WORCH Adolphe et Edgar (FR)
Adolphe Worch
Vie personnelle
Adolphe Worch est un antiquaire d’arts chinois actif à Paris au début du XXe siècle. Assez peu d’éléments biographiques sont connus à son sujet.
Adolphe Worch naît à Cassel, en Allemagne, le27 décembre 1843, et s’installe en France vers 1860.
Sa carrière et les années qui suivent son décès sont particulièrement marquées par le contexte d’anti-germanisme qui accompagne la guerre. À plusieurs reprises, l’antiquaire est désigné à la vindicte populaire par plusieurs journaux, comme un certain nombre d’entrepreneurs d’origine allemande (« Notes de guerre. Leurs antiquaires ». L’Intransigeant, 27 février 1915. BnF). Outre le reproche habituel de procéder à une « invasion économique », l’engagement du neveu d’Adolphe Worch, Edgar, comme officier dans l’armée allemande est particulièrement fustigé par la presse française (« La chasse aux Boches. Leurs antiquaires : “Worch, de Paris” ». L’Intransigeant, 10 mars 1915. BnF). Ces accusations ont un impact direct sur la galerie, notamment à travers les accusations de faux qui s’y mêlent parfois (« La chasse aux Boches. Leurs antiquaires : “Worch, de Paris” ». L’Intransigeant, 10 mars 1915. BnF).
Adolphe Worch décède le 16 juillet 1915 (Le XIXe siècle : journal quotidien politique et littéraire, 19 juillet 1915. BnF), en pleine Première Guerre mondiale. Il ne laisse aucun enfant, mais plusieurs héritiers, désignés par testament : ses cinq frères et sœurs, leurs descendants, dont Edgar Worch, ainsi que Pauline Marie Charley, veuve Lorme. Si Worch est de nationalité française depuis le 19 mars 1889 (Le Temps, 28 mai 1915, BnF), tous ses héritiers sont allemands. Cependant, suivant l’ordonnance du 26 avril 1915, la Maison Worch, ainsi que les biens personnels de l’antiquaire sont mis sous séquestre, afin d’éviter qu’ils ne retournent à « l’ennemi » (« La chasse aux maisons et produits boches ». La Liberté, 5 juin 1915. BnF).
Vie professionnelle
En 1888, Adolphe Worch fonde sa galerie, la Compagnie commerciale de la Chine et du Japon. Située au 9 et 11 rue Bleue, dans le 9e arrondissement de Paris, elle est spécialisée dans « l’achat et la vente de tous articles de la Chine et du Japon » (Lefebvre, Eric. « Le Destin des collections d’art chinois d’un marchand d’antiquités allemand de Paris : Adolphe Worch [1843-1915] ». Idées de la Chine au XIXe siècle : Entre France et Allemagne, 2014, p 221-233). Dès 1890, l’entreprise est recensée dans des annuaires de commerces, parmi les galeries de « Chinoiseries et japoneries » (Annuaire-almanach du commerce… Firmin Didot et Bottin réunis. 1890. BnF). Mais les produits vendus par Adolphe Worch sont variés : papiers à lithographie ou encore soieries font ainsi partie de ses importations.
L’histoire de la galerie Worch est marquée par deux litiges. Le premier oppose Adolphe Worch à la Compagnie des Messageries maritimes, qui assure le transport de ses caisses d’objets en provenance du Japon. Il concerne des vols et des dégâts occasionnés à des soieries lors de l’acheminement de caisses en provenance de Yokohama, en mars 1900. Un second litige oppose en 1925 la maison Worch à un ancien collaborateur, l’antiquaire John Vigouroux (Le Gaulois : littéraire et politique, 29 janvier 1925. BNF).
Edgar Worch
Vie personnelle
Edgar Worch naît en 1880. Il est probablement le fils d’Helene Worch, sœur d’Adolphe, et de William Katsch (testament d’Adolphe Worch, Asian Section records. PU-Mu. 0052. Penn Museum Archives). En 1904, Edgar Worch rejoint son oncle en France, et devient son principal collaborateur (Guerre 1914-1918. Commission consultative des séquestres de guerre [1919-1926]. Procès-verbaux des séances de la commission. Commission consultative des séquestres de guerre, Affaire Edgar Worch. AJ/28/CCSG/1, pièce 390. AN). Lors de la Première Guerre mondiale, il s’engage comme officier dans l’armée allemande. Lors de la bataille de Verdun, il est gravement blessé au genou gauche, et en conserve un handicap toute sa vie.
Par la suite, Edgar Worch réside quelques années en Allemagne ; en mai 1923, il est domicilié à Berlin, au 7 Parizerplatz (testament de John Audley, en date du 18 mai 1923. Asian Section records PU-Mu. 0052. Penn Museum Archives). L’antiquaire voyage régulièrement : le 15 mai 1923, il se rend aux États-Unis pour une affaire liée à la succession de son oncle (Courrier du 7 mai 1923 du cabinet d’avocats Scott, Van Dusen & Archbald à Charles C. Harrison. Asian Section records PU-Mu. 0052. Penn Museum Archives). En 1932, Edgar Worch et son épouse Hedwig Heinz se rendent à Genève. Six ans plus tard, ils s’installent aux États-Unis (United States of America, Bureau of the Census. Sixteenth Census of the United States, 1940. Washington, D.C.: National Archives and Records Administration, 1940. T627, 4,643 rolls. National Archives and Records Administration). Ils y résident plusieurs années ; en 1944, Hedwig Worch réalise une demande de naturalisation. Le couple réside alors au 930, Fifth Avenue, New York (demande de naturalisation d’Hedwig Worch. Soundex Index to Petitions for Naturalization filed in Federal, State, and Local Courts located in New York City, 1792-1989. New York, NY, USA: The National Archives at New York City. The National Archives at New York City).
Edgar Worch décède en 1972.
Vie professionnelle
À la suite du décès d’Adolphe Worch, c’est son neveu Edgar qui poursuit les activités de la galerie. L’antiquaire lui doit déjà d’importantes sommes, dans le cadre des activités de la galerie. Edgar Worch transfère alors l’entreprise à Berlin, au 2 Tiergartenstr.
Constitution de la collection
Liquidation de la collection
L’histoire de la collection Worch est marquée par la saisie puis la liquidation des biens d’Adolphe Worch. En mai 1920, la liquidation de la collection débute. Plusieurs collectionneurs et conservateurs saisissent l’occasion d’enrichir leurs collections à moindre coût, parmi lesquels le département des arts asiatiques du musée du Louvre et surtout Henri d’Ardenne de Tizac, conservateur du musée Cernuschi.
Ainsi, sur les 152 œuvres de la collection Worch actuellement conservées dans les collections du musée parisien, seules neuf ne sont pas issues des ventes successives du séquestre, mais de dons ou de ventes d’Adolphe ou d’Edgar Worch.
Pour les autres musées occidentaux en possession d’un nombre remarquable de pièces issues de la collection Worch, l’entrée de ces œuvres dans leurs collections s’explique généralement par les relations entretenues par la galerie d’Edgar Worch avec ces institutions.
Provenances géographiques de la collection
Parmi les pièces conservées en musées, la provenance chinoise est très majoritaire (246 œuvres), mais seules 23 œuvres possèdent une indication de provenance précise. Ces mentions concernent essentiellement le nord-est de la Chine, en particulier aux abords de Beijing et de Shanghai et le long de la côte. Le Hebei, le Henan, le Jiangxi et le Shaanxi comptent parmi les provinces les plus fréquentes. Quelques œuvres proviennent par ailleurs d’autres pays : quatre pièces japonaises, une égyptienne, une iranienne. On peut également identifier une œuvre allemande et une américaine issues de la collection d’Edgar Worch.
Spécialisations de la collection
Les spécialisations de la maison Worch semblent relativement diversifiées, avec une légère prédominance des éléments de parures (68 œuvres, soit 27 % de la collection). La statuaire bouddhique est également très représentée (42 œuvres, soit 17 % de la collection). Enfin, les mingqi et la vaisselle en céramique constituent les deux autres principaux pôles de la collection (respectivement 41 œuvres, soit 16 % de la collection).
Datations de la collection
Au niveau des datations, la dynastie Han (206 av. J.-C.-220 apr. J.-C.) est particulièrement représentée, avec 20 % de la collection, soit 50 œuvres parmi les 254 recensées. La dynastie Tang (618-907) est également très présente (47 œuvres, soit 19 % de la collection). Vingt-six pièces, soit 10 % de la collection, sont datées de la période des Trois Royaumes et Six Dynasties (220-581). Les autres datations identifiées ne sont présentes dans la collection qu’à raison de moins d’un dixième de celle-ci pour chaque datation. Par ailleurs, une grande partie (19 %) des œuvres de la collection n’est pas datée.
Réception de la collection
La réception de la collection Worch par la presse contemporaine est très liée à la liquidation du séquestre des biens d’Adolphe Worch. À cette occasion, de nombreux articles paraissent pour en faire la publicité ou pour en dresser un bilan favorable. Les pièces de la collection impressionnent autant en termes numéraires que pour leur qualité. Dans un article de La Renaissance de l’art français et des industries de luxe en janvier 1922 (BnF), l’ampleur du stock de la galerie et l’importance des prix sont soulignées. Ainsi, ces œuvres attirent lors des ventes l’attention des plus grands collectionneurs d’arts asiatiques de l’époque, comme le relate le journal Le Temps du 6 décembre 1921 (BnF).
On peut également noter l’éloge reçu par deux pièces de la collection d’Adolphe Worch lors de l’exposition de 1913 au musée Cernuschi (« L’art bouddhique au musée Cernuschi ». Revue des deux mondes, mars 1913, p. 667. BnF).
Accueil et expertise
L’accueil réservé par la presse contemporaine aux expositions auxquelles Vignier participe est à la hauteur de la qualité et de la rareté des œuvres présentées. Parmi les pièces présentées par Vignier, beaucoup apparaissent comme inédites en Europe de par leur qualité ou leur provenance, qu’il s’agisse d’œuvres africaines, chinoises ou coréennes (BnF, Bulletin de la Société franco-japonaise de Paris, juillet 1913).
L’expertise du collectionneur est régulièrement soulignée, de même que ses qualités d’épigraphiste et d’archéologue, ainsi que de vulgarisateur (BnF, Le Bulletin de la vie artistique, juillet 1925, p. 288-289). Les nombreux catalogues de ventes ou de collections qu’il réalise ou auxquels il contribue sont ainsi fréquemment salués comme des apports novateurs et importants à la discipline (BnF, Bulletin de la Société franco-japonaise de Paris, juillet 1913).
Notices liées
Collection / collection d'une famille
Personne / personne
Personne / personne
Personne / collectivité