Plaque centrale provenant d’une croix processionnelle composée, à la croisée en mandorle « arrondie ». Dix-huit perforations de fixation.
Au centre, figure d’applique de Christ clouée au bois de la croix, émaillée de vert, ourlée de jaune et gravée de losanges dorées. Le Christ, souffrant, la tête penchée à gauche, les yeux fermés, est coiffé d’un nimbe crucifère polychrome et d’une couronne gravée de losanges. Le visage, expressif, est encadré par des mèches de cheveux parallèles ; ses bras sont légèrement arqués et son corps dessiné par des traits marqués : torse étroit, épigastre et abdomen lisses, bassin pivotant légèrement à droite. Le Christ est vêtu d’un périzonium serré par une ceinture soigneusement gravée.
Au-dessus du crucifié, Dextera Domini sortant d’une nuée et titulus inscrit en réserve dans un bandeau bleu clair, sur deux lignes. Aux pieds du Christ, mottes imbriquées évoquant le Mont Golgotha et le péché originel d’Adam.
La plaque est délimitée d’une bordure tricolore (bleu moyen et clair, blanc), entourée de deux filets dorés en réserve, dont un est gravé en zigzag. Le fond bleu moyen est parsemé de rosettes et de disques polychromes, dont les contours dorés sont pointillés.
Cette plaque provient d’une croix processionnelle aux extrémités trilobées, le type de croix le plus raffiné crée par les orfèvres de Limoges entre la fin du XIIe et le début du XIIIe siècle, dont les exemples majeurs sont conservées à Amiens, Musée de Picardie inv. M.P. 998.4.1, Arla, église paroissiale, Baltimore, The Walters Art Museum inv. 44-76, Cologne, Museum Schnutgen inv. G 45, Londres, Victoria and Albert Museum, inv. M. 748 – 1891, New York, The Metropolitan Museum of Art, inv. 17-190-332, Saint-Pétersbourg, Musée de l'Ermitage inv. phi 184, Saint-Quentin, inv. L 358 et Trondheim, Norske Videnskqbers Selbskab Museet. inv. T 894.
L’iconographie du Christ est singulière : il est représenté à la fois mort et souffrant, mais aussi couronné et victorieux. Très peu de croix ou de plaques limousines présentent cette iconographie, associant l’image du Christus patiens à celle du Christus triumphans : la croix de l’église d’Arla, les plaques de Londres, British Museum, in. BM 1925, 6-9-1 et de Lund, Universitetets Historiska Museum, inv. LUHM 23070.
D’après les recherches en cours sur les croix du CEM II (1190-1215), il émerge que c’est au cours de la deuxième décennie du XIIIe siècle que l’iconographie du Christus triumphans apparaît dans le répertoire figuratif des orfèvres de Limoges, remplaçant progressivement celle du Christus patiens. La plaque du Iparmuveszeti Muzeum de Budapest témoignant de cette phase de transition peut être donc datée des années 1210.
Pertes d’émail importantes, notamment aux extrémités supérieure, inférieure et gauche. Forte usure de la dorure de la figure de l’applique. Jambes de l’applique arrachées. Clous des mains modernes.
vers 1200-1220 ; 13e siècle [1er quart]
Dans la collection du baron Károly Kuffner (1847-1924), directeur de l’usine de sucre de Magyardiószeg, aujourd’hui Veľký Diosek en Slovaquie. Passée à son fils Lajos Raoul Kuffner (1886 - 1962), qui la donna au musée en 1939 avant d’émigrer aux États-Unis avec sa femme, la célèbre artiste Tamara de Lempicka.
p. 47, fig. 14
Photo CEM-CNRS : Corpus 8620
TOME CEM II ou CEM III ; Photo CEM-CNRS : Corpus 8620