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[1844, sculpture, rapport Institut séance publique annuelle]Rapport imprimé de l'Institut sur les en [...]

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15/03/2022 09:31 (il y a plus de 2 ans)
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Description
[1844, sculpture, rapport Institut séance publique annuelle]
Rapport imprimé de l'Institut sur les envois de sculpture de 1844
TYPE : rapport séance publique annuelle de l'Académie des beaux-arts
AUTEUR : Raoul-Rochette
PAGE DE TITRE : Rapport sur les envois des pensionnaires de l’Académie de France à Rome lu à la séance publique annuelle du 5 octobre 1844. // Rapport sur les ouvrages envoyés de Rome par les pensionnaires de l’Académie royale de France pour l’année 1843, par M. Raoul-Rochette, secrétaire perpétuel
LIEU DE REDACTION : Paris
DATE : 1844
COMMENTAIRE : Les archives de l'Académie de France à Rome (carton 46, f° 166-170) conservent une version identique à celle de la séance publique annuelle pour les envois de sculpture de 1844. À noter que le rapport expédié à l'Académie de France à Rome a été expurgé des propos liminaires et conclusifs de la séance publique annuelle, mais que le corps du texte consacré à la sculpture est resté inchangé.
Descriptions
Transcription : 
C’est encore avec le même sentiment de regret que nous avons à signaler les fâcheuses lacunes qui se font remarquer dans l’envoi de cette année, principalement pour les ouvrages de peinture, sans qu’il y ait lieu toutefois d’en accuser le zèle de nos pensionnaires. Si les travaux de la sculpture ne répondent pas non plus tout à fait à nos légitimes espérances, nous sommes heureux de n’avoir cette année que des éloges, sans restriction, à accorder à ceux de l’architecture où les dettes arriérées ont été acquittées au-delà même de ce qu’exigeaient les règlements et nous aimons à nous flatter que ce noble exemple donné par nos jeunes architectes produira, parmi tous leurs camarades, une généreuse émulation. […] // Sculpture / M. Villain [sic] / M. Villain [sic], dont une maladie, assez grave, a ralenti les travaux, pendant une partie de l’année, et qui s’est vu encore arrêté par les défectuosités du marbre qu’il avait choisi, n’a pu terminer la figure d’Hébé qui devait être le couronnement des travaux de la pension. Cette figure n’est arrivée qu’à l’état d’ébauche ; et c’est seulement d’après le modèle en plâtre, couvert de points que la section a pu apprécier le travail de l’auteur. / Cette statue, de grandeur naturelle, n’est pas heureusement conçue. Le mouvement en est exagéré, les formes manquent de la jeunesse propre au sujet, et le caractère n’en est pas mieux approprié à celui d’Hébé, particulièrement dans la tête. Les draperies, dont le motif n’est pas bien décidé, sont mal ajustées. L’aigle se groupe mal avec la figure ; il est d’une proportion trop forte, et il nuit à l’aspect de la figure. / Dans l’état où se trouve cette statue, l’on n’a cru devoir rien dissimuler des défauts qu’on y a remarqués, précisément parce que cet état permettra à l’artiste de corriger et d’améliorer son marbre, d’après les conseils de l’Académie. / M. Villain [sic] a envoyé encore une tête d’étude représentant l’automne, dont le marbre n’est pas achevé, à l’exception du masque, qui est d’un assez bon caractère. L’ensemble de cet ouvrage offre une trop grande réminiscence de l’antique. Cependant, en le terminant, avec tout le soin qu’il peut y mettre, l’auteur produira un assez bon morceau de sculpture. / Le troisième ouvrage exécuté par M. Villain [sic] est un bas-relief de trois figures, d’un mètre environ de proportion, qui a pour sujet la Bienfaisance. La disposition de ce bas-relief est simple, et l’arrangement en est convenable. On y remarque une assez bonne entente de plans, de même qu’un parti heureux dans les ajustements, bien qu’on eût désiré un meilleur choix de plis dans les détails, et une exécution moins monotone. Les nus du vieillard et de la vieille femme ont de la vérité ; mais on doit dire que les pieds et les mains manquent généralement d’étude. // M. Gruyère. / M. Gruyère, que la maladie avait empêché de remplir ses obligations de troisième année, a satisfait à tous les devoirs qui lui étaient imposés pour cette année et pour la suivante, d’une manière qui a droit à tous les éloges de l’Académie. Sa statue de Mucius Scaevola, modèle en plâtre, restée sous les points à Rome, n’a pu faire partie de l’envoi : mais trois autres ouvrages, qui s’y trouvent compris, témoignent à la fois du zèle et du talent de l’auteur. / Le premier de ces ouvrages, est une figure d’étude, de grandeur naturelle représentant Chactas assis dans l’attitude où il est indiqué par un écrivain célèbre. Le choix de ce sujet n’est pas celui qu’on devrait s’attendre à trouver dans les envois de Rome, et la composition de cette figure rappelle trop sensiblement une statue connue, d’une main habile et d’une exécution récente. Après cette double observation, que l’Académie n’a pas cru devoir dissimuler, elle n’a que des éloges à donner à cet ouvrage remarquable surtout par la vie et le mouvement. On y trouve une très belle étude du nu et un très bon modelé dans toutes les parties. Le torse est très souple, les bras sont bien dessinés, les extrémités traitées avec habilité. Si l’on peut dire que la nature des hommes de cette race n’y a pas été assez exactement recherchée dans tous ses détails, on doit ajouter aussi que la tête est très remarquable par l’expression de douleur profonde qu’elle offre, sans exagération. La statue de M. Gruyère est donc, au jugement de l’Académie, un ouvrage très recommandable, qu’elle se plait à signaler à l’intérêt du Gouvernement, après l’avoir recommandé à l’estime du public. / L’esquisse de M. Gruyère, qui a pour sujet le dernier des Macchabées, donne lieu à des observations moins flatteuses. La composition du groupe n’entre nullement dans les conditions de la statuaire. L’esquisse manque de goût et du sentiment élevé du sujet ; l’ajustement en est mesquin, et le caractère tout à fait moderne. L’auteur de cette esquisse n’a pas compris, ou ne s’est pas rappelé la sévérité de son art. / La tête de Vierge, étude en plâtre, qui est le troisième travail de M. Gruyère, n’est pas non plus, on le dit avec regret, un ouvrage assez digne du talent de l’auteur de Chactas. La proportion en est trop petite, ce qui n’en relève pas le caractère, véritablement trop au-dessous du sujet. Cette tête est trop inclinée et mal attachée ; et l’expression, qui est celle de la souffrance physique, n’est ni convenable, ni intéressante. Il est évident, par cette esquisse, et par cette tête, que M. Gruyère n’a pas pris ces deux ouvrages assez au sérieux ; et c’est le reproche le plus grave que nous puissions lui adresser ; parce que la statuaire n’admet que des travaux sérieux. // M. Diébolt / M. Diébolt, qui n’avait pas rempli ses devoirs de première année, sans avoir pu alléguer d’excuse suffisamment légitime, a réparé cette faute, en satisfaisant à ses obligations de première et de deuxième années dans l’envoi de celle-ci. On a reçu de lui, avec la copie en marbre du Sophocle, un bas-relief en plâtre, représentant une famille chrétienne ensevelissant son enfant aux catacombes, et une tête d’étude de femme, aussi en plâtre. La copie du Sophocle n’a point paru satisfaisante ; elle est exécutée d’une manière maigre et égale ; le sentiment fin et large à la fois de l’antique, n’est pas rendu dans le marbre de M. Diébolt ; et la négligence qu’on signale dans ce travail, est d’autant plus regrettable, que c’est un ouvrage appartenant au Gouvernement et destiné à l’ornement de nos musées et de nos palais. / Le bas-relief est peut-être un peu trop conçu dans les conditions d’un tableau ; ce qui ne laisse pas d’être un sujet de reproche assez grave, d’après les limites respectives que doivent observer entre eux l’art du statuaire et celui du peintre. Du reste, le groupe est convenable, sous le rapport de la composition et sous celui de l’expression. Il y a du sentiment dans cet ouvrage, où l’on désirerait plus de fermeté dans les nus, qui sont généralement d’un modelé mou et rond ; les draperies sont assez bien ajustées ; mais on les trouve mesquines dans la manière de faire. / Quant à la tête d’étude, on regrette de ne pouvoir en faire aucune éloge ; elle est d’un aspect désagréable et d’un mauvais goût, mal ensemble et d’une très faible exécution. [rayé : et le silence que l’on s’impose sur ce morceau est le meilleur témoignage d’indulgence que l’on puisse donner à son auteur »] // M. Godde / M. Godde a envoyé pour son travail de 2e année deux morceaux ; un bas-relief, de cinq figures, représentant Briséis rendu aux ambassadeurs et Joas, tête d’étude. Le bas-relief offre une composition d’un style large et bien conçu ; l’arrangement en est heureux, bien que la figure d’Achille ne le soit pas. Mais l’exécution ne répond pas assez à ce mérite de la conception. Les plans sont mal entendus ; d’où résulte que les figures se fondent l’une avec l’autre. Les nus sont en général mal dessinés et modelés sans vérité et sans vigueur. Les draperies sont lourdes, et faites de manière ; les têtes sont généralement mal ensemble ; les pieds sont d’une forme plate, sans proportion et traités avec négligence. On regrette de ne pouvoir adresser à l’auteur pour sa tête d’étude, que des observations aussi sévères. Cette tête manque à la fois de vérité et de noblesse ; elle est d’un modelé froid, et le travail en est dépourvu d’étude. // M. Cavelier / M. Cavelier a choisi pour le sujet de sa copie en marbre, qui est le travail demandé au pensionnaire sculpteur dans sa première année, le charmant groupe d’Amour et Psyché, du musée du Capitole. / On doit savoir beaucoup de gré à l’artiste d’un pareil choix, qui prouve qu’il ne recule pas devant un travail aussi important que celui-là, et où il y avait à vaincre plus d’une difficulté d’exécution. Du reste, cette copie est assez fidèle, bien qu’on y remarque quelques négligences. / En terminant son examen des travaux de la sculpture, l’Académie ne peut se défendre d’une réflexion pénible ; c’est qu’il semble s’introduire depuis quelques années, dans notre École de Rome, l’usage de n’envoyer au terme de la pension du statuaire que des marbres non terminés. Cette circonstance qui a été signalée dans les envois des années précédentes se reproduit dans celui-ci, d’une manière plus sensible encore, et elle met l’Académie dans la nécessité d’en faire l’objet d’un avertissement sévère. Il est tout à fait contraire à l’esprit de l’institution, comme au véritable intérêt des artistes eux-mêmes, que des figures en marbre, qui doivent être exécutées à Rome, comme le résultat de tout ce que l’artiste a pu acquérir d’habilité pratique jointe à son sentiment propre, arrivent à Paris plus ou moins avancés, mais non finis. Outre que le modèle, d’après lequel l’auteur a pu concevoir et exécuter sa figure, ne se trouve plus à sa disposition, il est évident que le sentiment qu’il portait dans son ouvrage pour recevoir des circonstances nouvelles, où l’artiste est placé, des impressions diverses, qui altèrent le caractère primitif de cet ouvrage, et qui nuisent à son originalité. S’il y a dans cette manière de procéder quelque négligence de la part des pensionnaires sculpteurs, c’est un devoir pour l’Académie de s’opposer à cette fâcheuse tendance, en prescrivant impérieusement que les marbres s’achèvent à Rome. C’est aussi pour elle une obligation de rappeler nos jeunes statuaires à toute la gravité de leur art où il semble que, dans le choix du sujet, il se glisse quelque chose qui tient au goût moderne, et malheureusement aussi à une pensée mercantile, en même temps que, dans la manière de traiter ces sujets, il règne un abandon des modèles antiques et une tendance vers la peinture, qui deviendraient pour la statuaire une double cause de déviation et d’erreur. Or, c’est surtout dans les circonstances où de pareilles dispositions commencent à se manifester, qu’il convient que l’Académie intervienne avec toute son autorité pour arrêter nos jeunes statuaires sur une pente aussi dangereuse, en les rappelant, on le dit, une seconde fois, à toute la sévérité de tout art et à toute dignité de leur profession. […] // En se rendant compte, comme elle vient de le faire, des travaux de ses pensionnaires de Rome et en présence des résultats des concours qu’elle va couronner, l’Académie éprouve un sentiment de satisfaction bien légitime, celui que lui cause la bonne direction qui règne dans les études et qui protège l’avenir de notre jeune école contre l’influence des succès de l’industrie et des séductions du mauvais goût. C’est ce sentiment joint à la conviction profonde qu’elle possède des vrais intérêts de l’art, qui m’autorise à dresser en son nom, aux jeunes talents qui sont aujourd’hui l’objet de tant d’émotions et d’espérances, les derniers conseils de sa vieille expérience, les derniers vœux de sa paternelle sollicitude. Vainqueurs dans toutes les luttes de l’École, vous allez entrer dans une carrière plus vaste et paraître sur un théâtre plus brillant. Portez à Rome, dans cette ville des grandes traditions, les habitudes de travail et d’application auxquelles vous avez dû vos premiers succès. Ne pensez en présence de ces beaux monuments de l’Antiquité et de la Renaissance au milieu desquels vous allez vous trouver qu’à cultiver vos dispositions naturelles, toujours dans un sentiment propre, jamais dans un goût d’école et de système. Restez fidèle à l’art et à vous-mêmes en ne puisant vos inspirations qu’en vous seuls, en en prenant vos modèles que dans la nature. Surtout ne cherchez pas dans ces heureuses années que vous pouvez consacrer tout entières à l’étude, sans aucun souci des choses de la vie, ne songez à vous préparer un avenir de gloire qu’en le fondant sur des travaux sévères et n’allez à Rome que pour perfectionner votre talent, non pour commencer votre fortune. Renfermés jusqu’ici dans l’enceinte laborieuse de vos ateliers, vous êtes assez heureux pour ne pas connaître ce monde où le mérite est trop souvent aux prises avec la faveur, ces commandes qui s’obtiennent par les influences parlementaires plus que par les talents éprouvés, ces travaux où l’art se confond presque avec l’industrie. Conservez cette précieuse ignorance à Rome, où vous allez vivre dans ce palais consacré par le nom des Médicis, où vous ne serez entourés que d’images de grandeur et de souvenirs de gloire. Enfin, au milieu des chefs-d’œuvre de l’art qui doivent vous servir de modèles, ne pensez qu’à l’art lui-même, qui vous rendra quelque jour avec usure tout ce que vous aurez fait pour lui. Ne pensez qu’à la patrie qui vous ouvre ce noble sanctuaire de l’étude, pour que vous puissiez vous y former tout entiers, par la méditation et le travail, sans vous laisser distraire par les idées et les intérêts du monde, et soyez sûrs que la France, si généreuse pour les espérances que vous lui donnez, se montrera juste pour vous, si vous revenez dignes d’elle.
Localisations
Cote / numéro : 
Paris, Bibliothèque de l'Institut de France, 4° AA 34 (usuel), année 1844-1845, tome 15 (1844)
Source
source : Institut national d'histoire de l'art (France) - licence : Attribution 4.0 International (CC BY 4.0)
Commentaire interne
Base Envois de Rome FMP, fichier Documents.fp7, notice : £Rapport envois, Institut à AFR, 1844, sculpture£ Notice créée le 18/11/2002. Notice modifiée le : 24/11/2017. Rédacteur : Christiane Dotal.
Rédacteur
Christiane Dotal