aspect. Aussi dans une grande toile, n'est-il arrivé qu'à rendre une esquisse. Si les trois rameurs de droite avaient été d'une exécution plus poussée, tout le reste du tableau se serait mis, et l'oeuvre aurait été remarquable. Comparativement à son envoi de l'an dernier, l'Académie est heureuse de constater un progrès chez M. Monchablon. Quels que soient les défauts de cette composition, elle est certainement un des efforts les plus intéressants qui aient été tentés, en ces derniers temps, à la Villa Médicis.