Saint Antoine de Padoue
Il s'agit du panneau dextre du polyptyque à double face du maître-autel de l'église du couvent San Francesco de Borgo Sansepolcro. D'autres fragments du polyptyque sont conservés dans le même musée, à Settignagno, à Assise, à Venise, à Chantilly, à Berlin, à Londres, à Moscou, à Detroit, à New York.
localisation : ensemble du panneau
certitude : caractérisé ; technique : examen anatomique du bois ; date : 1965
Le support est constitué d'une seule planche de peuplier, d'après l'analyse radiographique, d'une largeur de 57 cm, débitée en pleine dosse. Le fil est vertical et légèrement divergent vers l'extérieur à son extrémité inférieure où il contourne une zone noueuse. La position des cernes examinées au bord supérieur et inférieur indiquent que la planche a été peinte sur sa face externe. La surface de la planche a été renforcée par des pièces de toile en regard de plusieurs nœuds.
Trois pointes de clous sans tête sont encore présentes sur la bande inférieure non peinte, à environ 3 cm du bord inférieur. L'amincissement de la planche découvre la présence de plusieurs logements de cheville sur les deux bords du revers.
Le parquetage, posé après une régularisation du revers, probablement en 1904, comporte 5 montants et 14 traverses qui coulissent parfaitement. Le support présente un bord inférieur très altéré avec une limite irrégulière et effritée, plus courte à senestre, en raison d'une atteinte xylophage massive. L'examen sous la loupe binoculaire permet d'observer de nombreux résidus alimentaires dans les galeries. Une fente se développe à partir du milieu du bord inférieur de la planche sur une hauteur de 84 cm environ. Une seconde immédiatement à senestre est un peu moins haute de 24 cm.
Sur la planche du support a été fixé un cadre à écoinçons formé de deux planches à fil vertical d'une épaisseur de 17 mm. Ceux-ci portent un décor en relief a pastiglia. Une large moulure d'une largeur de 30 mm et d'une hauteur de 20 mm est appliquée et fixée par des clous le long du bord supérieur horizontal et des deux pans coupés des écoinçons. A leur bord inférieur trilobé; ces écoinçons s'achèvent par une petite moulure, de 20 mm de large et 16-17 mm de haut retombant sur deux chapiteaux. Ces derniers, maintenant perdus, étaient situés à 39 cm du bord supérieur du panneau, leurs emplacements en bois nu ont une largeur maximale de 42 mm et une hauteur de 20 mm. Les deux écoinçons sont fendus à hauteur de l'arcade centrale.
localisation : ensemble du panneau
position : entre le support et les couches colorées
certitude : supposé ; technique : RX , MFX ; date : 2008
Gesso. Traces d'utilisation d'un poncif et dessin.
La planche a été amincie lors du dédoublement et son épaisseur résiduelle oscille entre 1,3 et 1,6 cm. La zone la plus mince étant située en regard de l'écoinçon gauche.
Le polyptyque, commandé en 1437 à Sassetta par les frères du couvent San Francesco de Borgo Sansepolcro pour honorer la mémoire du bienheureux local Ranieri Rasini, a été livré et mis en place en 1444. Peint sur ses deux faces, il comportait près de 60 éléments dont 27 ont survécu. Plusieurs documents, dont un programme particulièrement détaillé en 1439, permettant de suivre la réalisation du polyptyque, payé par les frères pour la somme considérable de 500 florins. Il était spécifié que l'artiste devait employer des matériaux luxueux comme l'or et l'argent qui représentent, sur ce panneau central plus de la moitié de la surface picturale. On ignore la date à laquelle la face et le revers ont été séparés : la Vierge et les Saints sont cités sur des autels séparés en 1584 mais cela ne veut pas dire qu'à cette date le panneau était déjà scié dans son épaisseur. Le panneau de Saint Antoine de Padoue, encore solidaire du panneau de Saint Jean, est posé sur le retable de la Nativité de la Vierge. Comme la plus grande partie du retable, elle est ensuite vendue en 1808 au Cavalier Serguliani de Borgo San Sepolcro. C'est à cette époque que les panneaux ont été dédoublés. Celui-ci donne la Vierge et d'autres parties du retable au père Giulio Anastasio Angelucci à Arezzo, qui donne à son tour ces éléments à son frère Pietro Antonio Angelucci, le prieur de Montecontieneri, près d'Asciano.
Elle est ensuite mentionnée vers 1855-1860 dans la collection Lombardi et Bardi de Florence, comme les deux volets. Les tableaux ont été endommagés vers 1900 car ils étaient accrochés dans la collection Teyssonneau à Bordeaux près d'un calorifère, dans une cage d'escalier. Cela explique la restauration demandée par le propriétaire. Ainsi, en 1904, la maison Brisson Leguay effectua un parquetage du panneau et il est possible qu'à cette époque également fut effectuée la restauration de la couche picturale avec reprise du fond d'or à la mixtion et à la feuille et pose d'un vernis fortement teinté.
Les tableaux sont décrits en 1951 dans la publication de E. Carli dans le Burlington Magazine. Il y indique un état excellent, sans presque aucun repeint, à l'exception d'une légère fente au centre de ce panneau central. Les couleurs sont encore transparentes bien que légèrement assombries par un vernis et le fond d'or a une patine jugée merveilleusement chaude.
Le musée du Louvre acquiert le panneau central en 1956 avec les deux volets. D'après le constat d'état de L. Aubert, l'ensemble des trois tableaux porte un vernis teinté où sont noyés de petites retouches modifiant la gamme chromatique des compositions. Les accidents les plus marquants sont situés le long des quatre joints (en fait deux joints et deux fentes du panneau de la Vierge).
La commission de restauration en 1957 a remarqué le fond d'or moderne sous le vernis teinté et les traces d'or ancien dans les sondages. Il est décidé de dévernir et d'enlever les repeints. A l'issue de cette dernière intervention, il est demandé à Cesare Brandi de poursuivre l'examen avant de l'envoyer à l'Istituto di Restauro de Rome en novembre 1957 pour un nouveau parquetage effectué en 1958 et 1959.
En 1970, on remarque deux ouvertures de joints en bas et une fente partant du bord inférieur qui se propage sur 55 cm de haut à senestre. Le décollement des faux-socles posés à leur base. Ces altérations sont rapportées à un nouveau système de présentation trop contraignant, depuis 1969.
S. Bergeon et M. Perche examine le panneau en 1976 et principalement la fente. Est également reportée la présence de points blancs le long des joints et des anciennes cassures, témoignant d'une évolutivité des altérations du support. Les incrustations en V lâchent. Les collages latéraux se décollent des faces latérales des V sur 1 à 1,5 mm. La cause serait essentiellement une baisse de l'humidité relative.
Dans le cadre d'une étude internationale sur le polyptyque, le C2RMF a été amené en 2006 à reprendre l'étude matérielle des différents éléments du polyptyque conservés au Louvre, à constituer pour les premiers des dossiers complets qui n'existaient pas jusque-là et à les examiner très attentivement avec le concours de restaurateurs spécialisés dans le support et la couche picturale.