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Félix Youssoupoff est un prince russe dont la femme Irène Romanov est la nièce de Nicolas II. Il est impliqué dans l’assassinat de Raspoutine et émigre en France en 1920. Collectionneur fortuné, il achète des objets d’art sur le marché français, en particulier en coopération avec Rudolph Holzapfel-Ward pendant l’Occupation.


Comte Soumarokov-Elston, le prince Félix Youssoupoff est né le 11 mars 1887 à Saint-Pétersbourg. Promis à un brillant avenir et issu d’une famille parmi les plus riches de Russie, sa carrière politique est rapidement compromise. Peu de temps avant la révolution de Février, il est impliqué dans l’affaire de l’assassinat de Raspoutine, le favori du couple impérial. Réfugié d’origine russe, il est arrivé en France en août 1920, avec son épouse Irène, la princesse Romanov, nièce du tsar Nicolas II1.

Le prince Youssoupoff possédait en Russie une fortune immense. Outre deux tableaux de Rembrandt (Gentilhomme au grand chapeau et aux gants et Dame à l’éventail en plume d’autruche) qui en 1921 se trouvaient en vente aux États-Unis2, il a réussi à emporter en fuyant le bolchevisme un important lot des bijoux et diamants ayant jadis appartenu à la famille impériale et notamment à Catherine II de Russie, ainsi que des collections uniques au monde de bibelots du XVIIIe siècle.

Réfugiés en France, les Youssoupoff ont vécu pendant plusieurs années somptueusement, assurant leur train de vie par la vente de joyaux de leur collection. En 1926, voyant fondre leur patrimoine, les époux ont fondé sous la raison sociale « Irfé » (de leurs prénoms Irina et Felix) une maison de couture qu’ils ont installée au 19 rue Duphot dans le Ier arrondissement de Paris, non loin de la Madeleine, avec des succursales au Touquet-Paris-Plage, à Londres et à Berlin.

À la même époque, Youssoupoff a créé une école russe d’arts décoratifs appliqués, 12 bis rue Victorien-Sardou dans le XVIe arrondissement. Dans cette école, fréquentée par des jeunes filles russes, étaient enseignés le dessin, la sculpture, le style russe, la broderie, le tissage, la bijouterie, etc. Par suite des difficultés commerciales rencontrées, les affaires ont rapidement périclité et la maison de couture est dissoute au cours des années 1929 et 19303.

D’après l’enquête de la Préfecture de police4, en octobre 1928, Youssoupoff part à Berlin en compagnie de l’antiquaire d’origine russe Alexandre Polovtzoff. Leur voyage avait pour but d’empêcher la vente par les Soviets d’œuvres d’art provenant des collections de la famille Youssoupoff. Le jour de la vente organisée à la galerie Lemke, tous les biens sont confisqués suite à l’intervention de la police, mais les bolcheviques ont pu obtenir gain de cause dans cette affaire5.

La même année, le prince publie un livre intitulé La fin de Raspoutine où il relate les circonstances dans lesquelles il avait donné la mort au célèbre moine. Ce livre, qui mettait en cause de nombreux personnages, a valu au prince Youssoupoff plusieurs procès dont le plus célèbre s’est déroulé à Londres en février et mars 1934. Dans les années 1950, le prince publie ses Mémoires, en deux volumes, Avant l’exil (1887-1919) et Après l’exil (1919), qui connaissent un grand succès.

D’après ses Mémoires, Youssoupoff a fait la connaissance du collectionneur Rudolph Holzapfel-Ward dans les années 19406. Il le décrit comme l’un des experts d’art les plus réputés de Paris : « Avec lui, j’ai battu Paris en tous sens à la recherche d’objets d’art. Guidé par un flair infaillible, il dénichait des chefs-d’œuvre dans les endroits les plus inattendus et faisait des trouvailles dont la valeur était souvent ignorée de leurs propriétaires. » La contribution exacte de Youssoupoff aux affaires d’Holzapfel demeure toutefois méconnue.

Le prince meurt le 27 septembre 1967 à Paris. Appartenant à un ami des Youssoupoff, le sculpteur mexicain Victor Contreras, son héritage est mis aux enchères à l’hôtel Drouot en 2016, après la mort de ce dernier7. Une partie de ses collections a encore été récemment mise en vente à l’hôtel Drouot en 20218.