[1817, peinture, rapport Institut à AFR]Rapport de l'Institut sur les envois de peinture pour l'anné [...]
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Description
[1817, peinture, rapport Institut à AFR]
Rapport de l'Institut sur les envois de peinture pour l'année 1817
TYPE : rapport de l'Institut de France à Académie de France à Rome
AUTEUR : Gros, Antoine ; Guérin, Pierre
PAGE DE TITRE : Institut de France // Académie Royale des Beaux-Arts // Paris, le 22 novembre 1817 // Le Secrétaire perpétuel de l’Académie // Rapport de la Commission nommée par l’Académie Royale des Beaux-arts sur les ouvrages de peinture, d’architecture, de gravure et composition musicale, envoyés par les Pensionnaires de l’Académie de France à Rome. //
LIEU DE REDACTION : Paris
DATE : 22/11/1817
Rapport de l'Institut sur les envois de peinture pour l'année 1817
TYPE : rapport de l'Institut de France à Académie de France à Rome
AUTEUR : Gros, Antoine ; Guérin, Pierre
PAGE DE TITRE : Institut de France // Académie Royale des Beaux-Arts // Paris, le 22 novembre 1817 // Le Secrétaire perpétuel de l’Académie // Rapport de la Commission nommée par l’Académie Royale des Beaux-arts sur les ouvrages de peinture, d’architecture, de gravure et composition musicale, envoyés par les Pensionnaires de l’Académie de France à Rome. //
LIEU DE REDACTION : Paris
DATE : 22/11/1817
Descriptions
Transcription :
[f°1] Mercure ayant endormi Argus et prêt à le frapper / Peinture M. Pallière / Cette composition bien disposée explique clairement le sujet ; le paysage est heureusement trouvé, l’entente de la couleur généralement bien conduite, les chairs sont bien peintes, les poses sont naturelles. Cependant celle de l’Argus dans laquelle l’artiste a voulu manifester l’affaiblissement d’un corps abandonné au sommeil, en perd la souplesse par quelque exagération dans les lignes. Par exemple, la tête renversée trop horizontalement s’emmanche mal avec le col trop perpendiculaire ; la poitrine qui est très lumineuse forme encore un angle trop droit avec la partie inférieure du corps trop relevé et d’une couleur sombre, de manière que ce torse bien peint d’ailleurs, [f°1bis] est brisé dans le dessin et dans l’effet. L’emmanchement de la main droite est forcé, la main gauche est d’un ton vineux étranger au reste de la figure. Le pied droit est d’une forme commune, il est moins étudié que les autres parties. / La figure de Mercure est d’une nature trop jeune mais la pose et le dessin ont de l’élégance. Les jambes étant très écartées, les pieds trop parallèlement placés nuisent à l’effet de la stabilité. Cette figure généralement bien peinte parait d’une couleur un peu blafarde. Io, convenablement placée comme motif de l’action pourrait être mieux agencée avec le paysage dont les formes pesantes se confondent avec celles des rochers. Des plantes et des branchages auraient pu tout aussi bien conduire la lumière, et alléger cette partie de la composition. C’est ici que nous remarquons combien l’étude des animaux est délaissée par ceux même qui peignent le mieux le paysage. On voudrait reconnaitre dans les formes de cette métamorphose, ou le style de la simple nature, ou celui de l’art des anciens qui dans cette étude ont trouvé et nous ont donné les plus beaux types d’imitation pour toute espèce d’animaux. C’est ce second style qui convenait au sujet, c’est celui que l’artiste a cherché ; mais comme on n’y arrive qu’en possédant le premier, il n’a pu y atteindre. Malgré ces observations l’on reconnait dans ce tableau un bel ensemble, la recherche d’un bon style et d’heureux effets. M. Pallière que ses divers ouvrages nous montrent comme très appliqué à son art, se corrigera d’autant plus facilement des légers défauts que nous lui faisons observer, qu’on remarque dans sa jolie étude de femme une souplesse de mouvement et de formes où la vérité se fait d’autant mieux sentir qu’on n’y découvre aucun effort pour y atteindre. // Une nymphe chasseresse / par le même / Cette figure nous a paru l’ouvrage le plus satisfaisant de M. Pallière. La pose est heureusement imaginée [f°2] pour présenter un développement de formes et de mouvements agréables, un effet à la fois piquant et vrai. Le dessin en est souple, naturel, gracieux et régulier sauf quelques légères incorrections, qui se font remarquer au départ du bras gauche, à l’avant-bras droit qui est un peu faible près du poignet, et dans la tête, dont la bouche parait se porter un peu vers le côté droit. Du reste cette figure est remarquable par la vérité de la couleur, et particulièrement de celle des ombres ; elle est bien modelée, moelleusement peinte, et les accessoires, ainsi que le paysage sont d’une couleur, d’un effet et d’une exécution convenable pour se lier avec elle et la faire valoir. On pourrait désirer que la lumière placée sur l’arbre, pour détacher le dos fut prolongée à droite par quelques feuilles, afin d’éviter le cercle qu’elle produit autour du dos. Cet ouvrage est un des moins importants, il est vrai, mais il est le plus complet d’harmonie dans ses parties. La nature qui l’a dicté est bien choisie et bien reproduite. // Les pèlerins d’Emaus, copie d’après / le Caravage – par le même // N’ayant pas sous les yeux l’original de cette copie nous nous garderons d’y relever des défauts qui peut-être appartiennent à l’original ; mais comme ils sont nombreux sans être rachetés par des qualités supérieures, on a droit de s’étonner que l’artiste n’ait pas fait un meilleur choix. Il serait sans doute injuste de penser qu’il a cherché à se libérer rapidement d’un devoir imposé par les règlements et l’on doit croire que quelque circonstance particulière a influé sur son choix. Quoiqu’il en soit, nous devons relever l’importance, ou réclamer l’accomplissement de cette partie du devoir des élèves, et leur rappeler que le double but de ce règlement est de faire participer la France à l’étude des chefs d’œuvre de l’Italie, au moyen de copies exactes faites par des hommes habiles et d’imiter davantage ceux-ci aux secrets de la création de ces mêmes chefs d’œuvre, par la nécessité de les reproduire. [f°2bis] Or, ce double intérêt ne commande-t-il pas aux élèves de choisir parmi les nombreux ouvrages dont Rome leur offre l’étude, ceux qui émanés des meilleurs principes peuvent propager les meilleurs directions, ceux surtout, qui par des qualités éminentes s’élèvent à la hauteur du style historique ? Raphaël, Michel-Ange, Jules Romain, le Guide, les Carrache ne sont-ils pas là pour nous donner les plus hautes leçons ? et parmi les maîtres qui les ont précédés ne trouve-t-on pas fréquemment un naturel, une grâce, une délicatesse naïves bien digne d’être reproduites ? Et certes, dans le nombre de leurs ouvrages il en est beaucoup dont la copie n’excéderait pas pour son exécution, le temps que les élèves peuvent et doivent raisonnablement donner à ce travail. L’Académie doit donc recommander l’observation mieux comprise et plus consciencieusement remplie de ce devoir. Conservatrice des principes qui soutiennent l’art dans sa dignité, elle doit prescrire aux élèves d’écarter de leurs pinceaux tout ce qui même dans des chefs d’œuvre, peut tendre à dégrader la représentation de la nature, et si le style est tout l’homme, comme l’a dit Buffon, il faut que cette vérité désormais appliquée aux arts, distingue et élève le peintre français à ses propres yeux, comme à ceux des nations rivales. // Esculape allaité par une chèvre / et trouvé par un berger / par M. Picot / Le sujet choisi par M. Picot comportait un intérêt plus vif que celui qui résulte de sa composition. Nous croyons trouver la raison de ce défaut dans le peu d’importance donné au groupe de l’enfant dans lequel doit résider le sujet et qui rejeté dans un coin du tableau semble y avoir été placé accidentellement et après coup. Il est d’ailleurs par trop négligé de dessin et d’exécution ; il n’en est pas de même de la figure du berger ; elle est simple, naturelle et bien composée. Le fond de paysage [f°3] de ce tableau est extrêmement remarquable dans tous ses rapports. Heureusement imaginé, il est à la fois pittoresque, convenable et naturel. La couleur en est vraie, l’exécution facile et les détails choisis et placés avec goût. Nous n’y reprendrions rien, si les eaux avaient plus de transparence. La draperie est d’un bon style, bien ajustée autour de la figure et, largement peinte. Mais cette figure n’est pas exempte de reproches la tête manque de grâce. La partie inférieure n’est pas heureuse de dessin. On voudrait y voir un mélange de tourment et de joie. Plus de lumière sur les cheveux et moins sur le masque, eut rendu l’effet de la tête plus vrai dans sa position par rapport à la poitrine. Le bras droit ne parait pas venir assez en avant relativement au feuillage qu’il écarte pour découvrir l’objet de la curiosité du pâtre, et ce même bras n’est pas assez bien modelé. La distance de l’une à l’autre jambe nous a paru trop grande. La jambe du fond diminue trop, celle en avant semble trop arquée, et la courbure de l’ombre qui descend sur le tibia en est cause. En général, et malgré ces légères fautes que nous indiquons, cette figure est dessinée d’un bon goût et bien peinte ; mais la couleur est sensiblement jaune, surtout dans la partie supérieure. Sans doute l’influence d’un modèle mal choisi, aura fait naître ce défaut, et le vernis placé trop tôt ainsi que la privation d’air pendant le trajet l’auront augmenté. Quoiqu’il en soit, il est à remarquer que peu des ouvrages envoyés successivement par les pensionnaires de Rome sont satisfaisants sous le rapport de la couleur. Elle s’y montre souvent inanimée, jaune, terne, noir. D’où vient ce vice ? Nous craignons d’en découvrir la cause dans une espèce de dédain pour cette brillante partie de l’art. Nous craignons qu’une négligence répréhensible ne se contente trop souvent et trop facilement d’une couleur quelconque, pourvu qu’elle ait de la force, espérant la justifier ensuite pour la qualification de couleur italienne. Nous n’admettons pas de couleur italienne. Nous regrettons que le temps ait malheureusement altéré celle de beaucoup de chef d’œuvre que nous admirions encore plus, s’ils nous représentaient mieux la nature à cet égard. C’est donc la nature seule qui doit être le but de notre invitation, et cette imitation n’est [f°3bis] louable qu’autant qu’elle s’exerce sur un bon choix. / Au reste, ces observations qui appartiennent plus à des considérations générales qu’à l’examen particulier du tableau de M. Picot, ne nous empêchent pas de reconnaitre dans cet ouvrage une très-louable direction de talent, et comme qualités distinctives, du naturel, de la simplicité, de l’élégance. // Cadmus tuant le dragon / par M. Allaux [sic] / L’exécution d’un sujet qui appartient aux temps héroïques nécessite comme qualités premières et indispensables une grande noblesse de caractère dans les figures, de l’élévation dans les formes, de la résolution dans le dessin et dans l’exécution des différentes parties qui doivent composer le tableau. À juger rigoureusement celui de M. Allaux [sic] d’après ces conditions, il paraîtra faible et encore loin du but ; mais si nous considérons que l’auteur arrive à peine en Italie, nous serons fondés à espérer, d’après les qualités qu’il possède, qu’il acquerra celles qui lui manquent, et que la vue des chefs-d ’œuvres de l’Antiquité, en lui faisant envisager la nature plus grandement, donnera à son talent cette force, cette élévation sans laquelle il n’est point de peinture héroïque. Nous trouvons donc que la figure de Cadmus marque de ce grand caractère d’ensemble et de formes qui annonce un héros, et qui, s’il y eut été, aurait justifié le calme de son expression, en le montrant en quelque sorte supérieure à son action. Il y emploie trop de forces et c’est ce qui l’affaiblit aux yeux du spectateur. Mais après avoir examiné le tableau de M. Allaux [sic] relativement à ce qu’il aurait dû être, il est juste de convenir que comme elle, sa figure offre beaucoup de parties fort louables et un ensemble assez satisfaisant. L’étude sincère de la nature s’y montre partout, et décèle un talent docile à la voix des conseils et des exemples qui pourra recevoir des chefs d’œuvres qui vont l’environner. Nous lui indiquerons les principales erreurs de ce dessin que nous avons remarquées. [f°4] La tête de la figure n’est pas parfaitement attachée sur le vol. Les traits trop peu développés affaiblissent le caractère de manière que l’expression, quoique noble, y produit peu d’effet. Les bras sont bien étudiés, bien colorés, bien peints mais un peu petits. La jambe et le pied en avant sont également remarquables par la vérité et l’étude ; mais l’articulation du pied est trop longue. En général et nous le répétons, le mérite de cette figure produit peu d’effet par le défaut de grandeur dans le caractère de la forme mais elle est cependant remarquable par la vérité, l’étude, une couleur harmonieuse et vraie. Le fond se ressent de la précipitation que l’auteur a mise à s’acquitter de son devoir, aussitôt son arrivée. Le ciel est lourd, les rochers sont plats et le site manque de cet aspect sauvage qui convenait à un pareil sujet. On désirerait plus d’agitation et de désordre dans les objets qui le composent. // Cyparisse / par M. Vinchon / Le Groupe de Cyparisse et sa biche se réfugiant dans ses bras au moment où il vient de la blesser par mégarde, offre du sentiment et de la grâce, mais une draperie défectueusement placé pour la forme générale du groupe altère le motif de cet ensemble et en affaiblit l’intérêt. L’auteur s’était donné, il est vrai, une tâche difficile en voulant représenter l’abattement et le fléchissement spontanés de deux êtres accourus l’un vers l’autre pour confondre leur douleur. Plus de délicatesse dans l’exécution aurait fait saisir cette pensée touchante. / La pose offre plutôt un mouvement voulu par l’artiste que donner par la nature, car il est difficile que tout le poids de ce groupe repose sur une seule partie du pied droit. La jambe gauche étant étendue d’une manière inutile à l’effet de la stabilité. / La nature de Cyparisse n’est pas assez adolescente, le dessin a le défaut qu’on ne saurait trop signaler, de [f°4 bis] séparer la vérité de l’élévation dans le style, tandis qu’on voit que les plus célèbres figures antiques semblent moulées sur la plus belle nature. Le dos déjà trop arrondi est surchargé de cette draperie qui par sa forme de besace gâte toute celle du groupe ; et le rend carré au lieu de la forme pyramidale plus heureuse et qui lui était naturelle. La main droite est roide ; le pied gauche est lourd ; mais l’aspect général de ce tableau est d’un bon effet, a de l’harmonie, de l’expression ; le coloris en est suave quoique un peu laqueux, le paysage bien composé et bien peint. Cet ouvrage fait espérer une facile amélioration dans le talent de l’auteur. // Un homme tuant un serpent / par M. Forestier / Cette figure d’étude montre la vigueur dans le sentiment et l’exécution. On voudrait que tant d’efforts fussent plus justement appliqués ; l’ardeur de bien faire éclate de tous côtés, mais elle a tourmenté l’artiste, l’ouvrage et le modèle. / Si l’on recommande l’unité dans l’action d’un tableau, avant tout, on entend que la structure d’une figure aura la sienne ; que le choix d’action, de nature et d’âge étant fait, toutes les parties fidèles à ces conditions formeront un tout qui semblera sorti du même jet. / L’action représentée ici parait celle de tirer avec force quelque chose qui résiste tellement, que la figure en perd l’aplomb, mais en apercevant le reptile saisis et se débattant dans l’aire, le contrepoids ou la résistance voulue n’existe plus et la figure tombe. Tant de mouvement et d’énergie ne semblent même pas suffisamment motivés. Enfin, on reconnait trop les moyens employés pour maintenir le modèle dans sa pose, et les contractions partielles demandées pour mieux étudier telle ou telle partie, moyens qui deviennent [f°5] deviennent très vicieux, lorsque l’artiste, ne les fait pas concorder avec le mouvement du sujet. / La tête et le col sont d’une nature plus jeune que le reste du corps, le torse est forcé d’action et d’effet, les bras ne sont pas de la même nature, le droit est trop court. Du reste, on remarque de la chaleur dans le coloris et de la verve dans le pinceau ; le fond et le terrain trop sombres rentrent un peu dans le défaut déjà reprocher au tableau d’Anacréon du même auteur, mais l’on se rappelle aussi, que dans cet ouvrage, la figure de l’amour d’un dessin agréable et d’une belle exécution avait cette concordance de forme et de nature qui manque ici. M. Forestier n’a donc besoin que d’un retour sui lui-même pour éviter à l’avenir les défauts dont nous avons parlé. / Signé Gros, Guérin.
Localisations
Institution :
Cote / numéro :
20180401/1-1, fol. 1-12
Source
source : Institut national d'histoire de l'art (France) - licence : Attribution 4.0 International (CC BY 4.0)
Rédacteur
France Lechleiter