Croix composée à croisée en mandorle et branches à empattements potencés et profilés d’un cavet.
De cette croix, il ne subsiste que le revers, qui est par ailleurs le résultat d’un assemblage moderne. Le recto est complètement nu, n’ayant conservé aucune plaque.
Au centre du verso, Christ en majesté, pourvu d'une tête d'applique classicisante. Entouré de part et d’autre de l’Α et de l’ω, il est représenté aux trois-quarts, émergeant d’une nuée ondée. Aux extrémités, quatre plaques potencées avec les symboles des évangélistes. Sur le revêtement doré et gravé de rinceaux sont appliquées cinq plaquettes émaillées en mandorle, dont quatre représentent des anges – pourvus de tête d’applique – et une est décorée d’un disque. Sur la tranche, décor estampé.
La configuration actuelle de l’œuvre est le résultat d’un assemblage qu’il n’est pas possible de dater avec précision. Les quatre plaques des extrémités potencées avec les symboles des évangélistes datent du dernier quart du XIIe siècle et sont donc déjà répertoriées dans le CEM I (n° 265, a-c, p. 215-216).
Les six plaques en mandorle restantes - y compris celle avec le Christ en majesté - sont stylistiquement plus tardives et appartiennent donc au CEM II (1190-1215).
Le remontage de l’œuvre est visible sur le montant inférieur, où l'on observe un espace triangulaire en réserve tout à fait similaire aux extrémités des plaques en mandorle ; ce qui montre que la disposition actuelle des plaques en mandorle n'est pas celle d'origine.
L’assemblage moderne de la croix est sans doute antérieur à son acquisition par l’abbé Texier, comme l’a suggéré Marie-Madeleine Gauthier. Celle-ci, qui a eu l’occasion d’examiner directement l’œuvre, s’est interrogée dans ses notes manuscrites sur le fait que la croix ait pu être reliquaire, en raison de petits trous au revers. Cette hypothèse n’a pas pu être être confirmée par d’autres éléments.
En ce qui concerne la datation des émaux des six plaquettes en mandorle, ils s’avèrent être stylistiquement proches de ceux réalisés autour de 1200 en raison de leur gamme chromatique, de l’usage de têtes d’applique et du style de la gravure. Ayant remarqué que le décor gravé sur le revêtement est interrompu - parfois de façon brusque - par les plaquettes en mandorle, Marie-Madeleine Gauthier a suggéré que ces dernières avaient été ajoutées postérieurement ; cette hypothèse semble confirmée par leur disposition sur les bras, trop courts pour les contenir.
En conclusion, seules les six plaquettes en mandorle de la croix étudiée ici – dite ‘‘Ouvaroff’’ par Marie-Madeleine Gauthier - appartiennent au Tome II du Corpus. Provenant probablement d’une autre croix perdue et ensuite remontées sur celle-ci , elles sont stylistiquement datables du tout début du XIIIe siècle.

Vers 1856 appartenait à l’abbé Texier (1813-1859), qui disait l’avoir acquise en Limousin ; acquise en 1858 par le comte Alexis Ouvaroff.
Après 1918, la croix a été saisie par l’État Soviétique et déposée au Musée Historique où elle est signalée avec certitude jusqu’en 1964, transférée ensuite au Musée Pouchkine de Moscou.

Cl. Marville (vers 1856) : aucun tirage localisé.- Cl. anonyme (avant 1969) = Corpus 12592 (don X. Muratova). - Cl. anonyme (s. d.) = Corpus 18539 (don Abbé Choux).