Aller au contenu principal

[1821, peinture, rapport Institut primitif 1]Rapport primitif de l'Institut sur les envois de 1821, [...]

Statut
Publiée
Contributeur
system
Dernière modification
02/12/2021 10:47 (il y a plus de 2 ans)
Type de document
Description
[1821, peinture, rapport Institut primitif 1]
Rapport primitif de l'Institut sur les envois de 1821, peinture
TYPE : rapport de l'Institut de France - primitif
AUTEUR : Commission de l'Académie des Beaux-Arts
PAGE DE TITRE : Rapport de la commission chargée de rendre compte des ouvrages des Mrs Coignet [sic] et Dubois
LIEU DE REDACTION : Paris
DATE : 1821
Descriptions
Transcription : 
[f°1, r°] Rapport de la commission chargée de rendre compte des ouvrages des Mrs Coignet [sic] et Dubois. Métabus poursuivi par les Volsques et arrêté dans sa fuite par un fleuve rapide invoque la protection de Diane en faveur de sa fille Camille qu'il vient d'attacher à son javelot pour la lancer sur l'autre rive. Enéide livre XI. Ce sujet plein d'intérêt, est traité par M. Cogniet de la manière la plus ingénieuse. En choisissant l'instant de l'invocation, l'auteur a fait preuve de jugement et de goût puisqu'il a fait oublier ce qu'il a d'invraisemblable en lui-même. La composition pittoresque mérite des éloges. Le groupe est beau, bien agencé, toutes les lignes sont heureusement combinées pour former un tout agréable fait pour satisfaire l’œil le plus délicat dans cette partie. Sous le rapport de la couleur, le tableau est très satisfaisant. Elle est chaude, vigoureuse, transparente et lumineuse, qualité essentielle de cette partie dans le genre historique. Sous celui de l'harmonie générale, il ne l'est pas moins, si ce n'est que la partie des rochers placée directement au dessous des Volsques et près de la jambe du guerrier n'a peut-être pas assez de vigueur pour mettre à son plan cette partie de la composition. [f°1, v°] Cette petite tache, au surplus, est de peu d'importance dans un ouvrage qui, comme celui-ci, réunit d'une manière très distinguée plusieurs parties principales, telles que le sentiment, la force du ton local, l'harmonie et les convenances du sujet. Nous remarquerons ici que les élèves inspirés et dirigés par les Maîtres qui les ont formés font un heureux choix dans ces sujets composés de peu de figures, mais qui laissent apercevoir qu'ils comptent pour beaucoup dans l'expression, qu'ils ont souvent un but moral, ou des pensées délicates dans ces ouvrages dont le but n'a été longtemps que de s'exercer dans la seule partie du mécanisme. M. Coignet [sic] tient ce qu'il a promis dès ses premiers débuts, de l'esprit, du goût, la facilité, la légèreté de la touche, qualités qu'il semble encore pouvoir perfectionner dans l'espace de temps qu'il a séjourné à Rome. [ajouté dans la marge : a fait des progrès]. Le dessin qui a de la vérité laisse cependant à désirer du côté de la parfaite correction : le grandiose, les formes héroïques, ce grand galbe, ce grand aspect qu'exigent impérieusement les héros fabuleux, et surtout les personnages de Homère et de Virgile, ces parties sont, suivant la commission, celles dans lesquelles l'auteur laisse le plus à désirer. La tête du héros a cependant du caractère, de [f°2, r°] l'expression, de l'âme ; son œil a du feu, de la vie. Mais son bras droit est languissant de formes ; et ses contours à partir de l'extension du pouce jusqu'au biceps a de la roideur et l'intérieur de ce même bras, est faiblement modelé. Le col, la clavicule, le deltoïde, et les pectoraux sont bien peints, d'une couleur vigoureuse et variée qui ne laisse que peu à désirer, ainsi que les bras et la main qui tient l'enfant. Il n'en est pas de même du côté droit du torse, les dentelés ne sont pas à leur place, ils sont aussi longs que les obliques, ils ne sont pas en perspective et la distance qui les sépare de la portion du torse n'est pas observée. Le ventre n'est pas savamment modelé. Il est bas-relief [sic]. L'os des îsles gauche, a de la mollesse vue la contraction de ce côté qui porte tout le poids du corps. La cuisse gauche ainsi que la rotule est très belle, mais la jambe ne s'attache pas heureusement [ajouté dans la marge : à modifier], il y a un vis-à-vis dans ses contours intérieurs et extérieurs qui la rend balustre. Le pied de ce même côté est bien dessiné et il porte bien. La jambe droite n'est pas d'un heureux contour mais elle est, ainsi que l'autre, d'un bon ton de couleur. [f°2, v°] La cuisse droite est faible. L’œil ne suit pas ses contours jusqu'à l'endroit où elle s'attache. Et son vaste interne n'est pas modelé dans la partie de l'ombre. L'enfant ne laisse presque rien à désirer, plein de grâce, de naïveté, d'un ton riche, vrai, lumineux, rien de plus heureux que cette qualité de pourpre [ajouté dans la marge : plus de lumière] et de blanc qui environne sa jolie tête. Moyens pittoresques qui prouvent que l'artiste est pénétré des vigoureux moyens employés par le Titien pour produire un grand effet. On voudrait seulement apercevoir un petit bout de son pied, pour éviter cette pointe rouge placée au-dessus du pectoral droit de son père. Tous les accessoires de ce tableau sont d'un excellent goût. Larges d'exécution sans négligence et rendus sans mesquinerie. Le casque, son aigrette noire, la peau de tigre, tout concourt à l'effet de l'ensemble. Le fond, les rochers et les eaux surtout, sont d'une vérité dans leur ondulation, d'une couleur, d'une transparence très remarquables. Si la critique que nous en faisons de cet ouvrage distingué, paraît un peu sévère, elle est ainsi que l'éloge, dictée par la sincérité et l'intérêt qu'inspire un talent qui doit bientôt augmenter nos jouissances et briller au nombre de ceux déjà si recommandables depuis quelques années, dans notre École. [f°3, r°] Rapport de la Commission sur l'esquisse de M. Coignet [sic]. La commission ne dira qu'un mot sur l'esquisse de cet artiste ; car il est évident qu'il ne l'a faite que pour remplir une obligation voulue par le règlement. Les ombres passant le Styx / L'épisode est bien choisi et aurait immanquablement produit de l'effet, si l'auteur avait eu l'intention de le rendre d'une manière digne de lui. Le terrible nautonier, le séjour des morts, la barque, les ombres, tout est gris dans le séjour de sang et de feu. Les lauriers du poète, et la couronne du tyran tout, excepté le vieux Nocher, tout est de marbre, tout manque de ce grand, de ce sombre caractère qui doit inspirer l'effroi. Le groupe des âmes est néanmoins d'un beau style, là seulement, on retrouve le goût et la touche spirituelle du peintre. Si ces personnages ont conservé d'assez belles formes humaines, pourquoi n'auraient-ils pas aussi quelque chose de la couleur des vivants ? Si votre commission, messieurs s'étend un peu longuement sur cet article, c'est qu'elle a remarqué [f°3, v°] combien nos jeunes artistes pensionnaires sont avares de compositions depuis longtemps, et si elle ne craignait surtout de voir tomber en désuétude cet article du règlement si sagement institué par nos maîtres et nos émules, obligation qu'ils se piquaient eux-mêmes de remplir avec exactitude parce qu'ils la regardaient comme un moyen puissant qui les forçaient de bonne heure, à créer de grandes conceptions. // [f°4, r°] Rapport de la commission sur le tableau peint par M. Dubois. Le jeune Clovis, un des fils de Chilpéric et d'Andovère sa première femme, assassiné par ordre de Frédégonde, est trouvé par un pêcheur sur les bords de la Seine, et reconnu aux tresses qui ornent ses longs cheveux. Ce tableau où on remarque beaucoup de talent est une preuve incontestable des progrès rapides que son jeune auteur a fait depuis le peu de temps qu'il étudie sous le beau ciel d'Italie. Ce beau sujet pris à une époque très reculée de notre histoire, a néanmoins beaucoup d'intérêt, quoiqu'il manque du côté de la clarté historique. Cela ne touche en rien au talent de l'auteur, et n'eut-il voulu représenter qu'une jeune victime trouvée sur les bords d'un triste rivage, il en aurait encore assez pour intéresser vivement. Pour commencer par la partie morale du sujet, la Commission pense : que le pêcheur manque d'expression, que son bras droit n'est posé de cette manière que pour développer la partie supérieure du torse ; mais au dépend de la vérité d'action et d'expression qu'on doit observer avant tout. [f°4, v°] Le bras gauche est représenté de même pour l'expression. Il est de plus, lourd dans ses formes. La main qui tient le filet est peu naturelle, n'indique pas clairement ce qu'elle fait. La main étant celle des extrémités qui contribue le plus à l'expression son geste n'est pas juste, il n'exprime pas assez cette précaution, ce respect dont le peintre doit supposer que le pêcheur est pénétré. Sous le rapport de la composition pittoresque, le tableau laisse encore à désirer plusieurs choses importantes, les lignes courbes que forment les contours du pêcheur répètent d'une manière peu agréables ceux du jeune homme placé plus bas, et il résulte de cette uniformité quelque chose qui ne satisfait pas au premier aspect. Nous ne voulons pas dire pour cela qu'on doive par trop sacrifier à cette combinaison des lignes, dans un ouvrage de l'art. Mais, persuadé que c'est une qualité de plus qu'on a droit d'attendre d'un jeune homme qui a fait des progrès en aussi peu de temps, la commission croirait ne pas remplir le but qu'elle se propose si elle passait légèrement sur ces manques de goût. Sur celui de l'effet général, le tableau est lourd, il manque d'air, le fond est noir, il manque de transparence ; et il est à remarquer que, si l'auteur eût éclairé son sujet du côté opposé à celui qu'il a choisi, [f°5, r°] il aurait sauvé par ce moyen l'égalité de lumière répandue sur la figure du jeune homme, si satisfaisant du reste. La barque ne laisse apercevoir de loin qu'un pieu enfoncé dans la terre. La draperie qui couvre la partie inférieure du corps du pêcheur manque de goût dans l'ajustement de ses plis et la ceinture en manque également. Ces détails qui peuvent paraître minutieux doivent avertir l'artiste que l'effet de chaque chose doit se faire sentir de loin, dans un grand ouvrage. Il est de la justice de remarquer que plusieurs parties de la figure du pêcheur méritent des éloges. Quelques unes sont dessinées correctement d'une facture vraie, large et soignée. Telles que le col, la clavicule, les pectoraux et la jambe du côté droit, ces parties sont fort bien mais le pied du même côté glisse sur le terrain, il ne porte pas. La tête de cette figure est également noire. Les cheveux manquent de lumière. Mais son caractère est heureusement choisi pour faire valoir et donner tout l'intérêt possible à celle du jeune Prince, objet de sa surprise et de sa compassion. Cette figure du jeune homme mérite beaucoup d'éloges, le caractère de l'adolescence est observé dans toutes ses parties, son attitude simple peint bien l'affaissement [f°5, v°] et l'abandon de la mort, le dessin noble et coulant est conforme à son rang élevé. Tout, dans cette figure dénote un talent déjà distingué. La tête, le col, les clavicules, la portion gauche du dorsal, le bras gauche tout entier, ainsi que la main et la jambe gauche, nous ont paru des parties remarquables pour la vérité que l'auteur n'a pu trouver que dans la nature. Si M. Dubois continue à étudier dans les mêmes principes, et avec la même conscience, nous sommes convaincus qu'il obtiendra avant peu, les succès les plus flatteurs et les mieux mérités. // [f°6, r°] Rapport de la commission sur le tableau de M. Michallon représentant le combat des Centaures et des Lapythes [sic]. Ce sujet dont un épisode seul se trouve développé est héroïque et poétiquement traité, transporté dans les montagnes de la Thrace. Le spectateur reconnaît les sites imposants que son imagination s'est formée, cascade rapide, rochers élevés, précipices profonds, végétation pittoresque, on trouve partout un pinceau faire [ill.] avec les grands effets. Toutefois le spectateur éclairé, la critique, aime à désigner tout ce qui lui semble à reprendre quand l'oeuvre sur laquelle elle s'exerce le mérite pour son importance et pour les [rayé : hautes] espérances que fait concevoir de lui l'artiste qui l'a crée. Monsieur Michallon traite la figure avec assez de perfection pour exiger de la sévérité de la part des membres de la commission. La scène est parfaitement expliquée dans la figure du Centaure ; l'égarement de la frayeur qui les portent à se précipiter dans le fond d'une abyme plutôt que de soutenir une lutte contre Thésée donne une grande idée de la valeur de ce héros, mais celle de Thésée trop rapprochée [rayé : de celle ; mis à la place : du premier] centaure pour le plan établit entre elles un espace de rivalité de masses et de lumière qui détruit [ajouté : altère] l'unité. le même défaut nous paraît exister dans la partie où se trouve représentée la chute du Torrent, une réunion de broussailles très [ill.] les partage et produit par cette interruption une répétition de lumière qui contrarie l’œil et unit de même l'ensemble. Ces observations sont d'autant plus sensibles que le caractère grave et nébuleux du ciel de ce tableau et que la [ill.] du sujet [rayé : exigeait ; mis à la place : donne] plus d'éclat aux échappées de lumière et conséquemment demandait [f°6, v°] la plus grande [ill. ] dans les combinaisons de leurs efforts respectifs pour ne point offenser l'harmonie. La commission conduite par la considération du talent et des grands moyens de Monsieur Michallon a cru devoir lui exposer avec simplicité le résultat de ses observations, elle l'engage à présent qu'il paraît s'être nourri et bien pénétré des mérites des maîtres de l'art à se livrer avec l'abandon de toute la confiance à l'étude de la nature. Elle seule (comme il le pense sans doute lui-même) peut inspirer aux gens de lettres et aux artistes ce style, cette physionomie cette originalité qui distinguent les chefs d'école et fait parvenir leur nom et leur gloire jusqu'à la postérité la plus reculée. // [f°7, r°] Céphale et Procris, par M. Hesse / Aux termes du Règlement, M. Hesse comme tout pensionnaire, était tenu d'envoyer chacune des deux premières années une figure peinte, plus quatre figures dessinées d'après le modèle et deux d'après l'antique. La première fois, M. Hesse a envoyé la figure peinte demandée, mais aucune figure dessinée, soit d'après nature, soit d'après l'antique ; cette seconde année, loin de nous envoyer la figure peinte qui devait attester le fruit des conseils qu'il avait reçus, sur sa première représentant Ulysse, Nous le voyons paraître aujourd'hui, avec le tableau de plusieurs figures, réservé dans le règlement pour la cinquième et dernière année : Disposition sage, qui cherche à assurer aux élèves, plus d'expérience dans l'exécution de cette preuve complémentaire de leurs études. Si par zèle ou plutôt par une impétuosité présomptueuse, les Pensionnaires rejettent ainsi les séries établies, pour ne prendre du Règlement que ce qui leur plaira, leurs travaux se ressentiront des dangers et des défauts que la gradation bien entendue qu'on leur avait tracée, devait leur faire perdre. Après le Règlement, le frein le plus primaire sans doute, que nous puissions opposer à ces écarts, est de rappeler que les plus anciens comme les plus distingués des Maîtres qui honorent l'École Française, lorsqu'ils étaient Pensionnaires, exécutaient modestement mais avec une étude profonde, la figure peinte de chaque année, sans titres, sans accessoires fastueux qui auraient pu les en distraire ; Si par la suite, il en est qui ont voulu motiver cette figure, c'est encore en laissant [f°7, v°] à l'étude du Nu toute son intégrité tels nous avons vu le Gladiateur de [rayé : nous avons de] Drouais, la figure d'Abel de M. Fabre, l'Endymion de M. Girodet. Ces Pensionnaires, avec des talents supérieurs, semblaient encore prendre plaisir à s'affirmer par ces simples études classiques, dont la belle exécution qu'il n'ignoraient pas posséder très bien, et avec laquelle ils auraient pu, non pas affronter, mais traiter convenablement les sujets les plus élevés de l'histoire de la Mythologie. Le devoir de M. Hesse pour la troisième année, est une figure peinte et une esquisse peinte ou dessinée d'une composition de son invention ; nous espérons qu'à son grand avantage, il s'en tiendra au Règlement, se ressouviendra qu'il doit les figures dessinées, et qu'il ne peut nous mettre en compte, son Esquisse des Sept Chefs, qui ne se sentait que trop de son envoi précoce, toujours par oubli des règlements. L'Académie doit sentir combien il est nécessaire d'exiger enfin le maintien des règlements. Maintenant nous examinerons le tableau de M. Hesse. Ce tableau montre au premier Coup d’œil un groupe assez bien agencé, qui paraît avoir de l'intérêt et d'un effet assez franc pour lui donner de la saillie. Mais l'on en reconnaît point suffisamment le sujet, même en l'examinant ; l'on serait tenté de croire que l'auteur avait un groupe qu'il désirait employer ; S'il en était ainsi, trouver ses motifs dans la Nature (il le supporte toutefois, car autrement ce serait un plagiat) est [f°8, r°] sûrement ce qui peut arriver de plus heureux à un artiste, Cependant il est rare d'y trouver son sujet tout fait, et il doit employer tout le tableau et tout le sentiment dont il est susceptible à plier et ramener ce premier motif à toutes les convenances du sujet qu'il a choisi. Que ce groupe soit rencontré ou composé, ces convenances n'y sont pas assez réunies, puisqu'on ne saisit pas aussitôt le sujet ; il est encore une crainte que fait naître ce ton rembruni que l'on remarque assez extraordinairement en tout ou en partie dans les ouvrages des Pensionnaires. C'est que souvent les élèves trop préoccupés des ouvrages des Grands-Maîtres, qu'ils admirent sans la précaution d'en soulever le voile de la vétusté, [rayé : ils] se laissent entraîner même par la plus superficielle réminiscence, oubliant peu à peu leur sujet, la nature et sa lumière, ne cherchent qu'à donner à une toile l'aspect de ces tableaux rembrunis et surannés. Que deviendront les leurs lorsque vieux à leur naissance, ils auront encore réellement subi l'influence du temps. C'est plutôt une occasion que nous prenons de remarquer ce dangereux système qu'un reproche spécial à M. Hesse. Cependant, le peu que l'on en trouve dans son tableau, contribue encore à faire méconnaître son sujet. Par exemple, est-ce à cette tête rembrunie, sévère d'âge et de couleur, que l'on peut reconnaître le jeune et candide favori de l'Aurore. Au nom de Céphale et Procris ? [f°8, v°] L'imagination se représente tout ce que la jeunesse a de plus pur et de plus aimable, livrée à tout ce que le malheur a de plus attendrissant. Les reconnaîtra-t-on dans ces deux figures dont le choix de nature n'est ni assez jeune, ni assez noble ; le texte à la main, que de moyens sont indiqués pourtant ! Céphale raconte son malheur et dit (j'étais fort jeune alors). Il vous fait voir l'endroit ombragé où il se reposait des fatigues de la chasse, et d'où il lança ce javelot vers le buisson, où il avait entendu du bruit et où il accourut, effrayé d'un gémissement. Ne pouvait-on disposer le fond de manière à montrer cet endroit d'un effet si heureux. Le moindre accessoire de chasse, une biche ou un autre animal des forêts, suspendu ou déposé près de l'arbre, était ce que demandait le sujet ; les Anciens, le Poussin abonde ce ces jolis détails ; ce buisson a-t-il assez de capacité pour pouvoir motiver une aussi cruelle méprise ; s'il avait servi de retraite à l'inquiète Procris, au lieu de l'en séparer exactement pour l'intelligence du sujet, ne devait-elle pas y être encore quelque peu engagée ; les moindres branches adroitement interjetées sur les pieds ou sur les jambes, expliqueraient tout cela. Ces diverses indications auraient concouru à achever un groupe qui a du sentiment dans sa disposition, et auraient amené le Spectateur à reconnaître le sujet de Céphale et Procris. Ce qui choque le plus en voyant ce tableau, c'est la disposition de ces deux profils [f°9, r°] exactement nez à nez ; la tête de Procris défaillante offrait cependant une variante naturelle ; celle de Céphale, est divisée sans dégradation, en clair et en ombre ; les cheveux platement noirs, viennent encore augmenter en dureté. La partie des clavicules et du deltoïde dans la lumière, semble trop large, l'ombre sous les pectoraux, la flexion qui n'a lieu que sous les droites de l'estomac ; la main gauche de Céphale est ce qu'il a de mieux fait, mais les extrémités sont en général d'une nature commune, et d'un ton lilas sans variantes, sans richesses, ce que l'on appelle, il faut le dire, un ton de pincellier. La cuisse et la jambe, étendues en arrière de la même figure, sont nulles de dessin et d'exécution. La tête de Procris se sent trop de la bosse, l'avant-bras dont Céphale tient la main est mesquin, n'est pas en rapport avec la partie supérieure du bras, ce qui pourrait provenir d'un manque d'espace dont on s'est tiré comme on a pu. Ce torse de femme est pesant de forme et encore plus pesant de couleur, c'est surtout sur les cuisses et les hanches que l'on remarque un travail pénible et sali à force d'être tourmenté ; l'on y voit des bandes jaunes, roses, vertes, violettes, ne pouvant provenir l'une de l'autre et disposées en long, ce que la nature n'offre jamais. Ces semelles sont peu agréables, de belles plantes de pieds eussent été préférables. Les ajustements n'ont guère plus de rapport au sujet, que la nature des figures. Le fond des derniers plans, est d'un bon ton, bien disposé et bien fait, mais les devants tout au contraire, ne montrent aucune adresse, ni facilité, [f°9,v°] pour ces sortes d'accessoires, ce qui se remarque surtout dans ce buisson si mesquin de forme, et dans cet arbre trop lourd et trop rapproché des figures. Malgré tous ces défauts, [rayé : M. Hesse ; mis à la place : et la timidité qui] a gêné les progrès [rayé : ill. ; mis à la place : de M. Hesse], [rayé : un mot ill.] on en peut reconnaître quelques uns. Il y a dans son tableau une franchise d'effet et un ensemble de composition qui de loin le ferai croire le meilleur de l'Envoi. Par une pantomime assez bonne, on voit qu'il était animé du sentiment de représenter l'infortunée Procris, voulant sans reproches, sans amertume exhaler son dernier soupir dans les bras de l'époux si chéri, qui involontairement vient de lui donner la mort ; quelques parties vont [sic] voir que M. Hesse peut encore ressaisir le dessin et la couleur qui forment cette bonne exécution sans laquelle les plus beaux sujets, les plus belles pensées restent à demi voilées à nos yeux. Lorsqu'il se sera raffermi dans ces premières études requises, il sera plus à même de réfléchir sur la source où il aura puisé ses sujets, sur les natures qui leur conviendront, la hauteur du style qu'il s'engage de rechercher, selon qu'il aura choisi dans l'histoire, les temps héroïques, où la brillante mythologie. Si incertain devant la nature qu'il ne doit jamais perdre de vue, mais dans laquelle on ne trouve pas toujours l'élévation convenable, il veut épurer son choix, que de degrés ne trouvera-t-il pas depuis le Gladiateur mourant jusqu'à l'Apollon, pour représenter dignement la nature ordinaire, ou pour s'élever au-dessus d'elle, autant que la Poésie est au-dessus de la langue vulgaire.
Localisations
Cote / numéro : 
Académie des beaux-arts, 5 E 12
Source
source : Institut national d'histoire de l'art (France) - licence : Attribution 4.0 International (CC BY 4.0)
Commentaire interne
Base Envois de Rome FMP, fichier Documents.fp7, notice : £Rapport envois, primitif, 1821, peinture£ Notice créée le 27/05/2002. Notice modifiée le : 28/02/2018. Rédacteur : Isabelle Loddé.
Rédacteur
Isabelle Loddé