Plaque à la croisée en mandorle, détachée de l'avers d'une croix composée, 26 perforations.
Au centre, figure d'applique du Christ, fixée par quatre rivets au bois de la croix, émaillé de vert. Le Christ est représenté souffrant mais encore vivant, les yeux réalisés en perles d'émail ; vêtu d'un périzonium noué sur la hanche, son corps dessine une légère flexion cubitale. Son visage est encadré par un nimbe crucifère polychrome très élaboré, ponctué de rouge et ourlé de petits demi-disques. La figure, désaxée par rapport à la croix, s'inscrit - d'après M. -M. Gauthier (dossier CEM) - dans un carré, ce qui donne harmonie à l'ensemble. Le torse du crucifié est dessiné d'une façon marquée dans ses différentes parties : pectoral, sternum, cage thoracique et épigastre. Les pieds reposent sur un suppedaneum à la forme inhabituellement arrondie et bombée.
La plaque, bordée d'un filet turquoise, est entièrement parsemée de motifs émaillés, très proches les uns des autres comme dans une sorte de horror vacui. Ces motifs varient beaucoup en forme et couleur : disques, rosettes, losanges, quatre-feuilles inscrits dans des disques. En haut de la plaque, Dextera domini sortant d'une nuée, accompagnée d'une inscription bleu sur réserve dorée assez rare sur les croix limousines : IHS : XPS / REXIUDER[um]. Aux pieds du Christ, silhouette d'Adam sortant du tombeau (la figure a totalement perdu l'émail).
La plaque provient d'une croix processionnelle composée, type très répandu dans la première décennie du XIIIe siècle, dont plusieurs exemplaires sont répertoriés dans ce corpus : Bloomington, Eskenazi Museum of Art, inv. 75-97 , Londres, V&A Museum, inv. M. 757-1910 et Saint-Pétersbourg, musée de l'Ermitage, inv. φ 184. Si la croix de la cathédrale d'Auxerre présente des analogies de caractère général avec ces œuvres, elle s'en distingue par un style tout particulier, observable non seulement dans les décors émaillés aux formes et à la disposition originale, mais aussi dans l'applique, qui n'est pas sans rappeler la sculture monumentale en bois de l'époque romane. Enfin, la version articulée de l'inscription (que l'on retrouve seulement sur les exceptionnelles croix jumelles de Nävelsjö) confirme également la singularité de cet objet. Pour toutes ces raisons, la croix d'Auxerre montre l'intervention d'un maitre affirmé et inventif œuvrant dans deuxième décennie du XIIIe siècle.
Bon état général. Lacunes de l'émail, notamment dans la partie inférieure et sur la figure d'Adam. Perte presque totale de la dorure sur le Christ d'applique.
restaurée en 1993 par Morel (Olivier Morel ?)
Collection Germain Duru, Auxerre († 1868) ; legs de la veuve Duru à la paroisse Saint-Etienne d'Auxerre (aujourd'hui cathédrale) en 1869. Objet volé avec l'ensemble du trésor dans la nuit du 30-31 juillet 1991, retrouvé dans sa totalité le 3 août 1991.
Dans le CEM II est répertoriée une chasse provenant de la collection Duru (I C, n° 2), également léguée à la paroisse Saint-Etienne.
p. 262, fig. 323
n° 211, pl. 21
p. 143
Photos CEM-CNRS : Corpus 3136, 9735
TOME CEM II ou III ; Photos CEM-CNRS : Corpus 3136, 9735; clichés Wahlen = cem-num