[1817, peinture, rapport Institut procès-verbal]Rapport officiel de l'Institut sur les envois de pei [...]
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Description
[1817, peinture, rapport Institut procès-verbal]
Rapport officiel de l'Institut sur les envois de peinture pour l'année 1817
TYPE : rapport de l'Institut de France - officiel
PAGE DE TITRE : Séance du 11 octobre 1817 // MM. Gros et Guérin font deux lectures de leur rapport sur les ouvrages des peintres pensionnaires à l’École de Rome. Ce rapport est mis aux voix et adopté. Il fera partie du rapport général qui sera envoyé à M. le Directeur de l’École Royale de France à Rome. //
LIEU DE REDACTION : Paris
DATE : 11/10/1817
Rapport officiel de l'Institut sur les envois de peinture pour l'année 1817
TYPE : rapport de l'Institut de France - officiel
PAGE DE TITRE : Séance du 11 octobre 1817 // MM. Gros et Guérin font deux lectures de leur rapport sur les ouvrages des peintres pensionnaires à l’École de Rome. Ce rapport est mis aux voix et adopté. Il fera partie du rapport général qui sera envoyé à M. le Directeur de l’École Royale de France à Rome. //
LIEU DE REDACTION : Paris
DATE : 11/10/1817
Descriptions
Transcription :
[p. 226] M. Vinchon Cyparissse / Le groupe de Cyparisse et la biche se réfugiant dans ses bras au moment où il vient de la blesser par mégarde, offre du sentiment et de la grâce, mais une [p. 227] draperie défectueusement placée pour la forme générale du groupe attire la rapidité du blâme et fait délaisser un motif plein d'intérêt. L'auteur s'était donné il est vrai, une tâche difficile en voulant représenter l'abattement et le fléchissement spontanés des deux êtres accourus l'un vers l'autre pour confondre leur douleur. Plus de délicatesse dans l'exécution aurait fait saisir cette pensée touchante. / La pose offre plutôt un mouvement voulu par l'artiste que donné par la nature, car il est difficile que tout le poids de ce groupe repose sur une seule partie du pied droit, la jambe gauche étant étendue d'une manière inutile à la stabilité. La nature de Cyparisse n'est pas assez adolescente, le dessin accuse ce défaut trop fréquent de séparer la vérité de l'élévation tandis que les plus célèbres figures antiques semblent moulées sur la plus belle nature. / Le dos déjà trop arrondi est surchargé de cette draperie qui par sa forme de besace gâte toute celle du groupe et le rend carré au lieu de la forme pyramidale plus heureuse et qui lui était naturelle. La main droite est roide, le pied gauche est lourd mais l'aspect général de ce tableau est d'un bon effet a de l'harmonie, de l'expression, le coloris en est suave quoique un peu laqueux, le paysage bien composé et bien peint. Cet ouvrage fait espérer une facile amélioration dans le talent de l'auteur. // M. Forestier / Un homme tuant un serpent / Cette figure d'étude montre de la vigueur dans le sentiment et l'exécution. On voudrait que tant d'efforts fussent plus justement appliqués, l'ardeur de bien faire éclate de tous côtés, mais elle a tourmenté l'artiste, l'ouvrage et le modèle. / Si l'on recommande l'unité dans l'action d'un tableau, avant tout, on entend que la structure d'une figure aura la sienne ; que le choix d'action, de nature et d'âge étant fait, toutes les parties fidèles à ces conditions formeront un tout qui semblera sortir du même jet. L'action représentée ici paraît celle de tirer avec force quelque chose qui résiste tellement, que la figure en perd l'aplomb mais en apparence le reptile saisi et se débattant dans l'air, le contrepoids ou la résistance voulue n'existe plus et la figure tombe. Tant de mouvement et d'énergie ne semblent [p. 228] même pas suffisamment motivés. Enfin, on reconnaît trop les moyens employés pour maintenir le modèle dans sa pose, et les contractions partielles demandées pour mieux étudier telle ou telle partie, moyens qui deviennent très vicieux, lorsque l'artiste ne les fait pas concorder avec le mouvement du sujet. / La tête et le col sont d'une nature plus jeune que le reste du corps, le torse est forcé d'action et d'effet, les bras ne sont pas de la même nature, le droit est trop court. Du reste, on remarque de la chaleur dans le coloris et de la verve dans le pinceau, le fond et le terrain trop sombres, rentrent un peu dans le défaut déjà reproché au tableau d'Anacréon du même auteur, mais l'on se rappelle aussi que dans cet ouvrage, la figure de l'Amour d'un dessin agréable et d'une belle exécution, avait cette concordance de forme et de nature qui manque ici. M. Forestier n'a donc besoin que d'un retour sur lui-même, pour éviter à l'avenir les défauts dont nous avons parlé. // M. Pallière / Une nymphe chasseresse / Cette figure nous a paru l'ouvrage le plus satisfaisant de M. Pallière. La pose est heureusement imaginée pour présenter un développement de formes et de mouvements agréables, un effet à la fois piquant et vrai. Le dessin en est souple, naturel, gracieux et régulier sauf quelques légères incorrections qui se font remarquer au départ du bras gauche, à l'avant-bras droit qui est un peu faible près du poignet, et dans la tête dont la bouche paraît se porter un peu vers le côté droit. Du reste cette figure est remarquable par la vérité de la couleur et particulièrement par celle des ombres ; elle est bien modelée, moelleusement peinte, et les accessoires ainsi que le paysage sont d'une couleur et d'un effet et d'une exécution convenables pour se lier avec elle et la faire valoir. On pourrait désirer que la lumière placée sur l'arbre pour détacher le dos fût prolongée à droite par quelques feuilles afin d'éviter le cercle qu'elle produit autour du dos. Cet ouvrage est un des moins importants il est vrai mais il est le plus complet d'harmonie dans ses parties. [p. 229] La vérité qui l'a dictée est bien choisie et bien reproduite. // Les Pèlerins d'Emmaüs, copie d'après le Caravage, par le même. / N'ayant pas sous les yeux l'original de cette copie nous nous garderons d'y relever des défauts qui peut-être appartiennent à l'original, mais comme ils sont nombreux sans être rachetés par des qualités supérieures on a droit de s'étonner que l'artiste n'ait pas fait un meilleur choix, il serait sans doute injuste de penser qu'il a cherché à se libérer promptement d'un devoir imposé par les règlements et l'on doit croire que quelque circonstance particulière a influé sur son choix. Quoiqu'il en soit nous devons relever l'importance ou réclamer l'accomplissement de cette partie du devoir des élèves et leur rappeler que le double but de ce règlement est de faire participer la France à l'étude des chefs-d’œuvre d'Italie au moyen de copies exactes faites par des hommes habiles et d’initier davantage ceux-ci au secret de la création de ces mêmes chefs-d’œuvre par la nécessité de les reproduire. Or ce double intérêt ne commande-t-il pas aux élèves de choisir parmi les nombreux ouvrages dont Rome leur offre l'étude ceux qui émanés des meilleurs principes peuvent propager les meilleures directions ? Ceux, surtout, qui, par des qualités éminentes s'élèvent à la hauteur du style historique ? Raphaël, Michel-Ange, Jules Romain, le Guide, les Carraches ne sont-ils pas là pour donner les plus hautes leçons ? Et parmi les maîtres qui les ont précédés ne trouve-t-on pas fréquemment un naturel, une grâce, une délicatesse naïve bien dignes d'être reproduites. Et certes, dans le nombre de leurs ouvrages, il en est beaucoup dont toute la copie n'en céderait pas pour son exécution le temps que les élèves peuvent et doivent raisonnablement donner à ce travail. L 'Académie doit donc recommander l'observation mieux comprise et plus consciencieusement remplie de ce devoir. Conservatrice des principes qui soutiennent l'art dans sa dignité, elle doit prescrire aux élèves d'écarter de leurs pinceaux tout ce qui même dans des chefs-d’œuvre peut tendre à dégrader la représentation de la nature et [p. 230] si le style est tout l'homme, ainsi que l'a dit Buffon, il faut que cette vérité désormais appliquée aux arts distingue et élève le peintre français à ses propres yeux comme à ceux des nations rivales. // M. Picot / Esculape allaité par une chèvre et trouvé par un berger /Le sujet choisi par M. Picot comportait un intérêt plus vif que celui qui résulte de sa composition. Nous croyons en trouver la raison dans le peu d'importance donné au groupe de l’enfant dans lequel doit résider le sujet et qui, rejeté dans un coin du tableau, semble y avoir été placé accidentellement et après coup. Il est d'ailleurs par trop négligé de dessin et d'exécution. Il n'en est pas de même de la figure du berger ; elle est simple, naturelle et bien composée. Le fond du paysage de ce tableau est extrêmement remarquable dans tous ses rapports. Heureusement imaginé, il est à la fois pittoresque, convenable et naturel. La couleur en est vraie, l'exécution facile et les détails choisis et placés avec goût. Nous n'y reprendrions rien, si les eaux avaient plus de transparence, la draperie est d'un bon style, bien ajustée autour de la figure et largement peinte. Mais cette figure n'est pas exempte de reproches. La tête manque de grâce ; la partie inférieure n'est pas heureuse de dessin. On voudrait y voir un mélange d'étonnement et de joie ; plus de lumière sur les cheveux et moins sur le masque eut rendu l'effet de la tête plus vrai dans sa position par rapport à la poitrine. Le bras droit ne paraît pas mis assez en avant relativement au feuillage qu'il écarte pour découvrir l'objet de la curiosité du pâtre et ce même bras n'est pas assez bien modelé. La distance de l'une à l'autre jambe nous a paru trop grande. La jambe du fond diminue trop ; celle en avant semble trop arquée et la couleur de l'ombre qui descend sur le tibia en est cause. En général et malgré ces légères fautes que nous indiquons, cette figure est dessinée d'un bon goût et bien peinte, mais la couleur est sensiblement [p. 231] jaune, surtout dans la partie supérieure. Sans doute l'influence d'un modèle mal choisi aura fait naître ce défaut et le vernis placé trop tôt ainsi que la privation d'air pendant le trajet l'auront augmenté. Quoiqu'il en soit, il est à remarquer que peu des ouvrages envoyés successivement par les pensionnaires de Rome sont satisfaisants sous le rapport de la couleur. Elle s'y montre souvent inanimée, jaune, terne, noire. D'où vient ce vice ? Nous craignons en découvrir la cause dans une espèce de dédain pour cette brillante partie de l'art. Nous craignons qu'une négligence répréhensible où se contente trop souvent et trop facilement d'une couleur quelconque pourvu qu'elle ait de la force, espérant la justifier ensuite par la qualification de couleur italienne. Nous n'admettons pas de couleur italienne. Nous regrettons que le temps ait malheureusement altéré celle de beaucoup de chefs-d’œuvre que nous admirerions encore plus s'ils nous représentaient mieux la nature à cet égard. C'est donc la nature seule qui doit être le but de notre imitation et cette imitation n'est louable autant qu'elle s'exerce sur un bon choix. / Au reste, ces observations qui appartiennent plus à des considérations générales qu'à l'examen particulier d'un tableau de M. Picot ne nous empêchent pas de reconnaître dans cet ouvrage une très louable direction de talent et comme qualités distinctives, du naturel, de la simplicité, de l'élégance. // M. Allaux [sic] Cadmus tuant le dragon / L'exécution d'un sujet qui appartient aux temps héroïques nécessite comme qualités premières et indispensables, une grande noblesse de caractère dans les figures, de l'élévation dans les formes, de la résolution dans le dessin et dans l'exécution des différentes parties qui doivent composer le tableau. À juger rigoureusement celui de M. Allaux [sic] d'après ces conditions, il paraîtra faible et encore loin du but. Mais si nous considérons que l'auteur arrive à peine en Italie nous serons fondés à espérer d'après les qualités qu'il possède qu'il acquerra celles qui lui manquent, et que la vue des chefs-d’œuvre de l'antiquité en lui fesant [sic] envisager la nature plus grandement [p. 232] donnera à son talent cette force, cette élévation sans laquelle il n'est point de peinture héroïque. Nous trouvons donc que la figure de Cadmus manque de ce grand caractère d'ensemble et de formes qui annonce un héros et qui, s'il y eut été, aurait justifié le calme de son expression en le montrant en quelque sorte supérieur à son action. Il y emploie trop de forces et c'est ce qui l'affaiblit aux yeux du spectateur ; mais après avoir examiné le tableau de M. Allaux [sic] relativement à ce qu'il aurait dû être il est juste de convenir que, comme elle est, sa figure offre beaucoup de parties fort louables et un ensemble assez satisfaisant. L’étude sincère de la nature s'y montre partout et décèle un talent docile à la voix des conseils et des exemples qu'il pourra recevoir des chefs-d’œuvre qui vont l'environner. Nous lui indiquerons les principales erreurs de dessin que nous lui avons remarquées. La tête de la figure n'est pas parfaitement attachée sur le col ; les traits trop peu développés affaiblissent le caractère de manière que l'expression, quoique noble, y produit peu d'effet. Les bras sont bien étudiés, bien colorés, bien peints mais un peu petits. La jambe et le pied en avant sont également remarquables pour la vérité et l'étude mais l'articulation du pied est trop longue. En général, et nous le répétons, le mérite de cette figure, produit peu d'effet par le défaut de grandeur dans le caractère de la forme ; mais elle est cependant remarquable par la vérité, l'étude, une couleur harmonieuse et vraie. Le fond se ressent de la précipitation que l'auteur a mise à s'acquitter de son devoir aussitôt son arrivée. Le ciel est lourd, les rochers sont plats, et le site manque de cet aspect sauvage qui convenait à un pareil sujet. On désirerait plus d'agitation et de désordre dans les objets qui le composent. // M. Pallière / Mercure ayant endormi Argus est prêt à le frapper / Cette composition bien disposée explique clairement le [p. 231] sujet, le paysage est heureusement trouvé, l'entente de la couleur généralement bien conduite, les chairs sont bien peintes, les poses naturelles. Cependant celle de l'Argus dans laquelle l'artiste a voulu manifester l'affaissement d'un corps abandonné au sommeil, en perd la souplesse par quelque exagération dans les lignes. Par exemple, la tête renversée trop horizontalement s'emmanche mal avec le col trop perpendiculaire, la poitrine qui en est très lumineuse forme encore un angle trop droit avec la partie inférieure du corps trop relevée et d'une couleur sombre, de manière que ce torse bien peint d'ailleurs, est brisé dans le dessin et dans l'effet. L'emmanchement de la main droite est forcé, la main gauche est d'un ton veineux étranger au reste de la figure. Le pied droit est d'une forme commune et moins étudié que les autres parties. / La figure de Mercure est d'une nature trop jeune, mais la pose et le dessin ont de l'élégance. Les jambes étant très écartées, les pieds trop parallèlement placés nuisent à l’aspect de la stabilité. Cette figure généralement bien peinte, paraît d'une couleur un peu blafarde. Io, convenablement placée comme motif de l'action, pourrait être mieux agencée avec le paysage. La pesanteur de ses formes et celles des rochers se confondent, des plantes et des branchages auraient pu tout aussi bien conduire la lumière et alléger cette partie de la composition. C'est ici que nous remarquons combien l'étude des animaux est délaissée par ceux même qui peignent le mieux le paysage. On voudrait reconnaître dans les formes de cette métamorphose ou l'accent de la simple nature ou celui des Anciens qui dans cette étude ont trouvé et nous ont donné à jamais le type le plus noble d'imitation pour toute espèce d'animaux. C'est ce second accent qui convenait au sujet, c'est celui que l'artiste a cherché, mais comme on y arrive qu'en possédant le premier, il n'a pu y atteindre. / Malgré ces observations, l'on reconnaît dans ce tableau un bel ensemble, la recherche d'un bon style et d'heureux effets. M. Pallière que ses divers ouvrages nous montrent comme très assidu à son art, se corrigera d'autant plus facilement de ce que nous avons dû observer, qu'on remarque dans sa jolie étude de femme, une souplesse [p. 232] de mouvement et de forme où la vérité n'est point tourmentée par l'ardeur de bien faire.
Localisations
Institution :
Cote / numéro :
Académie des beaux-arts, 2 E 6
Source
source : Institut national d'histoire de l'art (France) - licence : Attribution 4.0 International (CC BY 4.0)
Rédacteur
France Lechleiter