[1830, sculpture, rapport Institut à AFR]Rapport sur les envois de sculpture de 1830TYPE : rapport d [...]

[f°9] M. Dumont a envoyé pour travail de sa dernière année un groupe en marbre, figures grandes comme nature, représentant Bacchus et Leucothoé tenant une grappe de raisin qu'elle se dispose à presser dans la coupe que le jeune Bacchus a entre ses mains. Ce charmant ouvrage est aussi remarquable par la grâce de la composition, que par le mérite de son exécution soignée. On a observé que les bras de la figure de Leucothoé sont un peu forts. On a pensé qu'il y a, en général, un peu d'égalité. Le pied en avant parait manquer de finesse. Dans les mains on aurait désiré plus d'étude. On remarque du reste dans cet ouvrage un talent [rayé : remarquable ; mis à la place : véritable], un sentiment vrai et fin dans l'expression de la tête de la Leucothoé regardant le jeune Dieu. M. Dumont a de plus envoyé le portrait en marbre de M. Guérin. Ce buste, d'une extrême ressemblance, présente quelque mollesse dans son exécution. On désirerait pouvoir y mieux distinguer des différences entre les parties osseuses et les chairs. [f°9bis] M. Seurre pour sa dernière année, a fait une statue en marbre, grandeur de la nature ; elle représente Léda. Cette figure n'étant pas achevée, il est difficile de la juger autrement que sous le rapport de sa composition qui est heureuse sous plusieurs aspects. Pourtant on invite M. Seurre, en terminant cette statue, à mettre plus de légèreté de forme et de dessin dans la hanche et dans la cuisse du côté qui porte. Le contour qui lie le torse aux cuisses est indiqué d'une manière dure et cerné trop également. M. Seurre pourra mettre sans aucun doute dans les draperies, qui étant peu avancées, lui en laissent la facilité, beaucoup plus de délicatesse et de finesse. C'est donc avec intérêt qu'on lui donne ces conseils pour un ouvrage qui lui promet un heureux succès, lorsqu'il l'aura fini. Pour sa troisième année, M. Desprez a donné une figure en marbre : L'innocence jouant avec un serpent. Dans cette figure de jeune fille, on remarque de la grâce et de la naïveté. On regrette que l'auteur n'ait pas choisi un modèle d'une nature plus soutenue et plus élevée. Pour compléter ses obligations, M. Desprez avait à donner une tête d'étude ; on a regretté de ne pas la voir jointe à son envoi ; mais M. Desprez a été forcé de quitter Rome, à cause de sa santé qui ne lui permettait pas d'habiter cette ville. M. Lanno, pour sa deuxième année envoie un bas-relief en plâtre dont les figures sont de proportion moyenne. Le sujet est Pandore chez Épiméthée, au moment où elle lui offre la boite fatale. On reconnaît dans ce bas relief une direction vers le bon goût, on aurait désiré plus d'étude et de souplesse dans le travail des nus ; une expression plus sentie dans la tête d'Épiméthée et plus de fermeté dans la manière de rendre son sujet. M. Lanno aurait dû joindre à l'envoi de son bas-relief une tête d'étude ; mais ce Pensionnaire n'a point satisfait à cette partie de ses obligations. [f°10] M. Jaley envoie pour sa deuxième année un bas-relief en plâtre qui représente une scène pastorale composée de deux figures grandes comme nature. Une jeune fille s'appuie sur l'épaule d'un berger qui joue de la flûte, elle tient à la main une couronne qu'elle semble lui destiner pour prix de son talent. On a trouvé que la figure du jeune Pâtre était bien entendue de plan ; mais dans celle de la jeune fille, la tête n'est plus en harmonie avec la saillie du torse ; la liaison du col avec les épaules n'a pas paru d'un heureux dessin ; cette figure est trop grande pour l'âge que M. Jaley a voulu lui donner, par le caractère de ses formes, surtout pour la mettre en rapport avec la proportion donnée au jeune berger. M. Jaley, après avoir payé sa dette comme Pensionnaire, a fait preuve d'un grand zèle, en ajoutant à son bas relief un groupe de grande proportion ayant pour titre : Homère et son jeune guide s'éveillant au son de la lyre du poète. M. Jaley, en adoptant cette idée et la composition, s'est élevé à la hauteur du sujet qu'il traitait, dont il a fait une scène familière. Dans la figure d'Homère, les formes sont lourdes et communes ; quelques parties sont aplaties et semblent participer du Bas-relief. La draperie est entassée et pesante ; mais on retrouve en compensation, dans le torse, et les jambes du jeune guide, une recherche assez exacte de la nature. Enfin cet ouvrage, tel qu'il est, peut profiter à M. Jaley comme une étude sérieuse dans laquelle on remarque pourtant, une force d'exécution, qui dans les travaux que l'on attend de lui, et avec le désir qu'il montre de vouloir faire des progrès, lui assurera des succès. M Dantan, à sa première année, envoie une copie en marbre d'après une statue antique connue sous le nom de l'amour de Phydias [sic]. La tête, les bras, les ailes ont été rétablis par l'artiste. [f°10bis] On regrette que M. Dantan justement entraîné par la beauté du fragment de la statue qu'il avait choisie n'ait pas su tirer un meilleur parti des nombreuses restaurations qu'il avait à y ajouter. On pense que cette statue bien connue par plusieurs répétitions qui sont dans plusieurs Musées d'Italie, que diverses têtes d'amour que l'on voit dans les Musées de Rome, auraient pu lui donner de beaux exemples pour le caractère de la tête qu'il a fallu restaurer. M. Dantan joint à cette copie une tête d'étude qui a paru modelée d'une manière peu arrêtée, et arrondie.