Haviland, Charles
96 boulevard Haussmann
29 avenue de Villiers
Hôtel particulier.
Le Reynou
Château.
Un entrepreneur atypique
Charles Haviland (1839-1921) est né à New-York le 7 Janvier 1839 dans une famille de commerçants de religion quaker, établis à Manhattan et titulaires, entre autres, d’une licence d’importation de vaisselle anglaise.
Son père, David Haviland (1814-1879), est chargé par ses associés de trouver un produit nouveau. La porcelaine dure française, alors pratiquement inconnue aux Etats-Unis, semblant convenir, il décide de s’expatrier. Il arrive, au printemps de 1842 à Limoges, accompagné de son épouse Mary Miller, et de Charles alors âgé de trois ans.
Le succès grandissant de ses produits sur le marché américain lui permet de passer rapidement du stade de transitaire à celui de décorateur pour se trouver, à la fin des années 1860, à la tête d’une des plus grandes manufactures de porcelaine de la ville, la société Haviland & Compagnie. Par effet d’entraînement, la production limousine connaît un développement fulgurant et Limoges devient un centre porcelainier mondialement connu.
Charles Haviland s’impose à la tête de la Maison dès la fin de la guerre de Sécession (Civil War, 1861-1865). Sous l’effet d’évènements de type révolutionnaire le contexte commercial change, la clientèle et la demande évoluent. Ce sera le cas en France également, après la guerre de 1870 et la Commune de Paris. Industriel pragmatique, tenace et travailleur infatigable, Charles Haviland est conscient qu’il va falloir faire moins cher et surtout nouveau. Il a recours aux techniques d’avant-garde pour les ateliers : cuisson au charbon, calibrage des assiettes et remplacement du décor peint à la main par la chromolithographie. C’est déjà une hérésie mais, étranger d’immigration récente, il n’hésite pas à bousculer les traditions qui paralysent la profession. Devant l’état de sclérose avancée du décor limousin, il fait appel à un artiste parisien et non à un décorateur local. Le premier juillet 1872, Félix Bracquemond (1833-1914) est nommé, pour dix ans, responsable de la « direction d’art » d’un « Atelier » situé au 122 rue Michel-Ange dans le quartier d’Auteuil à Paris, connu sous le nom d’Atelier d’Auteuil. L’objectif est de concevoir, dessiner et imprimer des décors inédits qui, envoyés à la manufacture de Limoges, seront appliqués sur la porcelaine. Il y met au point la technique de chromolithographie et adapte à la porcelaine les idées révolutionnaires : suppression des bordures et répartition libre des éléments décoratifs, développées pour son Service Rousseau « … une révolution … des calques d’objets japonais jetés sur de la porcelaine de Creil … » (Goncourt E., 1989, T 2, p. 773 ; d’Albis L., 2019). Sous sa direction, des centaines de décors radicalement nouveaux sont créés ; leur succès commercial va placer pour longtemps la société Haviland & Co à l’avant-garde de la profession. On fera aussi à l’Atelier des objets décoratifs inspirés des courants artistiques contemporains. Grâce à l’influence de Bracquemond et au dynamisme sans complexes de Charles Haviland, la porcelaine française connaît de 1874 à 1884 une des périodes les plus brillantes de son histoire.
La collection rassemblée par Charles Haviland a-t-elle influencé les productions de la Maison Haviland ? Il semble que la réponse soit négative. En effet, celle-ci ne commence à véritablement se constituer qu’à partir de 1880, au moment même où Charles, la mode ayant changé, donne instruction à ses dessinateurs d’abandonner toute référence au Japon. D’autre part, trois seulement parmi les centaines de décors créés entre 1872 et 1880 utilisent des sujets tirés d’estampes japonaises. Ils sont tous les trois l’œuvre de Bracquemond, lequel a très probablement utilisé les albums de sa propre collection comme source d’inspiration. Il y a cependant quelques rares exceptions datables du début des années 1880, parmi lesquelles un plat orné de fleurs dont la forme et le décor sont ceux d’un laque. La disposition naturelle des vases « impressionnistes » fabriqués à Auteuil et surtout, la matière rustique et le décor simplifié des grés de 1884, n’auraient probablement pas été acceptables sans la familiarité alors acquise avec l’art des estampes japonaises. Il existe cependant un seul cas ou l’influence est certaine. Dans une lettre du 2 mai 1883 (AD Haute-Vienne, 23J), Charles fait part de son intention de « chercher à reproduire les différents types de porcelaine de Chine de ma collection ». Il s’agit de la redécouverte de la technique du rouge de cuivre sur porcelaine dure dans l’atelier Haviland dirigé alors par Ernest Chaplet (1835-1909).
On serait tenté de penser que ce sont, au contraire, ses propres productions qui lui ont ouvert la voie vers la collection.. En effet, dès 1872, convaincu par Felix Bracquemond, Charles Haviland accepte de prendre le risque commercial considérable d’un changement radical du style de ses produits qui, pendant plus de dix ans, sera influencé par l’art Japonais. Sa rencontre avec Philippe Burty (1830-1890) et les autres collectionneurs du temps est décisive. Doué d’un goût marqué pour la compétition, Charles découvre que l’on peut aussi posséder. Il réside de plus en plus souvent à Paris, dès lors rien ne s’oppose à ce qu’il donne libre cours à cette nouvelle passion.
Article rédigé par Laurens et Tristan d’Albis
An atypical entrepreneur
Charles Haviland (1839–1921) was born in New York on 7 January 1839 into a family of merchants who were Quakers based in Manhattan and were holders, amongst others, of an import licence for English crockery.
His father, David Haviland (1814–1879), was entrusted by his associates with finding a new product. As French hard porcelain seemed to be the answer, but was practically unknown in the United States at the time, he decided to move to France. He arrived in Limoges in the spring of 1842, accompanied by his wife, Mary Miller, and his three-year old son Charles.
The growing success of his products on the American market enabled him to rapidly shift from the status of a freight forwarder to that of decorator, and at the end of the 1860s he was at the head of one of the city’s largest porcelain manufactories, Haviland & Compagnie. As a result, the production in Limoges underwent exceptional development and the city became an internationally famous porcelain production centre.
Charles Haviland became the Director of the company at the end of the Civil War (1861–1865). Due to various revolutionary events, the commercial context changed, and the clientele and demand evolved. This was also true in France, after the 1870 war and the Paris Commune. A pragmatic manufacturer and a tenacious and indefatigable worker, Charles Haviland was well aware that he needed to produce less expensive wares and, above all, create innovative designs. He adopted avant-garde techniques in the workshops: coal firing, plate calibration, and the replacement of hand-painted decorations by chromolithography. This was considered highly unconventional, but as a foreigner who had recently arrived in France, he was ready to overturn certain traditions that were paralysing the profession. Given the sclerotic state of the decorative techniques in Limoges, he hired a Parisian artist rather than a local decorator. On 1 July 1872, Félix Bracquemond (1833–1914) was appointed, for a period of ten years, as the manager of the ‘artistic direction’ of an ‘Atelier’ located at 122 Rue Michel-Ange in the district of Auteuil in Paris, known as the Atelier d’Auteuil. The aim was to design, draw, and print new decorative elements which would be sent to the Limoges manufactory and applied to the porcelain wares. Here, he developed the technique of chromolithography and adapted revolutionary ideas to the porcelain: suppression of the borders and the free distribution of the decorative elements, developed for his Rousseau service: ‘… a revolution … tracings taken from Japanese objects applied to Creil porcelain …’ (Goncourt, E., 1989, T 2, p. 773; d’Albis, L., 2019). Under his direction, hundreds of radically new decorative schemes were created; their commercial success placed the company Haviland & Co at the avant-garde of the profession for many years. In the Atelier other decorative objects were made, inspired by contemporary artistic movements. Thanks to the influence of Bracquemond and Charles Haviland’s unbridled enthusiasm, French porcelain manufacture experienced one of the most brilliant episodes in its history between 1874 and 1884.
Did the collection assembled by Charles Haviland influence the products manufactured by the Haviland company? It seems that it did not. Indeed, the collection only took off in 1880, when, to keep up with changing tastes, Charles instructed his draughtsmen to abandon any Japanese influences. In fact, only three of the hundreds of decorative schemes created between 1872 and 1880 used subject matter based on Japanese prints. All three were the work of Bracquemond, who no doubt used the albums in his own collection as a source of inspiration. There are, however, some rare exceptions that can be dated from the 1880s, including a dish adorned with flowers, whose form and decorations are those of a lacquered object. The natural subject matter of the ‘Impressionist’ vases manufactured in Auteuil and, above all, the rustic themes and the simplified decorations of the stoneware of 1884, would probably not have been acceptable without the knowledge acquired though the art of Japanese prints. There is, however, one case where this influence is certain. In a letter dated 2 May 1883 (AD Haute-Vienne, 23J), Charles wrote of his intention to ‘try and reproduce the different types of Chinese porcelain in my collection’. This led to the discovery of the technique of copper-red glazes on hard-paste porcelain in the Haviland workshop, directed at the time by Ernest Chaplet (1835–1909).
It would be tempting to conclude that it was his own production of porcelain that inspired him to build up a collection. Indeed, in 1872, persuaded to do so by Felix Bracquemond, Charles Haviland took the considerable commercial risk of radically changing the style of his products, which, for more than ten years, were influenced by Japanese art. His encounter with Philippe Burty (1830–1890) and other contemporary collectors was decisive. As a highly competitive person, Charles discovered that he too could form a collection. He stayed in Paris more and more often, and from that point onwards he gave free rein to his new passion.
Article by Laurens and Tristan d’Albis (translated by Jonathan Michaelson)
[Objets collectionnés]
[Objets collectionnés] sculptures, bronzes.
[Objets collectionnés]
En 1872, Charles Haviland, à la tête de la société Haviland & Compagnie à Limoges, fait appel à Félix Bracquemond qui signe un contrat de dix ans avec le manufacturier de porcelaine. Il devient le responsable de la « direction d’art » d’un atelier créé à cet effet au 122 rue Michel-Ange, dans le quartier d’Auteuil à Paris. Il dirige cet atelier de recherche de 1872 à 1881.
(Source : Notice Agorha "Charles Haviland" rédigée par Laurens et Tristan d'Albis)
Charles Edward Haviland est le beau-père de Suzanne Lalique-Haviland. Elle épouse Paul Burty Haviland en 1917.
Franck Burty Haviland est le fils de l'industriel Charles Edward Haviland. Il est le frère de Paul Burty Haviland et le petit-fils du collectionneur Philippe Burty.