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[1887, peinture, rapport Institut procès-verbal]Rapport sur les envois de peinture de 1887TYPE : rap [...]

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Dernière modification
15/01/2025 14:06 (il y a 6 jours)
Type de document
Description
[1887, peinture, rapport Institut procès-verbal]
Rapport sur les envois de peinture de 1887
TYPE : rapport de l'Institut de France - officiel
AUTEUR : Müller
PAGE DE TITRE : Séance du 12 novembre 1887. M. Müller au nom de la section de peinture donne lecture du rapport sur les envois de Rome
LIEU DE REDACTION : Paris
DATE : 12/11/1887
COMMENTAIRE : Les archives de l'Académie de France à Rome (carton 118-1, f° 41-43) conservent une copie manuscrite conforme au rapport du procès-verbal.
Descriptions
Transcription : 
[p. 408] M. Popelin, quatrième année : M. Popelin a envoyé pour sa quatrième année un tableau représentant un caveau où sont jetés les corps des martyrs parmi lesquels celui d'une jeune fille Sainte Praxine dont la légende dit que le corps fut préservé de la décomposition. L'effet du tableau est vigoureux, les deux plans de roches volcaniques en se profilant sur un ciel bleu, produisent un fond favorable à l'expression d'une scène dramatique. Au premier plan, sur la terre brune, est étendu le corps de la jeune martyre, vêtu de blanc et tombé à plat sur la poitrine, son bras gauche raidi porté en avant laisse voir la main entrouverte, dessinée et peinte avec souplesse, l'autre main crispée sur le sol, avoisine la tête trop grosse et enveloppée d'une ombre opaque qui voile absolument tous les traits du visage qu'il était si intéressant de montrer. Le corps de la sainte manque du volume nécessaire et ses formes n'étant exprimées par un contour ou indiquée par les plans de la draperie, il s'ensuit une fâcheuse incertitude sur la régularité de l'ensemble et même sur la probabilité de la présence du corps sous le vêtement, à un plan plus éloigné on voit le dos tuméfié d'un cadavre renversé [p. 409] sur la hanche dont la forme et le modèle sont à la fois indécis et compliqués mais dont la couleur en est juste et fine. Au fond à gauche dans l'ombre épaisse on entrevoit deux cadavres aux membres si confusément enchevêtrés qu'il est impossible d'attribuer telle jambe à celui-ci, tel bras à celui-là ; pourtant les parties compréhensibles sont d'une bonne couleur et solidement peintes. En résumé il semble que M. Popelin ait volontairement négligé dans le sujet qu'il a choisi, tout ce que le sujet comportait d'intéressant et d'idéal. Cependant quoi de plus propre à inspirer un artiste que le contraste offert par l'apparition du corps d'une jeune vierge dont la beauté demeure miraculeusement incorruptible au milieu de l'antre où gisent des cadavres putréfiés ? Certes l'interprétation à représenter a trahi la pensée du peintre qui au lieu de la glorification d'une martyre s'est borné à représenter un charnier souterrain au fond duquel brille une auréole archaïque placée derrière le chef d'une enfant étendue sur le ventre dans son vêtement blanc. L'Académie constatant l'habileté de M. Popelin exprime le vif regret que qu'il ne l'ai pas approprié à l'exécution d'une oeuvre plus digne par l'élévation du sentiment et par le style de l'accomplissement de son pensionnat. M. Baschet, troisième année : M. Baschet a envoyé pour sa troisième année la copie d'un fragment de fresque de la chapelle Sixtine. L'article du règlement concernant les obligations du pensionnaire de troisième année porte qu'il doit exécuter : 1° une copie d'après un grand maître, 2° une esquisse originale. En ne remplissant pas la seconde condition expressément imposée, M. Baschet a commis une infraction que l'Académie blâme hautement. D'ailleurs la copie est excellente à tous les points de vue, le dessin, le style et la couleur du maître sont reproduits avec finesse et une intelligence remarquables. Toutefois l'Académie eut préféré que ces qualités, dont elle reconnaît l'importance fussent employées à la reproduction d'une oeuvre qui eût été plus profitable aux études du pensionnaire. M. Pinta, 2ème année : M. Pinta pensionnaire de deuxième année envoie un tableau intitulé Sainte Marthe. La légende raconte que sainte Marthe débarqua miraculeusement à Marseille dans le premier siècle de notre ère, et qu'elle délivra la Provence d'un monstre nommé Tarasque, qui ravageait les bords du Rhône, l'histoire à son tour dit que à la fin du même siècle saint Ignace Théophore fonda à Tarascon sous le vocable de sainte Marthe un monastère dont les religieuses avaient pour mission de recueillir les filles repenties. La réunion de la légende à l'histoire a-t-elle fourni à l'imagination de M. Pinta le sujet allégorique de son tableau ? La composition autorise cette hypothèse, encore que les riches coquetteries des ajustement soient mal en rapport avec la simplicité angélique de la sainte, avec le caractère des costumes de l'époque. La composition du tableau est ingénieuse et d'un effet attrayant. Au premier aspect on voit une grande jeune femme debout, couverte d'une vaste draperie de velours noir doublé de brocart d'or, contre elle dans un large pli [p. 410] de l'étoffe se blotti une jeune fille toute nue cachant sa tête derrière son bras relevé. La jeune femme c'est sainte Marthe, son visage d'un ton ambré est doux et aimable, ses cheveux très blonds se confondraient avec l'auréole qui les entoure, si le scintillement accidentel de l'or vrai du disque n'en faisait distinguer parfois quelques mèches. D'une main raide et fluette, la sainte tient à la fois un bénitier d'argent, très étudié, et l'extrémité de sa ceinture à laquelle est attaché le monstre captif, l'autre main appuyée sur sa poitrine presse sans doute une des mains de la pécheresse, qui elle, semble vouloir s'enfuir dans le giron de la pureté. Le mouvement du corps de la jeune fille est chaste et gracieux, sinon original. Le dessin et le modelé du nu, un peu veules sont faiblement améliorés par une agréable coloration dont la pâte huileuse et filante s'étend sur les mucosités monotones et brutales d'une préparation qui voudrait stimuler l'énergie de la touche et n'y peut parvenir. Enfin il est regrettable que le soin habile apporté aux carnations de la sainte et à tous les accessoires y compris la Tarasque et le crâne de cheval n'ait pas été conservé pour les chairs de la jeune repentie. / M. Axilette, première année : M. Axilette pensionnaire de première année a envoyé deux études femmes nues. La première représente une baigneuse vue de dos, la face tournée vers un bassin de pierre. Elle tord ses cheveux noirs de ses mains bien posées et finement dessinées. Le mouvement de la figure est simple bien qu'un peu viril et l'ensemble convenable. La servilité du dessin est quasi photographique, le modelé minutieusement étudié est insuffisant en plusieurs parties et la colorations assez naturelle manque d'unité et d'ampleur. En somme cette étude témoigne d'une sincérité attentive qu'on ne saurait louer sans faire remarquer qu'elle est trop souvent dirigée vers les détails au détriment de la masse. La seconde étude de M. Axilette de plus petite dimension que la précédente est peut être destinée à remplacer le dessin d'après un maître exigé par le règlement. L'Académie ne peut admettre cette substitution qui une fois tolérée aurait de graves conséquences dans l'avenir. La seconde figure représente une femme nue pareillement de dos, tirant de l'arc dans une futaie, le corps incliné vers le fond est penché du côté droit tandis que la tête se retourne à gauche. Le mouvement de la figure, non sans grâce, inquiète pourtant par sa simplicité, et la ligne oblique formée par les épaules fuyantes et continuée par le geste des bras grêle est d'un goût défectueux. L'exécution est généralement souple, délicate et en rapport avec les dimensions relativement restreintes du tableau. Le ton des chairs est agréable, le torse notamment est d'une coloration très fine. En intitulant son tableau Diane M. Axilette ne s'est pas assez souvenu que Diane était la déesse de la pudeur. M. Axilette a envoyé un dessin d'après des bas-reliefs des métopes du Parthénon, dont par malheur, il ne subsiste que peu de parties intactes. Le dessin, à tout prendre, n'est qu'un simple croquis affectant la grandeur d'une étude. Maintenant que les observations critiques ont été faites sur chacun [p. 411] des envois de la présente année, il est juste de considérer l'ensemble des travaux des pensionnaires peintres et de rechercher comment et sur quelles parties de leurs oeuvres se manifeste l'influence, jadis vivifiante du milieu dans lequel ils sont placés à Rome. L'intérêt paternel pour ainsi dire, de l'Académie pour cette jeunesse qu'elle voudrait vaillante, l'oblige à déclarer que, excepté la nature des sujets traités, rien dans l'interprétation ne laisse soupçonner le moindre souci du grand art dont les magnifiques exemples sont sous leurs yeux. Loin de là, l'aspiration vers le beau semble disparaître à mesure que la virtuosité se développe. Chaque progrès de l'habileté est marqué par la médiocrité de la conception. En même temps que la main devient agile, l'esprit devient distrait ou paresseux. Il semble enfin qu'échappant aux conseils donnés par les grands maîtres, chacun s'évertue à produire dans la partie malade de Raphaël et de Michel-Ange, des tableaux destinés à obtenir des succès parisiens et paraît préférer des applaudissements vulgaires et ignorants à l'admiration éclairée qu'il pourrait inspirer. L'Académie pense qu'il est grand temps de couper court aux errements étranges qui consistent à substituer la dextérité industrielle de Yedo au grand art d'Athènes et de Rome. Pour arrêter cette déroute du bon goût et du bon esprit, il suffit assurément d'orienter ses études vers la nature et les grands artistes qui en furent les éloquents et sublimes interprètes.
Localisations
Cote / numéro : 
Académie des beaux-arts, 2 E 17, p. 408-411
Source
source : Institut national d'histoire de l'art (France) - licence : Attribution 4.0 International (CC BY 4.0)
Commentaire interne
Base Envois de Rome FMP, fichier Documents.fp7, notice : £Rapport envois, procès-verbal, 1887, peinture£ Notice créée le 19/06/2002. Notice modifiée le : 18/10/2018. Rédacteur : France Lechleiter.
Rédacteur
France Lechleiter