L’applique dorée du Christ est clouée au bois vert de la Croix, au centre de la croisée ovale, par les mains et les pieds. Le Christ se tient debout, frontalement, les bras légèrement fléchis, les yeux ouverts (en perles d’émail bleu foncé) ; sur sa tête, entourée d’un nimbe crucifère polychrome, une couronne royale ornée de décors gravés. Ses longs cheveux encadrent son visage, légèrement incliné. Le périzonium, noué sur la hanche gauche, descend jusqu’aux genoux presque superposés. Ainsi, sa silhouette s’incurve légèrement en S. Les pieds, ouverts en forme de V, reposent sur un suppedaneum bleu ponctué de rouge. Le titulus IHS est gravé sur un bandeau rectangulaire au-dessus du nimbe. Le fond bleu moyen est constellé de vifs décors, tels que rosettes, disques, losanges émaillés en plusieurs tons (rouge, bleu foncé, vert, jaune/rouge, bleu clair et foncé, blanc).

Une double bordure bleu et blanche, ourlée d’un filet en réserve pointillée, court le long de la croix, qui comporte seize trous de fixation servant à la clouer à l’âme de bois. Un rinceau en réserve, doré et gravé, parcourt la croix intérieure, indiquant que la croix de la Crucifixion est aussi la Croix de Vie et l’Arbre de Vie. L’élément qui impulse la vie est le bourgeon ou la racine situé entre les pieds du Christ, émergeant du tombeau d’Adam ; pourtant l’iconographie de ce dernier est réduite à quelques ‘pierres’ en forme de losanges, qui évoquent le tombeau sur la colline du Golgotha.

La plaque appartient à une importante série de croix limousines représentant le Christ Roi, crucifié mais victorieux, couronné et vivant, qui succède au type iconographique du Christ souffrant, non couronné et mort. L’iconographie du Christ couronné est particulièrement répandue en Scandinavie, probablement parce que sa diffusion fut contemporaine de la construction massive d’églises dans le Nord de l’Europe au XIIIe siècle, ce qui entraina une commande importante de mobilier liturgique. Parmi les plaques et les appliques de Christ conservées en Norvège, les suivantes sont à rapprocher de l’œuvre présentée ici : Borgarsyssel Museum, Sarpsborg (provenant de l’église Saint-Nicolas de Sarpsborg) ; église de Røsvik, Nordland (provenant de l’église de Rørstad) ; Norges teknisk- og naturvitenskapelige universitet, NTNU, Vitenskapsmuseet, N207327:7 (provenant de l’église Saint Clément, Trondheim) ; Oslo, Kulturhistorisk museum, C21416, provenant d’une église inconnue. En Suède: Stockholm, Historiska museet, SHM 18616:1 (provenant d’une église de Västra Broby, Scanie). Au Danemark : Copenhague, Nationalmuseet, D991 (provenant d’une église inconnue) ; Copenhague, Nationalmuseet, D2398 (provenant d’une église inconnue) ; Copenhague, Nationalmuseet, D321/1996 (provenant d’une église de Skælskør, Seelande), cf. Solhaug 2005: 137-150, figs. 4-6

La simplification stylistique du mont Golgotha, caractéristique de la production post 1200, ainsi que la position légèrement tournée du Christ suggèrent une datation après 1210. Toutefois, la palette chromatique riche, l’excellente exécution technique de la couronne et le décor pointillé des réserves indiquent que la plaque fut réalisée quand le niveau qualitatif des ateliers limousins était encore élevé, avant 1225.

IHS

Réputée avoir été retrouvée dans le district ecclésiastique de Jelsa, Rogaland, Norvège. Probablement ab antiquo dans l’église de Jelsa. Achetée par le Danmarks Nationalmuseum, Copenhague, à un marchand d’art anonyme en 1842. L’église de Jelsa, une construction en bois, fut érigée au XIIIe siècle ; une petite église en bois fut construite sur le même site en 1647 puis agrandie en 1959. En 1997, Peter Henriksen (Nationalmuseet, Copenhague) a réalisé une réplique de la plaque pour l’église de Jelsa, constituée de cuivre doré et de résine Epoxy : elle a été fixée sur la croix processionnelle de l’église.