[1838, peinture, rapport Institut à AFR]Rapport sur les envois de peinture de 1838TYPE : rapport de [...]
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Description
[1838, peinture, rapport Institut à AFR]
Rapport sur les envois de peinture de 1838
TYPE : rapport de l'Institut de France à Académie de France à Rome
AUTEUR : Anonyme
PAGE DE TITRE : Institut Royal de France // Académie des Beaux-Arts // Rapport sur les travaux envoyés de Rome par MM. les Élèves-Pensionnaires de l’Académie de France, pour l’année 1837.
LIEU DE REDACTION : Paris
DATE : 1838
Rapport sur les envois de peinture de 1838
TYPE : rapport de l'Institut de France à Académie de France à Rome
AUTEUR : Anonyme
PAGE DE TITRE : Institut Royal de France // Académie des Beaux-Arts // Rapport sur les travaux envoyés de Rome par MM. les Élèves-Pensionnaires de l’Académie de France, pour l’année 1837.
LIEU DE REDACTION : Paris
DATE : 1838
Descriptions
Transcription :
[f°515] Des idées erronées, des systèmes vagues et sans fondements, avaient attaqué toutes les opinions sur les beaux-arts, et les principes qui en ont dirigé les études chez les différentes nations, aux diverses époques où ils ont été cultivés. Il en était résulté, depuis quelque temps, de graves déviations qui pouvaient amener certaine décadence dans l'École française. De brillants succès que l’on peut croire mérités, obtenus par des dispositions particulières, indépendantes des études classiques, avaient pu faire rêver à de nouvelles facultés, à des moyens plus prompts ou plus faciles d'arriver aux honneurs et à la fortune [f°515bis] plus rapidement. On n’allait pas à moins qu’à proposer d’anéantir les établissements si sagement fondés pour le maintien des bonnes études et l’entretien du feu sacré. / De là pouvait naître une apathie, une indifférence pour les études et pour les avantages de la pension à Rome. Ceux qui avaient eu le bonheur d’y être admis, regardaient comme un exil, comme perdues pour leur avenir, ces années qu’il leur été donné d’y passer ; ils tardaient à s’y rendre ou désertaient cette terre, si éminemment classique. / Cette sorte de découragement a cessé : la pension à l’Académie de France à Rome, est au complet ; les élèves pensionnaires rivalisent de zèle ; les bonnes études sont reprises avec courage, et l'Académie aime à les féliciter de leurs efforts. Elle y retrouve avec plaisir une tendance aux progrès, principalement en peinture et en architecture. Les jeunes architectes surtout montrent dans leurs travaux de restauration une profondeur de recherches, un travail infatigable et un talent digne des plus grands éloges. // Section de Peinture / [f°516] // M. Flandrin (5e et dernière année de pension) // M. Flandrin, pour sa cinquième et dernière année, devait un tableau d'histoire de sa composition, de plusieurs figures de grandeur naturelle. / Il a envoyé un tableau de Jésus-Christ et les petits enfants. / " On lui présenta des petits enfants, afin qu'il leur imposât les mains ; et comme ses disciples les repoussaient rudement, Jésus leur dit : Laissez venir à moi les petits enfants, car le royaume des cieux est à ceux qui leur ressemblent. Et les ayant embrassés, il les bénit en leur imposant les mains. " / (Saint Marc, chap. X, verset 13) / L'Académie reconnaît dans ce bel ouvrage une sage composition, un style grave et d'un grand caractère. Ce sujet, bien choisi, offre la plus heureuse réunion de moyens propres à développer toutes les ressources de l'art et l'emploi des modèles les plus intéressants que présente la nature pour animer cette scène, pleine d'un intérêt religieux et pieusement [f°516bis] philosophique. / Le dessin est d'une grande correction. On regrette de ne pouvoir louer avec tant d'extension la couleur et l'intelligence de l'effet. / On ne peut voir sans peine que ce jeune artiste ne soit pas rappelé les éloges que l'Académie s'était plu à lui adresser sur son tableau du Dante où l’on reconnaissait un véritable coloriste, tel qu’il convient à la peinture historique. / Dans celui-ci, le ton général de la couleur est lourd et privé de lumière ; les tons opaques des ombres se confondent avec ceux du fond, et détruisent la perspective aérienne. / Le devant de la scène est obstrué par les deux femmes à genoux, affublées, pour ainsi dire, du même manteau qui enveloppe leurs têtes symétriquement et ne laisse rien voir de leurs traits ; ce qui prive cette touchante scène de l'expression de la foi vive, de l'amour et du respect de ces mères qui présentent leurs enfants. Leurs ajustements trop amples répond sur ces jeunes créatures, figures principales du tableau, une ombre qui les dérobe et empêche de les distinguer à la première vue. / Malgré ces observations qu’aurait dû se faire à lui-même M. Flandrin en méditant [f°517] plus profondément toute la portée de son sujet, ce tableau lui fait grand honneur et termine d'une manière bien louable ses études de pensionnaire. // M. ROGER / (4e année) / M. Roger, pour sa quatrième année devait la copie d'un tableau, ou de fragments peints ou dessinés de trois figures au moins de grandeur naturelle d'après les fresques ou les originaux des grands peintres, plus une composition ou esquisse peinte de deux pieds au moins et ne comprenant pas moins de 12 figures. / M. Roger a envoyé la copie d'une fresque du Titien dans la scuola del Santo di Padoua. / On ne peut que le blâmer d'être allé chercher si loin un sujet qui a, sans doute du mérite, étant du Titien, mais qui ne pouvait lui offrir aucune de ces précieuses qualités de ce grand maître et dont il lui aurait été si utile de faire une bonne copie. Au lieu de l'esquisse obligée, M. Roger a envoyé un tableau représentant Moïse défendant les filles de Jéthro contre [f°517bis] les bergers du Madian. / La composition de ce tableau est assez pittoresque. Le côté des hommes, dont les lignes sont heureuses, est fort bien senti, quoique la pose de Moïse soit un peu théâtrale. / Le groupe des femmes ne semble prendre aucune part à la scène ; elles sont absolument dépourvues d’expression, e qui jette beaucoup de froideur sur cette partie de la composition. / On peut reprocher à cet ouvrage un dessin petit et manquant du caractère qui convient à l’histoire. La couleur blanche seule, adoptée pour les femmes et pour le manteau de Moïse, répand sur l’ensemble de la froideur et de la monotonie. / Les teintes du fond et celles du terrain sur les premiers plans, sont trop les mêmes et nuisent à l'effet général. // M. Jourdy (3e année) / M. Jourdy devait, pour sa troisième année, une figure peinte de grandeur naturelle ; plus, une esquisse peinte ou dessinée. / On reprochera à M. Jourdy de n'avoir [f°518] pas joint à sa figure peinte l'esquisse exigée. L'Académie reconnaît que l'envoi de cette année est beaucoup plus satisfaisant, et que cet élève a fait de sensibles progrès. / En demandant aux Pensionnaires une figure nue, peinte de grandeur naturelle, s’il n’est pas textuellement exprimé que ce doit être une figure d’homme, cela est suffisamment sous-entendu. Quoiqu’il en soit sa figure de femme est d'un bon goût de dessin ; la pose est gracieuse et simple, les chairs sont bien modelées, mais cet ouvrage pèche par le coloris dont les teintes sont lourdes et violacées. / On désirerait que cette figure, qui a du mérite sous le rapport de l'étude, eut plus de fermeté dans les extrémités inférieures. // M. Papéty (1re année) / M. Papéty devait, pour sa première année, une figure peinte de grandeur naturelle, plus, 4 figures dessinées d'après le modèle vivant, et 2 d'après l'antique. / Ce Pensionnaire a joint à la [f°518bis] figure d'étude un tableau représentant Moïse sauvé des eaux. / Quoique ce dernier ouvrage soit envoyé en sus des travaux exigés par le règlement, on doit reprocher à M. Papety de n'avoir point envoyé les dessins demandés. Il ne pouvait s'en croire dispensé par l'envoi de son tableau de Moïse. / Dans la figure académique, on reconnaît un dessin fort et bien modelé. Il est fâcheux qu'il n'y ait de lumière que sur la poitrine ; les extrémités en sont privées. / On regrette de ne pas trouver dans cette étude les heureuses dispositions à la couleur qu'annonçaient les débuts de ce jeune élève. / Le tableau représentant Moïse sauvé des eaux, offre une scène d'une composition gracieuse, dans laquelle on remarque les détails d'un goût élégant et de la recherche dans les ajustements et les accessoires. Le dessin est correct et élégant, l'exécution fine et habile, mais il faut rappeler à l'auteur que l'effet du jour, surtout dans un tableau d'histoire, doit toujours être pris de manière à mettre en plus grande évidence les figures qui le composent ; [f°519] c'est donc manquer à ce principe, suivi par les plus grands maîtres, que de choisir, sans nécessité, l'instant où les personnages ne peuvent plus prendre de lumière et ne se détachent sur le fond que comme des ombres. // M. Blanchard (1re année) / M. Blanchard, pour sa première année avait les mêmes obligations à remplir. / Les figures dessinées d'après nature et celles d'après l'antique n'ont point été faites. / M. Blanchard a joint à sa figure académique un Caton d'Utique, en sus de ses obligations ; mais n'ayant pas fourni les dessins exigés par le règlement, il doit être également blâmé. / On regrette de ne pouvoir donner quelques éloges à sa figure d'étude, qui est mal conçue, sans harmonie de lignes, et dont la pose ne pouvait convenir au développement du modèle. / Le dessin est pauvre et incorrect, la couleur triste et les ombres lourdes manquent de transparence. [f°519bis] La figure du Caton d'Utique un peu mieux composée, ne présente rien du caractère et de l'idée qu’on se forme de ce grand personnage. Le ton du tableau, en général, est faux et lourd ; l'exécution en est faible. / Après un examen scrupuleux des tableaux envoyés cette année, après les éloges et les conseils donnés sur chacun d'eux, l'Académie a peine à se dissimuler l'impression que lui fait éprouver l'aspect général de cet envoi. On y remarque une négligence blâmable de ce qui constitue surtout la vérité de la couleur, et l'intelligence des différents effets de la lumière. / Une nuance terne et opaque domine dans les ombres de tous ces tableaux ; ils semblent n’être éclairés que par le crépuscule. / Ce n'est pas certainement dans les belles peintures de Raphaël, de Titien, de Paul Véronèse, du Dominiquin, que les pensionnaires rencontrent ces teintes obscures et fausses, encore bien moins sur la nature si riche et si brillante que, depuis quelque temps, ils semblent ne regarder qu’à travers un voile noir. / Si un seul d’entre eux avait contracté ce défaut, on l’en avertirait et on ne pourrait l’attribuer [f°520] qu’à un vice de son organisation visuelle ; mais il parait ici une sorte de système, une sorte de convention d’un défaut qui n’est racheté par aucune qualité. S’il est le résultat de la manière de voir de l’un des Coryphées, ses émules ne doivent pas s’efforcer de se l’approprier. C’est une grande abnégation que de se trainer ainsi dans une voie fausse. / Chaque maître des grandes écoles d'Italie a eu son caractère à lui qui le distingue. C'est donc une raison pour que chaque artiste suive l'impulsion naturelle de son génie, et se doive garder d'adopter, par préjugé, une marche dont il ne trouverait pas d'exemple dans la nature.
Localisations
Institution :
Cote / numéro :
20180612/1-247, fol. 514-529
Source
source : Institut national d'histoire de l'art (France) - licence : Attribution 4.0 International (CC BY 4.0)
Rédacteur
France Lechleiter